Par F. Delorca, Atlasalternatif, 17 /9/ 2013
Après le vote défavorable à l'ingérence militaire de la chambre des
communes, et le retrait du Royaume-Uni de la coalition belliciste, le
président étasunien Barack Obama a décidé de consulter le
Congrès avant toute intervention en Syrie (une première dans
l'histoire du pays depuis quinze ans), laissant François Hollande et
Laurent Fabius seuls dans leur entêtement à faire la guerre au
gouvernement syrien en représailles à l'utilisation d'armes chimiques
aux vergers de la Ghouta près de Damas.
Alors que, malgré les imprécations du secrétaire d'Etat John Kerry,
le soutien du Congrès était loin d'être acquis, une initiative du
président russe Vladimir Poutine au lendemain du G8 tendant
au transfert des armes chimiques de la Syrie en Russie (sans exiger
le démantèlement des armes chimiques et nucléaires israéliennes
auxquelles l'arsenal syrien était censé faire
contrepoids) a profondément modifié la donne, et l'accord à Genève
entre John Kerry et son homologue russe Sergueï Lavrov sur les modalités
de la destruction des
armes et la reprise du processus politique a
semblé consacrer une nouvelle orientation des grandes puissances sur
le dossier syrien. Toutefois les Etats-Unis continuent de soutenir les
rebelles, et la France le jour même de l'annonce du
président Poutine a tenu à introduire au conseil de sécurité de
l'ONU une résolution plaçant le transfert des armes chimiques syriennes
dans le cadre d'une condamnation explicite du régime de
Bachar El-Assad et sous le menace persistante d'une action militaire
dans le cadre du chapitre VII de la charte des Nations-Unies. Elle
comptait notamment sur les résultats de l'inspection de
l'ONU pour appuyer une condamnation du gouvernement légal.
Selon Le Monde du 16 septembre, trois arguments dans le rapport des
inspecteurs (qui n'avaient pas pour mission de désigner des coupables)
plaident dans le sens de la thèse de la France : la
quantité de gaz sarin utilisée, l'utilisation de missiles sol-sol et
le fait que le tir provenait de la zone sud-est contrôlée parles forces
gouvernementales.
En face les adversaires
de la guerre estiment que le massacre de la Ghouta peut
avoir résulté d'une opération sous faux drapeau et rappellent que
d'importants massacres de civils ont été commis parles rebelles en août
et début septembre à Lattaquié et Maksar al Hessan près
de Homs. Ils font valoir les
images de tirs de missiles suspects depuis la zone rebelle de Douma
détectés par un
satellite russe et remis à l'ONU,l'article du journaliste jordanien
Yahya Ababneh citant trois rebelles de la Ghouta qui parlent d'erreurs
de manipulation de produits non identifiés, article
relayé par la journaliste d'Associated Press Dale Gavlak pour
l'agence américaine Mint Press, les
innombrables
menaces d'attaques chimiques lancées via Youtube par des groupes
djihadistes parmi lesquels la Brigade de l'Odeur destructrice (Katibat
Rih al Sarsar), les vidéos publiées par des groupes rebelles sur Youtube montrant leurs stocks de produits chimiques fabriqués par Tekkim, une
usine turque basée à Gaziantep, les produits chimiques saisis par la police turque le 28 mai 2013 à Adana
chez le terroriste syrien Haytham Qassap dans une safe house appartenant aux groupes djihadistes Al Nosra et Ahrar al Cham, le précédent du massacre chimique de Khan al Assal près d'Alep documenté par la journaliste russe Anastasia Popova,
les vidéos dans lesquelles des rebelles évoquent leur utilisation de « gaz de combat », les aveux de Nadim Baloush, commandant d'un bataillon du Front al Nosra, la puissance de feu et la coordination opérationnelle sans cesse plus performantes de la rébellion syrienne grâce à l'aide
militaire saoudienne, les
doutes sur les images de l'attaque chimique diffusées par les médias
de la rébellion émis par Stephen Johnson, expert en armes chimique de
l'Institut de médecine légale de
Cranfield. Domenico Quirico et Pierre Piccinin, otages des forces rebelles auxquelles ils étaient pourtant favorables,
affirment avoir été témoins
le 30 août dans la caserne de Bab-Alaouad tenue par l'Armée syrienne
libre et le mouvement Al Farouk d'une conversation disculpant le régime
syrien dans cette affaire. En outre selon
des écoutes de l'armée allemande révélées par "Bild
am Sonntag" du dimanche 8 septembre, Bachar al-Assad n'a
vraisemblablement pas approuvé personnellement l'attaque chimique du 21
août. De hauts gradés de l'armée syrienne "réclament
régulièrement depuis environ quatre mois des attaques chimiques au
palais présidentiel à Damas (mais) ces demandes ont été toujours
refusées, et l'attaque du 21 août n'a vraisemblablement pas été
approuvée personnellement par Bachar al-Assad".
Sur le terrain, les forces gouvernementales semblent continuer de
progresser. Elle aurait notamment repris la majeure partie du village
chrétien de Maaloua où les djihadistes (nombreux parmi les rebelles) avaient persécuté la population civile à la fin du mois
d'août.
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