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Par Association INSAF Casablanca – 14/1/2013
Communiqué informatif au sujet de " la petite bonne" qui s'est jetée
de la terrasse de ses employeurs pour mettre fin a sa vie
Le mercredi 10 janvier 2013 à 11h30, N. N.,"domestique" dans une famille de médecin au Quartier Bourgogne
à Casablanca, s’est jetée de la terrasse de ses employeurs pour mettre
fin, nous dira-t-elle, à sa vie de femme physiquement exploitée et
psychiquement martyrisée. Le jeune du quartier qui a tenté de la
rattraper en bas de l’immeuble est décédé des suites du choc avec le
corps de N. N..
Nous nous inclinons devant son acte spontané de citoyenneté et d’abnégation. Qu’il repose en paix.
Depuis la parution sur le net, mercredi soir, des premières
informations concernant ce drame, nous avons tout essayé pour situer N.
N. afin de lui apporter protection et soutien. Il nous a fallu trois
jours pour la rencontrer dans un hôpital public de Casablanca et nous
entretenir avec son père, près du commissariat du lieu du drame.
C’est dire les difficultés que nous avons, à chaque fois, à accéder à
l’information et la manière inadmissible et condamnable dont la société
civile est traitée pour l’empêcher de « faire son travail ».
Originaire d’un village perdu dans la région de Fès N. N. est ballottée,
en tant que « petite bonne », depuis près de 5 ans, entre plusieurs
grandes villes du centre et du sud du pays. Comme pour les très
nombreuses « petites bonnes » que nous avons « sauvées », son maigre
salaire était perçu, directement, par son père. En 2010, elle a été
victime d’un viol à Marrakech qui a marqué un tournant dramatique dans
sa, déjà triste, vie. Ses parents auraient refusé de la recevoir à leur
domicile et s’arrangent, depuis, à l’envoyer de maison en maison. Blessée et exaspérée, elle a tentée de mettre fin à sa vie en se coupant les veines.
Devant l’indifférence de son entourage et la poursuite de son
exploitation, elle a décidé de recommencer en se jetant de la terrasse
de ses employeurs.
Aujourd’hui, nous essayons avec nos moyens et
ceux des associations partenaires de lui assurer, avec son accord, une
aide psychologique, un accueil en foyer et une prise en charge dans sa
région d’origine. Par-delà l’aspect anecdotique nécessaire pour
informer l’opinion publique et interpeller les institutionnels
concernés/responsables, cette dramatique affaire nous ramène à la
réalité de la problématique des « petites bonnes » et à ses conséquences
inhumaines que nous condamnons et que nous combattons avec force et
détermination. Nous confirmons que l’éradication de cette pratique inhumaine est possible. A Chichaoua, nous avons pu sauver près de 200 filles. A El Kelaâ des Sraghnas, nous en avons sauvé plus de 50.
Les filles retirées du travail domestique sont à l’école. En 2012, deux
des filles ont obtenu le baccalauréat. Dans les zones de notre
intervention, plus personne ne fait commerce de ses enfants. Grâce à
la mobilisation du Collectif associatif pour "l’éradication de
l’exploitation des filles mineures dans le travail domestique",
l’ancien gouvernement a introduit des articles pénalisant l’emploi des
filles mineures dans le travail domestique. Mais, l’affaire de N. N.
nous rappelle l’urgence de promulguer une loi spécifique assortie de
dispositions et de moyens concrets pour garantir le retrait des
"petites bonnes" du lieu de leur exploitation, leur protection, leur
accompagnement médical et psychologique et leur réinsertion sociale et à
l’école. Nous coordonnons les actions à entreprendre avec nos
partenaires dans le cadre du Collectif associatif et en appellerons à
toutes et tous de nous y joindre. Association INSAF Casablanca – Maroc14 janvier 2013
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Maroc : Aucun ministre au chevet de la bonne qui a tenté de se suicider
Par Hanane Jazouani
C’est avant-hier, lundi 14 janvier, que Nassima, la jeune bonne de 19 ans, qui avait tenté de suicider le 9 janvier dernier
est sortie de l’hôpital à Casablanca, nous a fait savoir aujourd’hui
Omar El Kindi, le directeur de l’association Insaf. Nassima souffre d'un
traumatisme cranien, d'une fracture au bras, d'une jambe cassée et de
plusieurs hématomes sur le corps. Dès sa sortie, elle a été prise en
charge par la Ligue Démocratique des droits des femmes et se trouve
actuellement dans l’un de ses centres d’accueil à Casablanca.
Où est Bassima Hakkaoui ?
