Par RSF, 18/9/2013.
Reporters sans frontières condamne l’arrestation
par la police judiciaire de Rabat du directeur du portail d’information
arabophone Lakome, Ali Anouzla, le 17 septembre 2013.
“Nous exigeons la libération immédiate de Ali Anouzla
qui a publié cette vidéo dans un but purement informatif. Il est
inadmissible qu’un journaliste soit poursuivi pour son travail
d’information et que les ordinateurs de la rédaction de Lakome aient été saisis”, a déclaré Reporters sans frontières.
“En cas de poursuites engagées à son encontre, nous
serons attentifs à ce que l’investigation respecte scrupuleusement les
principes d’une enquête indépendante dans une affaire où la liberté
d’expression est clairement mise en cause”, a ajouté l’organisation.
Dans un communiqué
du parquet de Rabat, publié le 17 septembre, le procureur général du
roi déclare que, “suite à la diffusion par le journal électronique Lakome
d’une vidéo attribuée à Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI),
comprenant un appel clair et une incitation directe à commettre des
actes terroristes dans le Royaume du Maroc, le parquet général a donné
ses instructions à la police judiciaire pour procéder à l’arrestation du
responsable du dit journal électronique pour enquête”.
Les locaux du portail informatique ont été inspectés par
la police judiciaire, qui a saisi les unités centrales des ordinateurs
et a interrogé les journalistes sur place. Le journaliste a été placé en
garde à vue à la brigade nationale de la police judiciaire de
Casablanca, en charge des affaires terroristes. Contactée par
l’organisation, l’avocate du journaliste, Maître Naima Guellaf, a
déclaré ne pas être autorisée par le procureur général à entrer en
contact téléphonique ou physique avec son client avant le vendredi 20
septembre 2013.
La direction de la version francophone du portail Lakome a condamné sur son site l’arrestation du directeur de Lakome
arabophone et précise que le portail n’a fait que publier un lien vers
la vidéo. Elle a ajouté qu’il s’agissait d’une vidéo de propagande
présentée comme telle dans le cadre d’un article datant du 14 septembre consacré au réseau AQMI, organisation pour laquelle, aucun des portails ne prend parti.
Elle rappelle que la diffusion de vidéos d’AQMI est “une
pratique constatée dans les médias internationaux. (...) La vidéo
d’AQMI avait par exemple été relayée sur le site d’informations Huffington Post (France) tandis que des médias comme L’Express ou LCI publiaient un lien pour que leurs lecteurs puissent consulter cette vidéo sur Youtube”.
Le ministre de la Justice, Mustapha Ramid, a annoncé dans un communiqué distinct que le gouvernement marocain avait l’intention de porter plainte en Espagne contre le quotidien El Pais pour avoir diffusé cette même vidéo sur son site internet. Selon le correspondant Afrique du Nord du quotidien, Ignacio Cembrero, contacté par Reporters sans frontières, le journal pourrait être poursuivi pour “apologie du crime”.
La vidéo, intitulée “Maroc : le royaume de la corruption
et du despotisme”, a été diffusée au cours de la semaine dernière sur
différents supports électroniques avant d’être suprimée par Youtube pour “contenu violent”.
Ali Anouzla est connu pour ses articles critiquant la
politique du gouvernement marocain et réclamant une plus grande liberté
de la presse. Le journal Lakome avait notamment été le premier à
révéler l’affaire dite “Danielgate” du pédophile espagnol, Daniel
Galván, gracié par erreur par le roi du Maroc.
Cela n’est pas la première fois que le journaliste est
inquiété par la justice marocaine. Depuis le 17 juin 2013, il est
poursuivi pour avoir publié un article relatif à une rixe tribale ayant
fait des victimes dans un quartier de Fès. Malgré le fait qu’il ait
immédiatement retiré l’information et publié un démenti, il a été accusé d’avoir publié de manière préméditée de fausses informations (article 42 du code de la presse
du Maroc). Il a été convoqué par les services de police de Fès et mis
en examen. Le procès initialement prévu pour le 26 juillet a été reporté
à la fin du mois de septembre.
