Violences et dénis de droit à l’encontre des migrants.
Communiqué de presse
Communiqué de presse
Alors que le Maroc s’apprête à signer avec l’Union européenne le 7 juin prochain une «déclaration commune sur un partenariat pour la mobilité », qui, on le sait déjà, ne fera que renforcer les inégalités au niveau des frontières entre les heureux élus de la mobilité et les éternels condamnés à rester sur place, les récentes exactions qu’ont subies, une fois encore, un certain nombre de ressortissants d’Afrique subsaharienne résidant au Maroc, font craindre que ce partenariat, illusoire pour la majorité des Marocains, ne se concrétise par une politique de plus en plus xénophobe et discriminatoire vis-à-vis des autres ressortissants africains.
Le Maroc, qui multiplie les voyages d’affaire en Afrique subsaharienne, continue à traiter avec violence et mépris les ressortissants venus de cette région. Tandis que les naufrages se poursuivent dans les eaux de la Méditerranée, aujourd’hui banalisés tant ils ont été nombreux depuis la création de l’espace Schengen, les migrants qui vivent au Maroc continuent à vivre le calvaire.
Au calvaire quotidien de vivre dans la précarité la plus absolue, dans des logements indignes, sans perspective de travail régulier, sans accès aux soins, s’ajoutent :
- Contrôles policiers au faciès
- Confiscation hors de tout cadre légal et non restitution de papiers d’identité, de téléphones, argent et autres objets personnels
- Rafles et descentes de police dans les quartiers ou les forêts où se concentrent des migrants
- Violences policières
- Refoulements massifs à la frontière algérienne
Les témoignages des migrants se suivent et se ressemblent. Ils indiquent que non seulement rien n’a été fait pour améliorer leur situation, mais que, les pratiques policières à leur encontre sont en train de fabriquer des sans-papiers, y compris pour ceux d’entre eux, en situation régulière, qui disposaient de passeports en règle, avant que la police ne les leur confisque. Des femmes, parfois enceintes, ont été arrêtées, laissées sans nourriture et traitées avec autant de mépris et de violence que les autres, sans aucune considération pour leur état. Des mineurs ont connu le même sort.
Ils font état de l’indifférence, voire de la complaisance, de la police lorsque certains d’entre eux ou d’entre elles, victimes d’agressions racistes et/ou sexistes, demandent aide et protection.
Des procès récents ou en cours montrent une tendance nouvelle à tenter de criminaliser l’action des migrants qui défendent leurs droits.
Après les évènements survenus à l’ambassade du Sénégal, ce sont également les pratiques des représentations diplomatiques qui sont dénoncées, peu soucieuses de défendre les droits de leurs ressortissants, elles n’interviennent même pas pour exiger la restitution des passeports confisqués, pourtant propriété de l’Etat qui les délivre. Allant plus loin, l’Ambassade du Sénégal n’a pas hésité à faire appel à l’intervention brutale de la police marocaine dans son enceinte pour déloger une centaine de ressortissants sénégalais venus y expliquer leurs problèmes.
Devant une telle situation, nous, organisations signataires
- Renouvelons notre engagement à tout mettre en œuvre pour que soient respectés les droits des migrants et à dénoncer tout acte de discrimination, violence ou racisme dont ils pourraient être victimes
- Réaffirmons le droit de tout citoyen de la planète à la libre circulation
- Réaffirmons le droit de tout citoyen de la planète à être traité dans la dignité et le respect
- Rejetons tout accord qui, au profit d’un assouplissement des conditions de délivrance des visas pour quelques-uns, serait conditionnée par un durcissement des entraves à la mobilité des autres.
- Dénonçons les violences toutes particulières dont sont victimes les migrants au Maroc, et en particulier :
le recours répété aux rafles massives et expulsions vers la frontière algérienne dont sont régulièrement victimes les migrants au Maroc, quelle que soit leur situation légale et personnelle
le recours de plus en plus systématique à la confiscation illégale des passeports et pièces d’identité.
- Appelons l’ensemble des Etats africains, dont le Maroc, à orienter leur politiques de coopération dans le sens d’un rapprochement réel entre les peuples et au service de leur sécurité dans l’ensemble du continent.
Un rassemblement sera organisé devant le Tribunal de Première Instance (avenue Madagascar. Rabat) le vendredi 7 juin à 13h30 afin de marquer la solidarité de la société civile avec les ressortissants sénégalais traduits devant la justice.
ALECMA. AMDH. ATTAC. CCSM. Conseil des migrants. GADEM. JAFEM. ODT-Travailleurs immigrés. REMOFIME.
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Témoignage de Lamine (ressortissant sénégalais)
On est arrivé à l’Ambassade à 9 h, le mardi 28 mai si je me souviens bien, pour demander une audience avec l’Ambassadeur à propos des 16 sénégalais arrêtés le dimanche précédent par la police marocaine et qui ont été refoulés à Oujda et ont vu leurs passeports confisqués. Nous étions quelques 200 à 250 personnes, toutes sénégalaises, indignées par l’absence de réaction de leur Ambassade après ces refoulements.
Arrivés à l’Ambassade, nous n’avons pas été reçus par l’Ambassadeur et nous avons décidé de rester sur place tant qu’il ne nous recevait pas, quel que soit le temps que cela prendrait. Il faut dire que ce n’était pas la première fois que nous allions à l’Ambassade sans obtenir d’audience. Mais un policier marocain est venu et nous a dit que l’ambassadeur demandait que nous sortions. Nous avons refusé « Ici, c’est notre ambassade, nous ne sortons pas ». Dix minutes plus tard, il nous a transmis un papier écrit par l’Ambassadeur indiquant que nous devions sortir de gré ou de force.
Nous avons refusé et annoncé que nous resterions, de gré ou de force. Vers 13h, La police a investi l’ambassade pour nous faire sortir. Devant notre refus de sortir, les policiers, 10 ou 20 au maximum, ont alors commencé à nous bousculer. Malgré le fait que nous étions restés totalement pacifiques, essayant seulement de négocier, de nouveaux renforts sont arrivés 20 minutes plus tard. Et ils ont commencé à charger. C’est en essayant de nous défendre qu’il y a eu quelques dégâts matériels.
Nous avons été frappés et les policiers nous ont poursuivis alors que nous essayions de nous enfuir. Et les arrestations ont commencé. Au total, 21 personnes, toutes sénégalaises ont été arrêtées, dont 4 femmes et 17 garçons.
C’est grâce au fait que j’étais sorti acheter une recharge téléphonique pour appeler la presse sénégalaise que je n’ai pas été arrêté.
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