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mardi 15 janvier 2013

Fillettes-mamans au Moyen Atlas, une misère pire que le manque de nourriture et de vêtements...


Les Mia du Moyen Atlas

Elle s’appelle Mia. Tout juste 21 ans, elle crie haut et fort à qui veut l’entendre son dégoût pour les pratiques ô tellement communes mais barbares dans son petit village du Moyen-Atlas.

Mia la courageuse, n’a pas peur des réprimandes, elle se dit même prête à témoigner à visage découvert quitte « à finir au cachot, si cela peut permettre de dénoncer la situation des jeunes filles du village ».
Mia est belle et intelligente, elle  a des pensées révolutionnaires et jure par tous les Dieux, que si ça ne tenait qu’à elle, elle ferait mettre en prison tous les « mâles » de son bled « pourri ».

Mia n’est allé à l’école que jusqu’en CE4, mais elle a su se construire et définir sa vision du bon et du mauvais, grâce aux nombreux défis et expériences douloureuses qu’elle a endurés, ou dont elle a été témoin : Tout juste 21 ans, elle a été mariée 3 fois, sa première nuit de noce date de quand elle avait 12 ans. Se marier en étant à peine pubère est chose commune par ici.
Cette jeune rebelle, nous raconte le cœur gros, la voix pleine d’assurance et les yeux pleins de dégoût comment les vieux du village (considérés comme les sages) se réunissent pour lire « El Fatiha » et marier des petites filles de 12 ans à des hommes de 18 ans leurs aînés. Elle regarde par la terrasse de chez elle et pointe du doigt trois petites fillettes de 11 ans qui jouent en bas et nous dis « Vous voyez celles là elles ont toutes été mariées, mais Dieu merci elles ont eu de la chance, leurs maris ont changés d’avis  avant même de consommer ».
D’autres beaucoup moins chanceuses, se retrouvent divorcées à peine une semaine après l’union. Elles auront eu alors à endurer quelques jours de viol quotidien, avant que leurs chers et tendres ne décident qu’ils n’en veulent plus et les remettent aux parents. « Ici pour avoir une relation sexuelle, on se marie pour que ce soit halal ou légal et ensuite en un mot on divorce », nous dit Mia. Ces derniers finissent à leur tour par les remarier tôt ou tard à un autre. Ces jeunes petites cumulent alors mariages après divorces, comme il est le cas pour la sœur aînée de Mia (5 mariages à 23 ans), elles gagnent alors en maturité et en âge, puis finissent par enfanter.
Dans les villages comme celui de Mia, beaucoup de ces hommes sont de petits lâches bons à rien, qui se la coulent douce toute la journée en sirotant leur verre de thé, pendant que les femmes et les filles, font tout le sale boulot (ranger, nettoyer, cuisiner, couper et transporter le bois, emmener le bétail paitre par -5 degrés). Quand l’une d’elles finit par tomber enceinte de son énième mari (à tout juste 23 ans, la sœur de Mia est maman d’une petite de 8 ans, je vous laisse faire le compte), il l’accompagne souvent jusqu’à l’accouchement, puis annonce qu’il doit travailler en ville pour récolter de l’argent. S’en suit alors de longs mois voire années d’absence, laissant sa victime à la charge de ses parents honteux de leur fille répudiée, et d’un enfant sans état civil  inexistant aux yeux de tous.
Revenons à présent à celle pour qui l’enfance tourne rapidement au drame : Quand on a marié Mia pour la première fois à 12 ans, on lui a proposé la pilule (ici on en distribue gratuitement en espérant réduire les naissances), Mia s’est alors mis un point d’honneur à la prendre tous les jours pour ne jamais risquer de tomber enceinte. Pendant que les autres petites, jeunes et femmes du village la prenaient une fois par mois, faute d’en comprendre le fonctionnement, Mia elle en prenait 2 par jour, elle nous dit « deux fois vaut mieux qu’une il n’y avait pas de risque à prendre ». Malheureusement cette détermination et cette rage de vivre  n’est pas commune toutes les fillettes vivant dans cette région, le cerveau lobotomisé par des idées reçues sur le rôle de la femme et de son honneur.
Mia nous montre du doigt une fois de plus, une petite maison où vit un couple depuis leur mariage il y a un 1 an. L’homme, le tortionnaire, a 31 ans, « sa femme » victime d’une société barbare, en a 12, et accouche dans quelques semaines de son premier enfant. Mia fait alors un grand sourire et nous dit « pour elle ce qui est fait est fait, c’est une femme à présent, elle a un foyer un mari, bientôt maman. Elle s’est habituée à tout cela, elle a grandi … Vraiment! Maintenant pour toutes les autres, il faut abolir ces mauvaises habitudes prises dans nos villages ».
Mia nous raconte qu’il y a plusieurs petites en pleine adolescence qui tombent enceintes dès leur mariage. Elle nous explique que ces filles ne peuvent pas accoucher au village, elles sont alors transportées en urgence vers la ville la plus proche pour une césarienne. Mia passe alors son doigt sur son ventre à l’horizontale pour désigner l’opération chirurgical, puis refait le même geste plus bas dans l’entre-jambe en nous disant « hachakoum! Mais que voulez vous elles sont elle même encore toutes petites! comment pourraient-elles sortir un enfant de là sans se faire déchirer?! ».
Certaines de ses fillettes ne reviennent jamais au village, elles meurent en route faute de temps, ou pendant l’accouchement à l’hôpital. Leurs corps finissent par lâcher après avoir supporté une charge pour laquelle ils n’étaient pas encore prêts.
L’ironie du sort pour ces petites, est que dans ces villages du Moyen Atlas, le taux de scolarisation est élevé, mais les classes d’école n’existent que pour le primaire, ensuite il faut aller faire l’internat à 2 heures de route pour accéder au collège. Seuls les garçons sont autorisés à y aller, « on ne peu pas envoyer une petite de 12 ans loin de sa famille, et risquer qu’elle nous revienne le ventre devant enceinte d’un inconnu. Autant arrêter l’école c’est bien plus sûr » … Ici au moins, elle aura un « mari », me direz-vous !
Dans ces petits villages du Moyen Atlas, des filles comme Mia, sa sœur ou sa petite voisine, on en rencontre partout, mais on en parle jamais ou alors tout bas.
Note : Ce récit a été recueilli  auprès d’une jeune habitante d’un village du Moyen-Atlas. Nous ne préciserons pas lequel, et Mia sera un nom d’empreint afin de préserver au mieux son identité. 

 http://www.qandisha.ma/2013/01/14/les-mia-du-moyen-atlas/




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