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par Flore Vienot, 2/12/2013
Le 14 novembre dernier, le Maroc accède au siège du
Conseil des Droits de l’Homme à l’Onu avec 163 voix sur 193 pour un
mandat de 3 ans. Empêché en 2009 par la Communauté Internationale, le
Royaume chérifien obtient enfin ce qu’il lui manquait pour finir
d’asseoir son autorité dans la région. Pourtant, une partie de la
Communauté Internationale continue à dénoncer les nombreux manquements
aux droits humains au sein du Royaume. Bizarre, bizzarre…
Ainsi en mars dernier, Juan Mendez, le rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture, rendait un rapport inquiétant, affirmant qu’au Maroc « la torture et les mauvais traitements n’ont pas disparu » et constatant que « la pratique des traitements cruels persiste dans les affaires pénales de droit commun. ». Il se disait également « vivement préoccupé par plusieurs témoignages relatifs au recours à la torture et aux mauvais traitements dans des cas présumés de terrorisme ou de menace contre la sécurité nationale ».
John Kerry à la tête du Département américain accuse également le Maroc dans un rapport sur la situation des droits de l’Homme dans le monde. La fondation Robert Kennedy a aussi rendu un rapport faisant part des mêmes inquiétudes. Et les visites régulières du rapporteur spécial des Nations Unies, Christopher Ross, se soldent à chaque fois par des comptes-rendus jugeant insuffisants les efforts du Maroc sur cette question.
Tous, gouvernements, associations et fondations, dénoncent aussi les difficultés pour les observateurs internationaux de faire leur travail en toute liberté. Ainsi le 22 octobre le Rapport Tannock du Parlement européen sur la région du Sahel y compris du Sahara Occidental « déplore vivement que, le 6 mars 2013, le Maroc ait expulsé une délégation de quatre députés au Parlement européen […], déplore profondément le comportement des autorités marocaines et exige du Royaume du Maroc qu’il accorde la liberté d’accès et de circulation au Sahara occidental aux observateurs indépendants, aux députés, à la presse et aux organisations humanitaires ».
Depuis bientôt 40 ans un conflit oppose le Maroc et le Front Polisario, revendiquant tout deux le territoire au Sud du Maroc et au Nord de la Mauritanie, nommé par les marocains « provinces du sud » et par les sahraouis « Sahara Occidental ». Ce territoire est classé à l’ONU, parmi 17 autres, dans la liste des « territoires non autonome à décoloniser ». Du point de vue du Droit International, il est ainsi occupé illégalement par le Maroc depuis 1975, année de la Marche verte à l’issue de laquelle les marocains ont été appelés à s’installer dans le sud. Depuis la fin du conflit armé en 1991, la situation est en léthargie : la mission onusienne (la Minurso) est dans l’incapacité à organiser le référendum d’autodétermination qu’elle a pour rôle de mettre en place ; plus de 200 000 exilés politiques sahraouis sont toujours réfugiés dans des camps proche de Tindouf en Algérie tandis qu’une minorité vit dans les territoires occupés, de l’autre côté du mur de sable et de mines long de 2700 km, construit par le Maroc dès 1981. Et des exactions commises à l’encontre du peuple sahraoui sont toujours dénoncées par des associations locales et internationales, par des ONG ainsi que par certains gouvernements et parlementaires.
