Par Le Temps d'Algérie, 15/2/2014 |
Une
ONG marocaine de défense des droits de l’homme a appelé les autorités à
"cesser de jouer le rôle de gendarme" de l’UE et de respecter leurs
engagements internationaux après la mort, la semaine dernière, de
plusieurs migrants subsahariens, près de l’enclave espagnole de Ceuta
(Sebta, nord du Maroc) du fait de l’intervention de la garde civile
espagnole qui a utilisé, selon elle, des balles en caoutchouc.
L’Association marocaine des droits humains (AMDH) a réaffirmé, dans un
communiqué, "la nécessité pour le Maroc de cesser de jouer le rôle de
gendarme de l'Union européenne, et du respect de ses engagements
internationaux en matière des droits humains des migrants et demandeurs
d'asile" suite au drame qui est survenu lorsque quelque 300 migrants
cachés dans une forêt avaient tenté de traverser vers Sebta au travers
du grillage qui plonge dans la mer.
Selon l’ONG, les migrants
"furent pris en tenaille par les forces auxiliaires marocaines armées de
gourdins d'un côté et la guardia civile espagnole qui a tiré avec des
balles en caoutchouc sur les migrants engagés dans la mer, ce qui a
provoqué -selon de nombreuses sources- la mort de 14 personnes et la
blessure de dizaines d'autres à des degrés de gravité variables".
L’ONG
estime que depuis l'annonce par l'Etat marocain de sa "nouvelle
politique migratoire" (septembre 2013) et de la "régularisation
exceptionnelle" des immigrants en situation d'admission irrégulière, les
autorités publiques ont multiplié "les interventions répressives" dans
la région nord et particulièrement près des enclaves espagnoles de
Ceuta et Melilla dans le but d'obliger les migrants subsahariens à
évacuer cette zone et se replier sur Rabat, la capitale, loin des
frontières espagnoles.
Appel à l'Espagne à traduire les responsables devant la justice, la responsabilité de la Commission de l'UE engagée La
même source considère que "c'est dans ces conditions de terreur, mêlée
au peu de crédit qu'accorde la grande majorité de ces migrants à la
"nouvelle politique migratoire" et à la volonté réelle de l'Etat de
respecter leurs droits humains fondamentaux et de garantir la sauvegarde
de leur dignité, que se répètent les tentatives de traverser la
frontière, soit au travers des grillages qui encerclent les deux
enclaves, soit par voie maritime.
Elle ajoute que "ceux qui
réussissent tombent souvent dans les mains de la guardia civile
espagnole qui les soumet à différentes sortes de violences avant de les
refouler illégalement, avec leurs blessures comme l'attestent des
photos et vidéos prises par des journalistes espagnoles" tandis que
"ceux qui échouent dans la tentative sont récupérés par les autorités
marocaines qui leur font subir diverses brimades et violences".
Après
avoir condamné ce qu'elle a qualifié "assassinat" de ces migrants
subsahariens, toutes les exactions et violences qu'ils subissent, et de
toute action qui porte atteinte à leur dignité, l’AMDH a appelé les
autorités espagnoles à "traduire les responsables de ces massacres
devant la justice, en application du principe de non soustraction à la
justice en matière d'atteinte grave aux droits humains".
Selon
elle, la responsabilité de ces évènements incombe à la Commission de
l'UE qui n'"a cessé d'encourager ces transgressions au droit tant à
travers la ligne sécuritaire qui détermine sa politique migratoire et de
droit d'asile, que son silence et sa non condamnation de ces exactions
qui se répètent sur les versants nord et sud de la Méditerranée" et a
déclaré sa "réprobation de toutes les atteintes et transgressions aux
droits des migrants subsahariens de la part des autorités marocaines et
demande de traduire les responsables devant la justice".
Enfin,
l’ONG a invité "toutes les forces démocratiques à continuer la lutte
pour une vraie nouvelle politique des migrations, respectueuse de la
dignité humaine et des engagements internationaux du Maroc en matière
des droits humains".
HRW critique les mauvais traitements infligés aux migrants L’ONG
américaine de défense des droits de l’homme, Human Rights Watch (HRW)
estime à 25.000 le nombre de Subsahariens entrés illégalement au Maroc
mais il n'y a pas de "recensement exact" de ces migrants.
Dans
son dernier rapport de 79 pages, focalisé sur la région de l’Oriental
(nord-est du Maroc), intitulé "Abus et expulsions: les mauvais
traitements infligés aux migrants d’Afrique subsaharienne au Maroc", HRW
a appelé le gouvernement marocain à mettre fin à "l’usage d’une force
excessive" à l’encontre des migrants subsahariens et "aux retours et
expulsion de force des migrants sans procédure régulière", affirmant que
les forces de sécurité marocaines violaient leurs droits.
L’ONG
écrit notamment dans ce rapport établi à fin octobre 2013 et rendu
public lundi dernier à Rabat: "Alors que le Maroc a le droit de
surveiller ses frontières et de faire appliquer les dispositions légales
pour contrôler l’immigration, ce pays ne devrait pas se livrer à des
traitements cruels, inhumains ou dégradants envers les migrants, en les
frappant, leur volant leurs possessions et en détruisant de façon
expéditive leur abris de fortune".
En réaction à ce rapport, le
porte-parole du gouvernement marocain Mustapha El-Khalfi a estimé qu’il
n’était "pas totalement équitable à l’égard de la nouvelle politique
migratoire adoptée par le royaume" en se basant sur "des données et
allégations qui concernent la période où cette nouvelle politique
n’était pas encore en vigueur".
Selon lui, le Maroc a entamé une
opération de régularisation exceptionnelle au profit d’environ 25.000
immigrés, ayant débuté le 1er janvier 2014 et qui va durer une année,
ajoutant qu’elle a permis "rien que durant un mois de recevoir près de
10.000 demandes de régularisation".
Le gouvernement marocain a
annoncé, en septembre 2013, qu’il mettait en œuvre une nouvelle
politique d’immigration et d’asile, basée sur un ensemble de
recommandations formulées par le Conseil national des droits de l’homme
(CNDH) contenues dans un rapport dans lequel il a souligné les
atteintes aux droits humains à l’encontre des migrants, des demandeurs
d’asile et des réfugiés au Maroc.
Le CNDH avait appelé le
gouvernement à respecter la constitution du Maroc et ses engagements
internationaux en matière de droits des réfugiés et des demandeurs
d’asile, des migrants et des victimes de la traite des êtres humains.
Les
côtes de Tétouan, Nador, Tanger et Al Hoceima dans le nord du Maroc
sont les lieux privilégiés par les émigrants clandestins, en majorité
des Subsahariens, pour tenter de rejoindre l’Europe via les côtes
espagnoles.
Une partie d’entre eux essaient d’entrer dans les
enclaves espagnoles de Sebta et Melilla, par voie terrestre tandis que
d’autres tentent de traverser le détroit de Gibraltar, large de 14,4 km.
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