Vraisemblablement, cette résolution prorogeant le mandat
de la MINURSO jusqu’au 30 Avril 2016 a été rédigée par le soi-disant
groupe des amis du Sahara Occidental (États-Unis, la France, l’Espagne,
la Grande-Bretagne et la Russie).
Ce texte n’a rien apporté de ce qui était attendu, en particulier par
les Etats Africains et d’autres pays tels que le Venezuela ainsi que
plusieurs organisations internationales et régionales inquiets par la
situation dangereuse des populations et par la possible reprise de la
guerre dans la région.
En effet, cette nouvelle résolution n’a rien de nouveau sauf sa date
d’adoption. Elle reprend à la lettre la résolution de 2014. Ce qui
représente un échec pour ceux qui s’attendaient à une prise de
responsabilité de la part du Conseil.
Après l’adoption, le représentant de la Malaisie, pays membre
non-permanent du Conseil, s’est plaint dans son discours d’explication
de vote, de ce qu’il a décrit comme « un manque de transparence dans les
négociations sur la résolution ». En d’autres termes, l’absence de
consultations par les cinq Membre permanents avec les autres membres du
Conseil de sécurité.
Il convient d’indiquer que le projet a d’abord été examiné par le
Groupe des « Amis » du Sahara Occidental avant d’être simplement
communiqué aux autres membres du Conseil de sécurité, qui se sont tous
plaints de cette méthode de travail et de l’indifférence illustrée par
les cinq membres permanents à l’égard de leurs propositions et
recommandations qu’ils souhaitaient voir refléter dans ce texte.
Coup de force
Les délégués africains se sont même plaint du fait que l’Afrique ne
soit pas représentée dans le groupe des « Amis » du Sahara occidental,
ce qui est étrange et inacceptable.
Dans sa déclaration d’explication de vote, le représentant du
Venezuela a déclaré que la surveillance des droits de l’homme aurait dû
être incluse dans le mandat de la MINURSO, et que l’Union africaine
aurait dû être autorisée à s’adresser au Conseil dans une réunion
spéciale avant le vote de la résolution.
Le Venezuela a exprimé « certaines préoccupations sur la procédure
utilisée dans la rédaction de la résolution que nous avons adoptée. On
nous présente un texte qui a déjà été accepté par le Groupe des Amis du
Sahara occidental, qui ne traitait pas les préoccupations légitimes et
les propositions qui ont été faites part de nombreux pays intéressés à
cette question, le Venezuela y inclus. Ces propositions visaient à
renforcer le rôle de la MINURSO et promouvoir et protéger les droits
humains de la population du Sahara occidental, en tenant compte des
recommandations formulées par le Secrétaire général dans son rapport, et
la nature de toutes les missions de l’ONU. Il est nécessaire, ensuite,
que les négociations futures qui traitent la question voient une
amélioration dans les méthodes de travail dans le but d’aider à parvenir
à un large débat qui est inclusif et transparent ».
L’Angola, citant le Tchad et le Nigeria, a pour sa part indiqué que
« les trois Etats membres africains du Conseil de sécurité ont, d’abord,
voté en faveur du projet de résolution car convaincus que le Conseil de
sécurité est vraiment engagé pour l’autodétermination du peuple du
Sahara occidental. Deuxièmement, le Conseil de sécurité est déterminé à
mettre fin à l’impasse actuelle et à la réalisation de progrès vers une
solution politique. Troisièmement, le Conseil de sécurité reconnaît que
la réalisation d’une solution politique pourrait contribuer à la
stabilité et la sécurité dans la région du Sahel. Et quatrièmement, le
Conseil de sécurité encourage les parties à démontrer davantage de
volonté politique pour trouver une solution afin de poursuivre le
processus de négociation, et reconnaît que la consolidation du statuquo
est inacceptable comme indiqué par d’autres orateurs ce matin. »
Il convient de rappeler que l’Union africaine avait formellement
demandé au Conseil de sécurité de permettre au Président Joaquim
Chissano, l’Envoyé spécial de l’UA pour le Sahara occidental, d’exposer
aux membres du Conseil la position de l’UA sur la question.
Le Maroc et ses alliés avaient refusé cette demande. Le Maroc a en
outre exprimé son rejet catégorique de toute sorte de participation de
l’Union africaine dans les efforts internationaux visant à trouver une
solution au conflit.
Le représentant du Maroc auprès de l’ONU, Omar Hilal, a simplement
dénommé l’Union africaine de « toxique » sur cette question, en disant
que, ayant pris sa décision, l’UA ne devrait pas s’adresser au Conseil.
Le Représentant français à cette réunion, a déclaré que la résolution
a donné « l’impulsion nécessaire au processus politique » au Sahara
occidental, en impasse pendant l’année écoulée, selon lui. Pourtant, il a
reflété la position déshonorante de son pays en faveur de la continuité
de la colonisation du Sahara Occidental, réitérant le soutien
traditionnel français à la proposition marocaine d’autonomie pour le
Sahara Occidental, ce qui est contradictoire avec la doctrine de la
décolonisation de l’ONU.
L’obstacle français
Le Maroc et la France rejettent tous les appels internationaux pour
inclure un mandat de surveillance des droits de l’homme dans la mission
de la MINURSO.
L’Union africaine a récemment appelé à ce que la MINURSO soit dotée
d’un mandat pour la surveillance des droits de l’homme, à l’instar de
toutes les missions de maintien de la paix des Nations unies, mais la
résolution du Conseil de sécurité de l’ONU a une nouvelle fois ignoré
cet appel.
L’UA a également voulu que la résolution indique explicitement que la
mission principale de la MINURSO est d’organiser un référendum, ce qui
est clairement indiqué dans le nom même de cette instance (Mission des
Nations Unies pour le Référendum au Sahara-Occidental MINURSO). La
France et le Maroc essayent d’insinuer que sa mission est simplement le
maintien du cessez-le-feu.
De son côté, le Représentant du Polisario à l’ONU, Ahmed Boukhari, a
publié une déclaration se félicitant du soutien de l’Union africaine a
la position sahraouie mais déplorant « la position de la France, qui
reste le principal obstacle à une paix juste et durable au Sahara
occidental. »
La nouvelle résolution du Conseil de sécurité est catastrophique, vu
les frustrations qu’elle va semer partout dans la région, notamment au
sein des populations sahraouies.
La question qui se pose est la suivante : est-ce que le Conseil de
sécurité veut pousser les Sahraouis à reprendre la lutte armée et
plonger le Maghreb dans une crise similaire à celle du Moyen-Orient ?