Association
de Défense des Droits de l’Homme au Maroc
ASDHOM 79, rue
des Suisses 92000 Nanterre
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Nous nous attendions à ce que ce
mois de septembre soit chaud en termes d’actualités juridiques et de procès
politiques au Maroc, mais pas à ce point-là. Nous nous sommes inquiétés dans les
deux points précédents de la multiplication
de ces procès au cours de ce mois-ci. L’arrestation et le placement en
garde-à-vue du journaliste Ali
Anouzla, ce mardi 17 septembre, nous donnent malheureusement
raison.
Ce point sera, en partie, consacré
à cette arrestation car Ali
Anouzla figurait déjà dans nos listes parmi les candidats (voir listes) au parrainage puisqu’il
fait l’objet de poursuites judiciaires en état de liberté depuis sa convocation
le 17 juin 2013 par le procureur du roi de Fès. Son procès initialement prévu pour le 26 juillet a été
ajourné à la fin de ce mois de septembre. Dans cette affaire, on lui
reproche d’avoir publié sur son site arabophone Lakome de fausses informations
relatives à une rixe tribale ayant fait des victimes dans un quartier de Fès.
Ali Anouzla qui, après vérification, a aussitôt retiré l’article incriminé,
s’estime « victime d’une campagne de harcèlement et d’acharnement judiciaire ».
Plus grave encore, le voici maintenant entre
les mains de la brigade de la police judiciaire de Casablanca, chargée des
affaires de terrorisme, après son arrestation sur ordre du parquet général à
Rabat. Le communiqué du procureur général du roi près la Cour d’appel
de Rabat ne laisse aucun doute sur la gravité de l’accusation portée à l’encontre
d’Ali Anouzla. Aux yeux du parquet, il est coupable d’avoir publié une vidéo
d’AQMI qui « comprend un appel clair et une incitation directe à commettre des
actes terroristes dans la Royaume » et de ce fait il tombe sous la loi 03-03
dite antiterroriste, promulguée en 2003 après les attentats terroristes de
Casablanca. Ses avocats qui n’étaient pas autorisés à le voir avant le 20
septembre s’inquiètent de le voir déjà condamné avant même son éventuel procès.
Cette arrestation a soulevé une vague de protestation. Des rassemblements ont
été organisés pour soutenir Ali Anouzla. Les ONG nationales et internationales
des droits de l’Homme ont publié des communiqués protestant contre cette
arrestation et demandant la libération immédiate du
journaliste.
L’ASDHOM se
joint à cet élan de solidarité et à ce mouvement de protestation et réclame la
relaxe d’Ali Anouzla et l’arrêt de toutes les poursuites à son encontre. Elle
réitère sa demande d’abrogation de la loi antiterroriste qui ne cesse de faire
des victimes et qui bafoue tous les droits et les règles élémentaires de la
défense.
L’ASDHOM
rappelle qu’elle mène depuis novembre 2012 une campagne internationale de
parrainage de prisonniers politiques incarcérés dans les geôles marocaines. Ali
Anouzla figure dans nos listes depuis juin dernier avec l’affaire de Fès car
nous considérons que les autorités marocaines veulent plutôt lui faire payer sa
liberté d’opinion et le ton de ses articles critiques vis-à-vis d’elles. Ces
listes ne comportent malheureusement pas que lui. Ils sont au nombre de 213,
après la mise à jour faite la semaine dernière à l’occasion de la fête de
l’Humanité (13-14-15 septembre 2013), répartis sur onze groupes. Nous continuons
d’appeler à les parrainer et nous ne manquerons aucune occasion de le faire car,
à nos yeux, c’est l’un des moyens concrets et efficaces pour les soutenir et
maintenir la pression sur les autorités marocaines en vue de leur
libération.
Cette campagne, parrainée par
Gilles Perrault, a démarré avec 172
cas recensés le 17 novembre 2012. Certains (50) ont pu recouvrer leur liberté
après avoir purgé leur peine, d’autres, plus nombreux (90 environ), sont soit
arrêtés et emprisonnés, soit poursuivis en état de liberté. Ce point traitera,
après celui d’Ali Anouzla, quelques groupes dont l’ASDHOM a reçu des éléments
d’information.
Groupe
UNEM-Meknès : Ce groupe, composé de sept militants de l’Union Nationale des Etudiants du
Maroc (UNEM) dont cinq sont
incarcérés depuis décembre 2012 à la prison Toulal 2 de Meknès, va être enfin
traduit devant un tribunal le 23 septembre 2013. Les cinq prisonniers
politiques Hassan Ahmouch, Soufiane Sghéri, Mohamed Eloualki, Hassan Koukou et
Mounir Aït Khafou avaient entamé une grève de la faim à partir du 11 mars pour
réclamer l’amélioration de leurs conditions carcérales et la tenue de leur
procès dans les meilleurs délais. L’Administration avait répondu favorablement
en partie à leurs doléances ce qui les a poussés à suspendre momentanément après
105 jours leur grève de la faim en juillet dernier. Mais en ce début du mois de
septembre, l’administration est revenue sur tous leurs acquis (visite, soins,
étude, hygiène, etc.), c’est alors que trois d’entre eux (Hassan Ahmouch, Soufiane Sghéri et Mohamed Eloualki)
ont décidé de reprendre leur grève de la faim à compter du 4 septembre
2013.
