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"A l'occasion de la publication de son Etat des lieux 2012, La Cimade lance un appel pour une politique d'hospitalité"
Urgence pour une politique d’hospitalité
Depuis
près de 40 ans, le dogme de la fermeture des frontières structure les
politiques publiques en matière d’immigration. L’Europe s’est cadenassée
face aux migrants, tout en délégitimant toute alternative fondée sur la
solidarité et les droits, jugée coupable d'irréalisme et de naïveté.
Pour nous, l'état des lieux
est sans appel : incapable de répondre aux objectifs qu'elle s'est
donnée, cette politique inefficace provoque de surcroit des dégâts
humains considérables et met en péril nos libertés.
En plaçant les migrants et leurs
familles dans un dédale administratif et des conditions de plus en plus
inatteignables pour l’obtention d’un titre de séjour stable, ce sont des
dizaines de milliers de sans droits que la législation a créés, pour le
plus grand profit de secteurs entiers de l'économie française qui
peuvent ainsi utiliser une main d’œuvre docile et bon marché. Peu à peu,
en matière de santé, de protection sociale, de logement ou de
formation, l'exclusion est devenue la règle, le droit l'exception.
Et pour ceux qui espéraient encore
des conditions de vie différentes de celles qu’ils avaient fuies de leur
pays d'origine, les objectifs chiffrés d’expulsion ont signifié un
message clair : vivez cachés ou l'expulsion vous attend.
Les étrangers auront ainsi,
depuis près de 40 ans, subi le sort souhaité à tous par les tenants du
dogme libéral : déconstruire les droits pour en revenir au « tous contre
tous », baser les rapports humains sur la valeur marchande et la
prédation, en finir avec les principes de solidarité, d'égalité, de
justice. Construire une société de « sans droits ».
Dans le même temps, le poison des
vieux démons xénophobes et racistes n’en finit pas de prospérer sur le
terreau de la désespérance sociale. La haine de l’étranger ou de l’autre
continue plus que jamais à scander le rythme des discours politiques,
détournant le regard des citoyens des enjeux autrement plus graves de
sous-emploi, d’inégalités sociales et d’injustice fiscale. Dans ce
contexte, l’intégration des immigrés est devenue une injonction
généralisée, visant à discriminer les étrangers en s’appuyant sur
l’argument de « l’assimilation » à de supposées « valeurs communes »,
qui ne sont que le masque d’un nationalisme d’exclusion.
Nous
affirmons que notre conception du « vivre ensemble » n’est pas
construite sur ces valeurs et qu'elle en est même aux antipodes. À la
désespérance et la haine, nous opposons l'urgence d’un nouveau pacte
citoyen qui nous rassemble en termes de droits comme d’obligations, quel
que soit l’endroit où nous sommes nés.
C'est à la réalisation
d'une politique d'hospitalité que nous appelons, en France comme en
Europe. S’appuyant sur l’égalité des droits, la solidarité et
l’ouverture au monde, cette politique doit promouvoir une véritable
citoyenneté de résidence, afin d’en finir avec les discriminations
légales et d’inventer un droit à la mobilité qui place, au même rang,
l'intérêt des migrants et l’impératif des États de garantir la paix et
la sécurité.
Réalisable, s’appuyant sur des
propositions concrètes, cette politique d’hospitalité posera en acte une
vision ouverte de l'avenir, considérant les migrants, à l'égal de
nous-mêmes, comme des êtres au parcours intelligible, acteurs du monde
et parties prenantes de la solution aux défis de notre temps.
Déjà 17828 signatures
Premiers signataires :
Michel Agier, ethnologue et anthropologue - Étienne Balibar, philosophe - Pascal Blanchard, historien - Claude Calame, anthropologue et historien - Pierre Encrevé, linguiste - Didier Fassin, anthropologue et président du Comede - Nancy Green, historienne - Rose-Marie Lagrave, sociologue - Olivier Mongin, essayiste, directeur de la revue Esprit - Gérard Noiriel, historien - Patrick Peugeot, président de La Cimade - Jacques Rancière, philosophe - Michel Wierviorka, sociologue, historien - Pierre Zaoui, philosophe - Didier Sicard, professeur de médecine.
La Cimade
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