Ainsi le Rapport Tannock « se dit gravement préoccupé par le récent rapport du rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, qui a trouvé des preuves établissant que des fonctionnaires marocains ont détenu des citoyens pour des motifs politiques, ont fait subir des tortures et des viols à des détenus sahraouis, ont enlevé puis abandonné dans le désert des protestataires afin de les intimider, et ont ciblé délibérément et régulièrement des défenseurs de l’indépendance, y compris dans leur propre maison ». Il pointe aussi les « disparitions forcées » et « procès iniques ». Le 17 février dernier, un tribunal militaire à Rabat condamnait en effet 25 civils sahraouis, dont des militants pour les droits de l’Homme, à des peines allant de 20 ans de prison à la perpétuité pour 9 d’entre eux. Amnesty international demande que soient « rejugés dans le cadre de procès équitables devant des tribunaux civils » et que soient ouverte « une enquête sur leurs allégations de torture ». Le Rapport Tannock condamne aussi « les violations des droits de l’homme dont sont victimes les femmes sahraouies sur les territoires occupés par le Maroc, […] auxquelles ont recours les forces occupantes marocaines pour intimider le peuple sahraoui dans sa lutte pour son droit légitime à l’autodétermination ».
A l’Onu, la Minurso est la seule mission à ne pas avoir dans son mandat la surveillance des droits de l’Homme, pourtant revendiquée par un grand nombre de droit-de-l’hommistes partout dans le monde. L’obtention par le Maroc d’un siège au Conseil des Droits de l’Homme de l’Onu ferme encore un peu cette possibilité revendiquée, et pourrait bien aussi enfouir un peu plus encore la réalité d’une situation qui peine déjà à atteindre les oreilles du grand public.
Les campagnes d’Amnesty International sur les droits de l’Homme au Maroc
Le monde entier reconnait les progrès du Maroc sur la question des Droits de l’Homme…
« Le Maroc a été élu parce qu’il détient la carte de visite de l’engagement en faveur de la protection et de la défense des droits de l’Homme partout dans le monde« , a affirmé Omar Hilal, ambassadeur représentant permanent du Maroc auprès de l’Office des Nations unies à Genève, alors que le Maroc accédait au siège du Conseil des Droits de l’Homme. Des associations marocaines comme l’AMDH ou l’OMDH présentes sur le terrain depuis une trentaine d’années, travaillent en effet au quotidien pour défendre les droits humains sur le territoire. Petit à petit elles se sont fait une place à l’international. Et depuis sa création en 2011, le Conseil National des Droits de l’Homme vient « concrétiser l’engagement du Royaume du Maroc dans la protection des droits et libertés des citoyens » et « affirmer l’attachement du pays au respect de ses engagements internationaux en matière de protection et de promotion des droits de l’Homme ». Le vote massif en faveur du Maroc est donc selon Omar Hilal « un désaveu de tous ceux qui critiquent le Maroc, le dénigrent et l’agressent en ce qui concerne la prétendue violation des droits de l’Homme« .… malgré des rapports très inquiétants des observateurs internationaux
Car si 163 pays ont voté (à bulletin secret) en faveur de l’entrée du Maroc au Conseil des Droits de l’Homme à l’Onu en ne tarissant pas d’éloges sur les « progrès » du Maroc, une partie de ces mêmes États, par l’intermédiaire des gouvernements et de la société civile, dénoncent régulièrement les manquements de l’État marocain au respect des droits humains. Comme Reporters sans frontière qui place le Maroc au 139e rang sur 179 dans le classement mondial de la liberté de la presse.Ainsi en mars dernier, Juan Mendez, le rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture, rendait un rapport inquiétant, affirmant qu’au Maroc « la torture et les mauvais traitements n’ont pas disparu » et constatant que « la pratique des traitements cruels persiste dans les affaires pénales de droit commun. ». Il se disait également « vivement préoccupé par plusieurs témoignages relatifs au recours à la torture et aux mauvais traitements dans des cas présumés de terrorisme ou de menace contre la sécurité nationale ».
John Kerry à la tête du Département américain accuse également le Maroc dans un rapport sur la situation des droits de l’Homme dans le monde. La fondation Robert Kennedy a aussi rendu un rapport faisant part des mêmes inquiétudes. Et les visites régulières du rapporteur spécial des Nations Unies, Christopher Ross, se soldent à chaque fois par des comptes-rendus jugeant insuffisants les efforts du Maroc sur cette question.
