Sahara occidental : le difficile "équilibrisme" d’Obama
Entre solution "mutuellement acceptable" et "soutien au projet d’autonomie"
Le roi du Maroc, Mohamed VI a été reçu, vendredi dernier, par le
président américain, Barack Obama à la Maison Blanche. Il s’agit de la
première visite du roi à la Maison Blanche depuis 2004, quand il avait
été reçu par le prédécesseur de M. Obama, George W. Bush. Il a été
surtout question lors de cette rencontre entre les deux dirigeants de la
question du Sahara occidental.
A l’issue de la rencontre entre le Président américain et le roi du
Maroc Mohamed VI, la Maison-Blanche a publié un communiqué conjoint qui a
consacré un chapitre spécial à la question du Sahara occidental et les
droits de l’Homme du peuple sahraoui. En avril dernier, les Etats-Unis
avaient un temps proposé que le mandat de la mission des Nations unies
dans la région, la Minurso, soit élargi aux droits de l’homme.
Mais ce projet avait été vivement contesté par Rabat, qui avait décidé
de reporter sine die un important exercice militaire bilatéral.
Finalement, un compromis a été trouvé entre les Etats-Unis et le
Maroc.Washington abandonnant l’idée de l’inclure formellement dans le
mandat de l’ONU. Comme tous les ans, les membres du Conseil de sécurité
doivent renouveler avant fin avril le mandat de la Mission des Nations
unies au Sahara occidental (Minurso).
Les Etats-Unis avaient d’abord présenté un projet de résolution qui
chargeait la Minurso d’enquêter sur les droits de l’homme au Sahara
occidental sous occupation marocaine. Le texte que les Etats-Unis ont
mis au point, et qui devrait être voté, mentionne la nécessité
d’encourager au respect des droits de l’homme mais sans l’inclure dans
le mandat. « Les droits de l’homme seront davantage mentionnés dans le
texte que l’an dernier et le texte encourage des efforts et des progrès
dans ce domaine », a indiqué un diplomate au courant des négociations.
« C’est une manière d’avertir les Marocains que la communauté
internationale surveille davantage la situation au Sahara occidental », a
souligné un autre diplomate. L’an dernier le Conseil avait prolongé le
mandat de la Minurso tout en demandant au Maroc « d’améliorer la
situation ». La situation ne s’est guère améliorée, mais elle continue
de se dégrader pour les Sahraouis.
La visite du souverain alaouite est intervenue alors que la question du
Sahara a provoqué des frictions cette année entre Washington et Rabat et
que des organisations de défense des droits de l’homme ont exhorté
Barack Obama à presser le monarque chérifien au respect des droits de
l’homme au Sahara occidental. En recevant le roi du Maroc, le Président
américain ne s’est pas départi de «l’équilibrisme» poursuivi par la
politique américaine sur la question du Sahara occidental.
Celui-ci a rappelé son soutien au plan d’autonomie marocain pour le
Sahara, le qualifiant de "sérieux, réaliste et digne de foi". Ce plan
"représente une approche potentielle qui peut satisfaire les aspirations
des habitants du Sahara occidental pour diriger leurs propres affaires
dans la paix et la dignité", selon la même source. Dans le même temps, il s’est engagé à poursuivre les efforts pour trouver une solution «
pacifique, durable et mutuellement acceptable » sur la question du
Sahara occidental et aussi à protéger les droits de l’Homme du peuple
sahraoui dont les violations ont été dénoncées, à maintes reprises, par
le département d’Etat, le Congrès et les ONG internationales. Le
communiqué de la Présidence américaine met clairement en avant que le
dossier du Sahara occidental doive être traité dans le cadre des
Nations-unies, et ce, avec le plein appui des Etats-Unis aux
négociations conduites par l’ONU et aux initiatives de l’envoyé
personnel du SG de l’ONU.
Durant sa rencontre avec le roi marocain, le chef de la Maison-Blanche a
également tenu à soulever la question de la violation des droits de
l’Homme du peuple sahraoui par le Maroc et pour laquelle des membres du
Congrès américain, les ONG internationales et la presse américaine l’ont
intensément appelé à la traiter en priorité.
Dans cette optique, la Maison-Blanche a fait savoir que le président
Obama et le roi du Maroc ont affirmé leur engagement commun à
l’amélioration des conditions de vie du peuple du Sahara occidental et
ont convenu à travailler ensemble pour continuer ’’à protéger et à
promouvoir’’ les droits de l’Homme dans le territoire sahraoui.
L’organisation Human Rights Watch avait demandé à M. Obama de plaider
auprès de son invité en faveur des droits de l’homme. « Des dizaines,
peut-être des centaines, de personnes - des islamistes, des jeunes
manifestants dans les rues et des militants du Sahara occidental -
demeurent en prison après des procès inéquitables, et la police a
recours à un usage excessif de la force pour disperser les
manifestations et à la violence pour extorquer des aveux », a accusé HRW
dans un communiqué.
En réaction à l’ensemble des engagements du présiden américain, le Front
Polisario s’est félicité, tout d’abord, de la position du président
Obama pour assurer la protection des droits humains du peuple sahraoui.
Mais pour le représentant du Front Polisario à Washington, Mohamed
Yeslem Beisat, des mesures et des mécanismes pratiques de surveillance
des droits de l’Homme doivent, en conséquence, être instaurés pour la
mise en œuvre de cet engagement des Etats-Unis.
Commentant, par ailleurs, la position américaine sur le conflit du
Sahara occidental telle qu’énoncée dans le communiqué, M. Beisat a tenu à
observer que le président Obama juge, également, que le plan
d’autonomie proposé par le Maroc comme une ’’approche potentielle’’ qui
figure, d’ailleurs, parmi les autres approches incluses dans les
résolutions de l’ONU depuis juillet 2003. Dans ce sens, M. Beisat
rappelle que le référendum d’autodétermination du Sahara occidental,
promis depuis plusieurs années, prévoit trois options qui sont, en
l’occurrence, l’indépendance du Sahara occidental, l’intégration au
Maroc ou l’autonomie.
Néanmoins, a-t-il déclaré à l’APS, c’est au peuple sahraoui de se
prononcer sur l’une de ces trois options " dans le cadre de l’exercice
de son droit inaliénable à l’autodétermination". Par ailleurs, le
représentant sahraoui s’est aussi félicité que le président Obama ait
abordé, lors de son entretien avec le roi Mohamed VI, la question des
procès de civils qui sont traduits devant les tribunaux militaires
marocains et pour laquelle le communiqué conjoint note que le roi du
Maroc "s’est engagé à mettre fin à cette pratique".
A ce sujet, M. Beisat a souhaité que cet engagement du roi Mohamed VI
soit appliqué avec effet rétroactif et que les Sahraouis civils
condamnés par les tribunaux militaires marocains soient mis en liberté,
en citant les cas des 24 prisonniers de l’affaire Gdeim Izik lourdement
condamnés par le tribunal militaire de Rabat en février dernier, et de
Mohamed Elhafed Iazza et de Mbarek Daoudi. Début 2013, une cour
militaire marocaine a condamné de lourdes peines, 25 Sahraouis pour
avoir manifesté pacifiquement pour l’autodéterminaion à Gdim Izik près
de Laâyoune au Sahara occidental.
Par : S. B. / Agence,Le Mid Libre, 25 Novembre 2013
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