Cependant, entre le temps où la jeune femme est entrée de l’hôpital
pour recevoir des soins et en est sortie, aucun officiel, aucun
ministre, pas même Bassima Hakkoui, ministre de la Solidarité, de la
Femme, de la Famille et du Développement social ne se sont rendus au
chevet de la jeune femme pour savoir comment elle allait. Yabiladi a
tenté de joindre la ministre cet après-midi, mais sans résultat.
Pourtant, le Premier ministre Benkirane n’a pas hésité à rendre
visite « en secret » à la famille du jeune homme décédé après avoir
tenté de rattraper la jeune femme dans sa chute, rapporte le site Mediapart
parlant d’une visite le 9 janvier, le jour-même de son décès. « Ca ne
coûtait rien au Premier ministre d’aller voir après, par curiosité,
comment se sentait la jeune femme. Elle a été admise et soignée dans le
pavillon 4 du CHU de Casablanca, un genre de hangar ouvert à tout le
monde, où n’importe qui pouvait l’approcher », déplore Omar El Kindi.
« Qu’aucun officiel ne se déplace après une tentative de suicide, on
peut comprendre mais la manière dont cette affaire a été médiatisée,
quelqu’un aurait pu au moins se déplacer. Chacun doit jouer son rôle »,
ajoute-t-il.
La tentative de suicide de Nassima intervient au moment d’une autre
tragédie : le décès de la famille Berrada le 5 janvier dernier dans le crash de leur avion
bimoteur en France. Farid Berrada, PDG de la société Colorado, son
épouse et ses trois enfants ont été enterrés hier à Casablanca. Des
funérailles au cours desquelles se sont déplacés massivement des leaders
politiques et chefs d’entreprises. La liste est longue : Abdelilah
Benkirane, Taïb Fassi-Fihri, conseiller royal aux affaires étrangères,
Karim Ghellab, président de la Chambre des représentants, Nabil
Benabdallah, le ministre de l’Habitat, Driss Jettou, Président de la
Cour des comptes ou encore Mohamed Kettani, PDG de Attijariwafa Bank.
30 000 petites bonnes travaillent encore !
Avec tout le respect que nous devons à la mémoire de la famille
décédée et à ses proches, on ne peut rester indifférent face à ce manque
d'égard de la part des autorités du pays. Lorsqu’une bonne tente de se
suicider pour la deuxième fois afin de mettre fin à son calvaire, aucun
élu ou officiel ne demande après elle, ni n’est là pour l’écouter ou la
réconforter.
La jeune femme vit pourtant un véritable cauchemar depuis qu’elle a
14 ans, âge où elle a commencé à travailler comme petite bonne à tout
faire chez des familles aisées à Marrakech et à Casablanca. Un cauchemar
qui n'est que le fruit des maux de la société marocaine dans laquelle
elle a grandi. Le salaire qu’elle touchait allait directement dans les
poches de ses parents qui la forcaient à travailler. En 2010, elle est
victime d’un viol et s’ouvre les veines pour tenter de mettre fin à ses
jours. Nassima a vécu et continue de vivre certainement ce que des
milliers d’autres jeunes filles marocaines vivent au quotidien en
silence. D’après les chiffres du Collectif pour l’éradication de
l’exploitation des petites bonnes et l'Unicef, 30 000 fillettes
travaillent encore aujourd'hui comme domestiques au Maroc alors que le
pays interdit le travail avant 15 ans et que les enfants sont obligés
d’aller à l’école jusqu’à 16 ans.
« Le
lieu de vie des petites filles est chez leurs parents plutôt que chez
des employeurs, leur présence doit être obligatoire dans les écoles
pour les former et les préparer à faire face aux réalités de notre
société et leur temps doit être dédié à l’épanouissement personnel,
psychologique et social qui leur permet une meilleure intégration et
prise de conscience de leurs facultés et leur personnalité », affirme
Bassima Hakkaoui, ministre de la Solidarité, de la famille, de la femme,
du développement social, interrogée sur le sujet.
Aucune pudeur
Lors de notre
entretien avec Omar El Kindi, ce dernier déplore la manière
sensationnaliste dont les médias ont couvert l’affaire de la jeune
bonne. Il explique avoir été choqué de voir la vidéo
de Nassima dans son lit à l’hôpital, sans que la personne qui a filmé,
ne floute une partie du visage de la jeune femme en guise de respect. Il
s’est dit également choqué de voir la une d’un journal arabophone d’il y
a quelques jours publiant le visage plein d’echymoses de la jeune
femme.
http://www.yabiladi.com/articles/details/14975/maroc-aucun-ministre-chevet
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