Groupe
UNEM-Fès : Une vague d’arrestation (déjà
signalée au point n°24) avait été
opérée au sein des militant-e-s de l’UNEM après un mouvement de protestation au
campus Dhar El-Mahraz à Fès à partir du 15 avril 2013. Vingt-deux militant-e-s dont deux femmes ont été
arrêté-e-s. Certains ont déjà été jugés à quelques mois de prison
ferme, d’autres, dix au total, attendent toujours d’être fixés sur leur sort. Il
s’agit de Oussama Zantar, Rida Derkaoui,
Moussa Sammouni, Salah Eddine Chafik, Mimoun Ben Ziza, Mohamed Ghalout, Mohamed
Boujnah, Jaber Rouijel, Omar Taybi et Abdennabi Chaoul. Pour réclamer
de meilleurs conditions (visites, soins médicaux, nourriture, études, etc.) et
sinon leur libération, du moins la tenue rapide sans aucun report de leur procès
qu’ils veulent ouvert à leurs familles et leurs camarades étudiants, ils entament une grève de la faim de 25 jours à partir
du 17 septembre 2013. Dans un communiqué publié à l’occasion, ils
menacent de continuer ce mouvement sous d’autres formes au-delà des 25 jours si
les autorités marocaines ne répondent pas favorablement à leurs
revendications.
Groupe Liberté
d’expression, liberté de la presse, avocats (nouveau) : Comme
nous l’avons annoncé au point n°
32, aujourd’hui, 20 septembre, s’ouvre à Casablanca le procès de l’avocat Me Mohamed El-Massaoudi.
Ce dernier est membre de la section AMDH de Casablanca. Il est surtout connu
pour avoir toujours défendu les prisonniers politiques. La justice lui reproche
« le manque de respect dû aux magistrats et perturbation du déroulement de
l’audience » lorsqu’il s’est mis, par manque de place, près du procureur du roi
lors d’un procès tenu en 2011 pour défendre un groupe de prisonniers politiques
sahraouis. La section de l’AMDH à Casablanca a appelé à un rassemblement devant
le tribunal pour lui apporter son soutien.
Groupe
20-Février : Nabil El-Yasmini, jeune militant du mouvement
20-Février à Kenitra, avait été arrêté et relâché la nuit de la
manifestation organisée le vendredi 2 août 2013 à Rabat, contre la grâce royale
accordée au pédophile récidiviste, l’espagnol Daniel Galvan. Grâce retirée
depuis, après la pression de la rue. Nabil El-Yasmini continue d’être inquiété
par rapport à sa participation à cette vague de protestation. Il a reçu lundi 16
septembre une convocation de la police judiciaire de Rabat qui entend
approfondir son enquête dans le cadre de cette
affaire.
Mohamed
Adli, un autre jeune du même mouvement et ancien prisonnier
politique, a, quant à lui, été mis en prison à Ain Kadous de Fès sous
le numéro d’écrou 84871 après avoir été enlevé de son lieu de travail pendant
les vacances (voir point n° 32). Il attend toujours son
procès.
Groupe
Sahraouis : L’étudiant sahraoui Ali Abdedayem, 24 ans, arrêté le 4
septembre 2013 à Guelmim et transféré à la prison locale Salé 1 en attendant son
procès, entame une grève de la faim à partir
du 13 septembre 2013. Il proteste contre ses conditions de détention
déplorables et demande à rejoindre la cellule où se trouvent ses camarades
étudiants.
Quinze autres
prisonniers politiques sahraouis, incarcérés à la prison locale d’Aït Melloul,
ont entamé le 9 septembre une grève de la faim de 48
heures pour se solidariser avec un
codétenu politique, Issa Bouda,
qui mène une grève ouverte de la faim depuis
le 27 août 2013. Celui-ci dénonce les tortures qu’il a subies et son
transfert forcé de la cellule où il était avec son camarade Cheik Amaïdan.
L’état de santé d’Issa Bouda s’est sérieusement détérioré et sa famille demande
l’intervention urgente de l’administration pénitentiaire pour éviter tout drame
dont elle serait la seule responsable.
Pour ne pas allonger encore plus
ce point hebdomadaire, déjà chargé, nous reviendrons dans les prochains sur plusieurs arrestations et procès dont étaient victimes des citoyens sahraouis
depuis avril 2013 en lien avec les manifestations relatives à la résolution du
Conseil de sécurité de l’ONU qui a prolongé le mandat de la MINURSO sans
l’étendre à l’observation des droits de l’Homme dans la
région.
Une seule chose sur laquelle nous
insistons pour finir ce point : Mobilisons-nous encore plus pour pouvoir parrainer
toutes celles et tous ceux qui sont sur les listes du parrainage.
Nous avons du pain sur la planche et les événements récents ne nous rassurent
pas. Alors faisons de cet acte de parrainage un devoir moral auquel nul
démocrate ne doit se dérober comme l’a souligné Gilles
Perrault au lancement de cette campagne
internationale.
Vous trouverez tout ce qu’il faut
pour accomplir cet acte valeureux sur le site
de l’ASDHOM (rubrique Campagne de
parrainage).
Le bureau exécutif de
l’ASDHOM
Paris, le vendredi 20 septembre
2013
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