Contacté par Reporters sans frontières, Ali Anouzla
avait alors expliqué qu’il était victime d’une campagne de harcèlement
et d’acharnement judiciaire. La fausse information en question avait été
lancée par le portail Rasd. Ce dernier a publié, le 18 juillet dernier,
un article expliquant que la nouvelle a été inventée
pour montrer que certains journalistes étaient ‘’peu scrupuleux’’ dans
la vérification de leurs informations. Plusieurs sites, tels que Hibapress.com ou scoop.ma, avaient également relayé cette même fausse nouvelle et ne sont pas à ce jour poursuivis.
Anciennement directeur et rédacteur en chef du quotidien Al-Jarida Al-Oula, Ali Anouzla avait été mis en examen en 2009 par le tribunal de Rabat suite à un article publié sur l’état de santé du Roi
citant une source médicale anonyme. Le parquet général l’avait alors
poursuivi pour “délit de publication de fausses informations avec
mauvaise intention, d’allégations et de faits mensongers”.
http://fr.rsf.org/maroc-arrestation-d-un-journaliste-apres-18-09-2013,45195.html
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Edito de Aufait :Libérer Ali Anouzla
Par A.Sedrati,
Autant l'arrestation du journaliste Ali Anouzla est
une mesure excessive et contre productive, autant sa défense au nom
d’une sacro sainte liberté d’expression ou liberté de la presse est
délicate.
Youtube a jugé que la vidéo faisait trop appel à la violence et a stoppé sa publication. En effet, le film incriminé est clairement un contenu de communication marketing d’Aqmi, incitant les Marocains à renverser la monarchie et à s’engager dans le jihad. Or la responsabilité d’un journaliste est aussi de contrôler le contenu de ce qu’il publie, pour qu’il soit conforme aux droits universels et à la législation nationale.
Tout le monde sait que les mouvances terroristes cherchent à faire le plus de propagande possible pour leurs idéologies, et ce afin de recruter à travers le monde de nouveaux adeptes. Afficher une telle vidéo revient finalement à distribuer des centaines de milliers de tracts appelant au jihad guerrier contre l’Occident, à la destruction de la monarchie, de la bourgeoisie marocaine et de tous ceux qui s’opposent à l’application de la charia.
On peut en parler pour informer le public et faire notre travail de journaliste mais sans pour autant transformer nos médias en tribunes au service d’Aqmi, Al Nosra ou Al Qaïda.
Ali Anouzla devait certainement être rappelé à l’ordre pour qu'il retire la vidéo publiée sur son site, mais personne ne peut penser un instant qu’il serait un proche de cette mouvance, au point de mériter d’être enfermé et poursuivi.
Youtube a jugé que la vidéo faisait trop appel à la violence et a stoppé sa publication. En effet, le film incriminé est clairement un contenu de communication marketing d’Aqmi, incitant les Marocains à renverser la monarchie et à s’engager dans le jihad. Or la responsabilité d’un journaliste est aussi de contrôler le contenu de ce qu’il publie, pour qu’il soit conforme aux droits universels et à la législation nationale.
Tout le monde sait que les mouvances terroristes cherchent à faire le plus de propagande possible pour leurs idéologies, et ce afin de recruter à travers le monde de nouveaux adeptes. Afficher une telle vidéo revient finalement à distribuer des centaines de milliers de tracts appelant au jihad guerrier contre l’Occident, à la destruction de la monarchie, de la bourgeoisie marocaine et de tous ceux qui s’opposent à l’application de la charia.
On peut en parler pour informer le public et faire notre travail de journaliste mais sans pour autant transformer nos médias en tribunes au service d’Aqmi, Al Nosra ou Al Qaïda.
Ali Anouzla devait certainement être rappelé à l’ordre pour qu'il retire la vidéo publiée sur son site, mais personne ne peut penser un instant qu’il serait un proche de cette mouvance, au point de mériter d’être enfermé et poursuivi.
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