23 /1/2013
Cela fait maintenant plus d’une
année que le gouvernement Benkirane a été nommé. Une période durant laquelle on
a eu droit à un florilège de déclarations et de décisions politiques dont
l’aspect va du plus utile au plus extravagant. Cependant, de temps à autre on a
droit à des épisodes qui nous laissent pantois vis-à-vis de la scène politique
marocaine et ses dédales de gouvernance. Après l’interdiction d’un speech du
chef du gouvernement à Tanger et le tabassage du parlementaire du PJD par les
forces de l’ordre, vint le tour à l’interdiction des caravanes de solidarité
avec les régions enclavées du Maroc.
Les
trois faits cités émanent tous des prérogatives ministère de l’intérieur.
Ministère régalien des plus importants pour l’État et dont les clés échappent
encore à Benkirane. Si l’interdiction de Benkirane l’humilie une énième fois et
la bastonnade du député touche à sa dignité en tant que citoyen avant d’être un
représentant du peuple, l’interdiction d’une caravane de solidarité ne peut en
aucun cas faire l’objet d’une justification. C’est unanimement un crime des
plus condamnables.
Nombre
de citoyens, d’associations et de bienfaiteurs se sont déplacés dans maintes
régions désenclavées du Maroc, où le froid et la mort ne font que rôder. Les
décès des citoyens et leur précarité ont mobilisé maintes personnes qui ont
amené des denrées, des couvertures et autres habits en guise d’aide à ces
contrées. L’État marocain a royalement failli encore une fois à garantir des conditions
respectables à ces parcelles de territoire. Peut-être parce qu’elles font
encore partie de ce qu’on appelle « Le Maroc non utile ». Bref,
l’unique intervention du gouvernement consistait à roder des communiqués
officiels pour « démentir » les cas des décès des nourrissons ayant
succombé à cette vague de froid.
Les
caravanes continuaient d’affluer vers Anefgou et autres régions, certaines avec
spontanéité et bénévolat, d’autres pour pratiquer le
« safari-photo-associatif ». Peu importe, dans les deux cas les
citoyens désenclavés recevaient de l’aide, ce qui est le plus important. Mais
le ministère de l’intérieur ne pouvait guère accepter cela pour longtemps.
Selon sa pensée caduque et autoritaire, toute œuvre caritative doit être cadrée
dans une campagne officielle. Durant celle-ci on bombera torses et poitrines
avec un badge jaune flamboyant pour montrer sa soi-disant solidarité. On veut
consacrer le monopole du caritatif, en faire un phénomène saisonnier et bien
régulé de façon à ce qu’il soit toujours chapeauté par le premier bienfaiteur
du pays. Ignoble.
Le
ministère de l’intérieur déclare que ces caravanes sont sournoisement utilisées
par certains groupes islamistes pour « galvaniser » et endoctriner les
foules. Trouvaille du siècle. On ne peut nier que certains groupes islamistes,
au Maroc ou ailleurs, usent du social pour gagner des adeptes. Mais serait-ce
une raison suffisante pour interdire toute caravane de la sorte ?
Devrait-on laisser les gens mourir de faim et de froid au risque qu’ils aient
des affinités avec certains groupes ? Demandons-nous, où est cet État ?
Le ministère de l’intérieur, qui a à sa disposition des montants exorbitants
encaissés dans ses « caisses noires » et qui servent à financer ses
sbires entre autres usages, ne peut-il user de cet argent pour désenclaver ces
régions ?* Non, on préfère la force, la répression et l’interdiction. C’est
ce que les « sujets » méritent, nous disent-ils.
Au-delà
des déclarations tordues de Benkirane, au-delà de la fameuse
« interprétation démocratique » de la nouvelle constitution qui nous
emmerde les tympans, au-delà de toute cette mascarade et hérésie politique, ces
interdictions de caravanes répugnent et nous poussent à crier : marre, on
en a marre.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire