- Écrit par Lakome, 7/3/2013
Le nouveau projet de code de la presse donne aux officiers de police le droit de saisie et d'interdiction des publications.
Le nouveau projet de code de la presse et de l'édition préparé par le
ministère de la Communication dirigée par Mustafa Khalfi, veut
légaliser l'interdiction pour des motifs d'ordre moral, alors que le
code actuel prévoit l'interdiction pour des motifs principalement
politiques, liés à la monarchie, la religion et la question de
l'intégrité territoriale du Maroc.
Ce projet de loi, dont Lakome détient une copie, stipule dans son
article 40 l'interdiction de tout imprimé, écrit, graphique, sculpture,
image ou film qui comporte de la débauche ou qui incite à l'adultère ou à
la criminalité, en particulier en raison de son contenu pornographique.
Dans
ce cas, toutes les peintures ou sculptures, y compris les œuvres d'art
classiques qui révèlent les détails du corps humain va tomber à l'avenir
sous le coup de sanctions prévues par ce projet de loi.
Le droit de saisie à la police
Ainsi, l'article 41 du projet de code prévoit la punition des crimes
visés à l'article 40 d'amendes allant de 50 000 à 100 000 dirhams. Le
même article indique que les officiers de police judiciaire sont
habilités, dès qu'ils en prennent connaissance et après avoir informé le
procureur du roi, à saisir les publications, imprimés, dessins,
gravures, images ou films contenant les objets mentionnées dans
l'article précédent, et ce lors de l'importation, l'exposition ou
lorsqu'ils sont présentés à l'attention du public.
Cela signifie que le pouvoir discrétionnaire d'un officier de police
judiciaire sera déterminant pour juger si l'objet mérite ou non
l'interdiction, qui devrait normalement être prononcée par une décision
de justice.
La personne du roi : de la sacralité à la révérence
Le projet de code ne comporte aucune peine d'emprisonnement, ce qui
est en soi une avancée bien que les derniers journalistes marocains
emprisonnés n'ont pas été poursuivis au nom du code de la presse mais du
code pénal.
Les soi-disant "lignes rouges" y sont encore présentes et peuvent
être l'objet d'interprétations élastiques. Ainsi on y trouve le
sempiternel «Triangle des Bermudes» constitué par l'institution
monarchique, la religion et le Sahara. L'article 33 du projet reprend le
maudit article 41 du code de la presse en vigueur.
Ainsi, cet article 33 stipule qu'il est possible d'interdire la
diffusion des publications et des périodiques étrangers et leur mise en
vente ou leur exposition à l'attention du public si elles comportent une
offense à la religion musulmane, à l'intégrité territoriale du Royaume
ou au régime monarchique, ou comporte un manque de respect ou de
révérence due à la personne du roi ou aux membres de la famille royale
chérifienne ainsi que tout ce qui pourrait troubler l'ordre public ou
constituer un préjudice pour les mineurs.
Un chèque en blanc
Une comparaison rapide montre que cet article ne diffère guère de
l'article 41 du code de la presse actuel, sauf que la peine
d'emprisonnement a été supprimée alors que l'interdiction a été
maintenue. En effet, l'article 41 actuel stipule que toute personne
ayant manqué de respect au roi, à leurs altesses royales les princes et
princesses est punie d'emprisonnement d'une durée comprise entre trois
et cinq ans et d'une amende allant de 10.000 à 100.000 dirhams, la même
peine s'applique si un journal ou une revue comporte une offense à la
religion musulmane, à l'institution royale ou à l'intégrité territoriale
... ".
En cas de non respect de l'article 33, le projet a prévu des
sanctions sous forme d'amendes chiffrées pour tous les «crimes» énoncées
au chapitre 33 sauf pour le "crime" de manque de respect dû au roi et
aux membres de la famille royale, où le montant de l'amende a été
remplacé par des points de suspension... Ce qui veut dire soit que le
projet sera complété ultérieurement avec les montants qui manquent, soit
que le montant sera à la discrétion du juge. Autant dire un chèque en
blanc.
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