Driss El Yazami, président du CNDH |
Les détenus subissent des "traitements cruels, inhumains ou dégradants"
dans la plupart des prisons du Maroc surpeuplées. Tel est le triste
constat dressé à l'issue de visites de terrain par le Conseil national
des droits de l’homme (CNDH), dans un rapport intitulé "La crise dans
les prisons, une responsabilité partagée", rendu public à Rabat, mardi
30 octobre.
Souvent dénoncées par les militants des droits de l'homme,
et notamment par l'Observatoire marocain des prisons, ces violations
sont cette fois reconnues par un organisme officiel, présidé par Driss
El Yazami, et dont tous les membres ont été nommés par le roi Mohammed
VI.
Le CNDH, qui déplore "l'absence de contrôles et d'inspections efficaces", le "recours excessif"
à la détention provisoire et la lenteur des procès, ou bien encore les
abus de transfert administratif souvent employé comme mesure
disciplinaire à l'encontre des salafistes, précise que les mauvais
traitements "se manifestent par des coups portés aux moyens de
bâtons et de tuyaux, la suspension sur des portes à l'aide de menottes,
les coups administrés sur la plante des pieds, les gifles, les
pincements à l'aide d'aiguilles, les brûlures, (...) le déshabillage
forcé". Dans ses recommandations, l'organisme en appelle à "l'élaboration d'un plan d'action pour l'éradication de la torture" en partenariat avec "les autorités judiciaires, le Parlement, le gouvernement et la société civile".
"absence totale de tout contact avec le monde extérieur"
La situation des femmes détenues est pire encore : elles "pâtissent davantage, pour des considérations d'ordre socioculturel, de traitements cruels et comportements dégradants [insultes, humiliations], aussi bien dans les postes de police qu'en prison".
Les prisonnières qui accouchent se voient contraintes, à l'expiration du délai qui leur est accordé après la naissance de leur enfant, et en l'absence ou devant le refus de leurs proches de le prendre en charge, "d'abandonner leur progéniture à des tiers qui les exploitent dans certains cas dans la mendicité, ou les placent dans des orphelinats".
Les prisonnières qui accouchent se voient contraintes, à l'expiration du délai qui leur est accordé après la naissance de leur enfant, et en l'absence ou devant le refus de leurs proches de le prendre en charge, "d'abandonner leur progéniture à des tiers qui les exploitent dans certains cas dans la mendicité, ou les placent dans des orphelinats".
Les personnes vulnérables et les étrangers, en particulier les
migrants subsahariens, ne sont pas mieux lotis. Aux mauvais traitements
qu'ils subissent comme les autres, s'ajoute "le manque, voire l'absence totale de tout contact avec le monde extérieur".
La publication du rapport de la CNDH intervient alors que 76
Européens, Français, Belges ou Espagnols - possédant pour nombre d'entre
eux la double nationalité - emprisonnés au Maroc, ont commencé le 22
octobre une grève de la faim pour protester contre les actes de torture
et les procès inéquitables dont ils estiment avoir été victimes, et pour
s’élever face à l’absence d’assistance de leurs gouvernements
respectifs.
L’ACAT-France (Action des chrétiens contre la torture), qui
soutient leur initiative, a annoncé avoir saisi le rapporteur spécial
des Nations unies sur la torture pour deux de ces grévistes, Adil
Lamtalsi, producteur de cinéma, et Moustapha Naïm, animateur social. Ces
deux Franco-marocains, détenus à la prison de Salé, près de Rabat, ont
été condamnés pour des crimes de droit commun. Leurs récits sont
similaires, dénonce l'ACAT dans un communiqué : "plusieurs jours de
sévices au centre de détention secret de Temara, aux mains de la
Direction générale de la surveillance du territoire, des aveux signés
sous la contrainte, des magistrats complices et des plaintes pour
torture restées lettre morte".
Le 11 septembre, le CNDH avait déjà établi un constat critique sur la situation dans les hôpitaux psychiatriques, la qualifiant "d'archaïque et inadaptée".
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