Tous, gouvernements, associations et fondations, dénoncent aussi les difficultés pour les observateurs internationaux de faire leur travail en toute liberté. Ainsi le 22 octobre le Rapport Tannock du Parlement européen sur la région du Sahel y compris du Sahara Occidental « déplore vivement que, le 6 mars 2013, le Maroc ait expulsé une délégation de quatre députés au Parlement européen […], déplore profondément le comportement des autorités marocaines et exige du Royaume du Maroc qu’il accorde la liberté d’accès et de circulation au Sahara occidental aux observateurs indépendants, aux députés, à la presse et aux organisations humanitaires ».
Une situation inquiétante pour les revendications du peuple sahraoui
Difficile à croire que le Maroc ait pu accéder si facilement à un siège du Conseil international des Droits de l’Homme… Incroyable donc, et inquiétant pour les défenseurs de la cause sahraouie.Depuis bientôt 40 ans un conflit oppose le Maroc et le Front Polisario, revendiquant tout deux le territoire au Sud du Maroc et au Nord de la Mauritanie, nommé par les marocains « provinces du sud » et par les sahraouis « Sahara Occidental ». Ce territoire est classé à l’ONU, parmi 17 autres, dans la liste des « territoires non autonome à décoloniser ». Du point de vue du Droit International, il est ainsi occupé illégalement par le Maroc depuis 1975, année de la Marche verte à l’issue de laquelle les marocains ont été appelés à s’installer dans le sud. Depuis la fin du conflit armé en 1991, la situation est en léthargie : la mission onusienne (la Minurso) est dans l’incapacité à organiser le référendum d’autodétermination qu’elle a pour rôle de mettre en place ; plus de 200 000 exilés politiques sahraouis sont toujours réfugiés dans des camps proche de Tindouf en Algérie tandis qu’une minorité vit dans les territoires occupés, de l’autre côté du mur de sable et de mines long de 2700 km, construit par le Maroc dès 1981. Et des exactions commises à l’encontre du peuple sahraoui sont toujours dénoncées par des associations locales et internationales, par des ONG ainsi que par certains gouvernements et parlementaires.
Ainsi le Rapport Tannock « se dit gravement préoccupé par le récent rapport du rapporteur spécial des Nations unies sur la torture, qui a trouvé des preuves établissant que des fonctionnaires marocains ont détenu des citoyens pour des motifs politiques, ont fait subir des tortures et des viols à des détenus sahraouis, ont enlevé puis abandonné dans le désert des protestataires afin de les intimider, et ont ciblé délibérément et régulièrement des défenseurs de l’indépendance, y compris dans leur propre maison ». Il pointe aussi les « disparitions forcées » et « procès iniques ». Le 17 février dernier, un tribunal militaire à Rabat condamnait en effet 25 civils sahraouis, dont des militants pour les droits de l’Homme, à des peines allant de 20 ans de prison à la perpétuité pour 9 d’entre eux. Amnesty international demande que soient « rejugés dans le cadre de procès équitables devant des tribunaux civils » et que soient ouverte « une enquête sur leurs allégations de torture ». Le Rapport Tannock condamne aussi « les violations des droits de l’homme dont sont victimes les femmes sahraouies sur les territoires occupés par le Maroc, […] auxquelles ont recours les forces occupantes marocaines pour intimider le peuple sahraoui dans sa lutte pour son droit légitime à l’autodétermination ».
A l’Onu, la Minurso est la seule mission à ne pas avoir dans son mandat la surveillance des droits de l’Homme, pourtant revendiquée par un grand nombre de droit-de-l’hommistes partout dans le monde. L’obtention par le Maroc d’un siège au Conseil des Droits de l’Homme de l’Onu ferme encore un peu cette possibilité revendiquée, et pourrait bien aussi enfouir un peu plus encore la réalité d’une situation qui peine déjà à atteindre les oreilles du grand public.
Des Liens :
Rapport TannockLes campagnes d’Amnesty International sur les droits de l’Homme au Maroc
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