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samedi 30 mars 2013

Intervention de Sihem Abbas et Abdel El Haji de l'AMDH Belgique

 

Prisonniers européens au Maroc
Mes Dames, Messieurs les parlementaires
Mes dames Messieurs les journalistes
Mes Dames, Messieurs,

Nous tenons, au nom de la section de l’Association marocaine des Droits Humains de Belgique, à nous associer aux différents organisateurs, ainsi que tous les défenseurs des doits humains à vous remercier pour votre présence et à l’intérêt que vous portez aux causes des droits humains et que vous apporteriez certainement à celles des prisonniers politiques en général et particulièrement à ceux qui sont issus de notre Belgique. C’est un instant privilégié de partage, de dialogue et de connivence autour d’un sujet universel qui occupe une place centrale au sein d’une humanité qui a hissé sa conscience en ce jour du 10 décembre 1948, pour tracer le rêve d’exister et de prospérer en paix.
Je veux parler de la « Déclaration universelle des droits de l’homme ». Ce fut juste après la seconde guerre mondiale et ses horreurs. Dès le préambule de cette Déclaration, on parle de « tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables ». Et on souligne avec une immense préoccupation : « que la méconnaissance et le mépris des droits de l’homme ont conduit à des actes de barbarie qui révoltent la conscience de l’humanité et que l’avènement d’un monde où les êtres humains seront libres de parler et de croire, libérés de la terreur et de la misère, a été proclamé comme la plus haute aspiration de l’homme ».
A l’aube des révolutions qui se passent sous nos yeux, du Maghreb à l’Orient, de nombreuses voix se sont levées pour réclamer plus de démocratie, plus de dignité et revendiquer une vie meilleure et digne. Au lieu de les accueillir avec tous le respect qui se doit, cependant, de nombreux régimes en place ont réprimé, emprisonné et torturer tous ceux qui ont osé tenir tête à leur tyrannie. Les gouvernements en place ont raté un rendez-vous avec l’histoire pour mettre un terme à l’heure système totalitaire et réformer comme le demande leurs peuples, leurs systèmes de gouvernance archaïques.
Le Maroc malheureusement n’a pas échappé à cette démarche. Depuis le début du soulèvement et des contestations pacifiques et civilisées pour le moment, du peuple marocain sous l’égide du Mvt20Fev, le régime en place a essayé de mener une réforme qui se veut révolutionnaire par les dires des gouvernements et leurs médias pour fausser l’image qu’il essaye de refléter au monde entier.
Tous les rapports des ONG et Organisation nationales et internationales s’accordent,indéniablement, qu’il y a un recul des droits de l’Homme au Maroc durant ces dix dernières années.
En dépit de l’Instance Equité et Réconciliation et de ses recommandations, restées d’ailleurs inappliquées, une chape de plomb savamment orchestrée empêche l’instauration d’un véritable Etat de Droit au Maroc. Nombre de litiges, à ce sujet, voient le jour sans discontinuer. Le point culminant de ces violations, les plus récentes, on l’a vu, entre autres, dans la descente punitive sur Taza ! Cette incursion répressive ressemble goutte pour goutte à l’offensive des forces de police sur plusieurs villes et particulièrement la ville d’Ifni en juin 2008 : tabassage ; torture; arrestations ; portes des maisons défoncées ; biens mobiliers saccagés ; attouchements et langage ordurier envers les femmes. A Taza, même le Hammam et l’intimité des femmes n’ont pas été épargnés par les Forces de la Sécurité!


Les arrestations arbitraires sont le lot quotidien au sein des étudiants et le Mouvement du 20 février. Les autorités se refusent à venir en aide à personne en danger, lorsqu’il s’agit de ces jeunes en prison pour délit d’opinion, en grève de la faim, menaçant leur vie. 
 
La torture au Maroc ne s’arrête pas. Une liste de témoignages reste à disposition au bureau central de notre Association. Aux martyrs tombés sous des coups meurtriers, durant l’année des protestations du Mouvement du 20 février, s’ajoute le décès sous la torture d’un homme El Asri Cherkaoui âgé de 26 ans, au cours d’une garde-à-vue à Témara, le 6 février 2012, Les 5 jeunes trouvés calcinés à El Houceima en 2012, l’immolation de plusieurs citoyens et le décès récemment de plusieurs jeunes étudiants dont le dernier à l’Université de Fès suite à l’intervention des forces de répression…
Le moins que l’on puisse dire, c’est que ces agissements condamnables et condamnés, relèvent des caractéristiques d’un Etat-de-Non-Droit, et que le dossier des violations des Droits Humains au Maroc, n’a jamais été clos. L’impunité sur tous les plans règne inlassablement et de manière scandaleuse. Les tortionnaires et les assassins durant les années de plomb, occupent encore les hauts rangs de l’Etat. Et le système perdure sur les ruines de graves contentieux des violations des droits de l’Homme.

  Quant aux Marocains Résidents à l’Etranger, ils ne voient ni leurs droits ni leurs rapports s’améliorer avec les autorités consulaires et l’Etat de leur pays d’origine. Marginalisés de la participation à la politique de leur pays, les MRE ne sont traités que comme une vache à traire. Leurs droits à la citoyenneté bafoués, ils s’exposent constamment à la maltraitance aux frontières douanières lors des vacances d’été.

Aujourd’hui l’immigration clandestine des jeunes mineurs marocains suscite l’indignation de la communauté des MRE et l’ensemble des Organisations des droits de l’Homme. De nombreux jeunes de ces clandestins décèdent dans des conditions lamentables au large des frontières maroco-européennes, alors que les autorités marocaines semblent indifférentes à ce drame qui relève du droit à la vie digne et à la justice sociale.

Nous exhortons les institutions européennes, vous les représentants de la population et le gouvernement belge de faire pression sur l’Etat marocain pour respecter ses engagements, et les chartes universelles des Droits de l’Homme. Ses violations empêchent résolument le Maroc de faire partie des pays prospères et moderne.

Le dossier de la détention politique : Cette année a connu la libération de quelques détenus politiques et détenus d’opinion parmi lesquels l’activiste des droits humains Seddik Kabbouri et ses compagnons et des membres de la Salafiyya dans le cadre de la libération d’un groupe de détenus d’opinions graciés après l’investiture du Gouvernement actuel. Cette libération est le résultat du fait que les détenus ont tenu bon et ont mené des luttes au sein de la prison et aussi grâce au soutien national et international de nombreuses instances démocratiques au sein du pays et à l’étranger.

Cependant, plusieurs détenus politiques belges n’ont toujours pas été libérés et demeurent ainsi ignorés par notre gouvernement au point qu’ils n’ont jamais fait l’objet d’aucunes interventions ou interpellation lors des nombreuses visites de nos ministres au Maroc. Les cas d’Ali AARRASS, Abdelkader BELLIEREJ, Abdellatif BEKHTI, Hicham BOUHALI, Mohamed R’HA, Ahmed ZEMOURI, Mohamed YOUKHRI, AMELOUT et les autres, qui sont des détenus belges qui ont été kidnappés, extradés et torturés aux Maroc nous préoccupent plus que jamais.

 
Ces prisonniers ont été condamnés au Maroc voici bientôt plus de cinq ans, pour des faits qu’ils ne cessent de nier. Ils ont été extradés ou enlevés, de telles pratiques extrajudiciaires, condamnées par toutes les chartes internationales des Droits de l’Homme, les soumettant aux affres de la torture pour leur extorquer des aveux.
Ces flagrantes violations des droits humains ont été insidieusement « légitimées » par « la loi anti-terroriste » qui a ouvert toutes grandes les portes à des arrestations massives et à des règlements de compte avec l’opposition et la contestation. C’est ainsi que la fabrication de ce que les autorités judiciaires et les médias du Maroc ont qualifié de «différents réseaux», n’a été qu’une parodie de justice.
Selon les observateurs et l’AMDH qui ont suivi les différents procès de ces prisonniers, « l’absence de toutes les garanties et conditions d’un procès équitable », était bel et bien criante.
Un journaliste marocain Khalil Hachimi Idrissi, ni islamiste ni de gauche, notait dans le journal « Aujourd’hui le Maroc », qu'« il persiste, tout de même, comme un sentiment diffus de scepticisme, voire de doute », et d’ajouter que « Plus personne ne comprend que dalle » dans ces affaires qui sont montées de toute pièce.
Roland Planchar, journaliste dans La Libre Belgique et spécialiste des affaires de terrorisme, note qu’« au Maroc, les griefs sont sévères et précis. Mais plusieurs raisons font douter de la solidité du dossier "Belliraj" ».


Alors que le rapport 2008 de la Sûreté de l’Etat belge conclue clairement que « Les éléments avancés par le Maroc n’ont donc pas permis de démontrer de manière indiscutable l’existence d’un réseau et l’implication de celui-ci dans six meurtres en Belgique », dans le cas du dossier de BELLIRAJ
Ces prisonniers, de nationalité belge, sont donc victimes d’un douteux déni de justice. Tous leurs droits de citoyen ont été gravement bafoués.
Lors de son passage d’inspection au Maroc, l’émissaire de l’ONU, Juan Mendez affirme que « l’usage de la torture est systématique au Maroc pour les cas impliquant des manifestants anti-gouvernementaux et ceux qui sont accusés de terrorisme ». Ce que toutes les chancelleries occidentales et européennes savent pertinemment. Pourtant les autorités politiques belges abandonnent ses nationaux dans les griffes de l’arbitraire, sous prétextes sacrés de liens bilatéraux grandement discutables, dès lors qu’il s’agit des droits humains.
Nous demandons aux autorités politiques belges, et aux consciences vives de notre pays, la Belgique, et à vous représentants du peuple d’empêcher cette effroyable diabolisation qu’endurent ces prisonniers belges, depuis 5 ans, loin de leurs familles et d’exiger leur libération immédiate.
Libérer ces prisonniers belges, c’est opter pour la démocratie et la justice, au moment où les peuples se révoltent au Maghreb et en Orient, à la recherche d’un changement significatif où se conjuguent Etat de Droit et prospérité. C’est également empêcher l’installation de la justice à deux vitesses qui infirme « l’éthique du vivre ensemble » et qui amalgame l’immigré minorisé à toutes les fautes, et le jette en pâture comme bouc émissaire dans la souffrance et l’errance.
 Ali AARRASS, Abdelkader BELLIRAJ, Abdellatif BEKHTI, Hicham BOUHALI, Mohamed R’HA, Ahmed ZEMOURI, Mohamed YOUKHRI, et AMELOUT et les autres, sont avant tout des Êtres Humains lésés de leurs droits et diabolisés à l’extrême !

Association Marocaine des Droits Humains-Belgique.
Merci pour votre attention.
Publié il y a par
http://prisonnierseuropeensaumaroc.blogspot.be/2013/03/intervention-de-sihem-abbas-et-abdel-el.html

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