La France intervient au Mali et réaffirme son rôle de gendarme en Afrique
Par Association Survie Communiqué, le 14 janvier 2013
C’est finalement le 10 janvier 2013 que la France est entrée en
guerre au Mali. La communication du gouvernement français, reprise sans
questionnement par les principaux médias, tend aujourd’hui à légitimer par tous
les moyens et tous les arguments cette nouvelle intervention militaire française
sur le sol africain et son rôle de "gendarme de l’Afrique".
Pour Survie, association qui dénonce depuis longtemps l’ingérence et la
domination de la France envers ses anciennes colonies africaines, il est
important de rappeler quelques éléments de contexte et d’analyse critique sur
cette intervention française, sans minimiser l’ampleur de la crise que connait
le Mali.
La menace que font peser ces groupes armés sur la
population et l’intégrité du Mali est indéniable. Leurs exactions sont connues
et ont provoqué la fuite de centaines de milliers de personnes. Après le
calvaire vécu par les populations dans le Nord, le soulagement des Maliens en ce
moment est compréhensible. Si l’intervention française semble effectivement
avoir mis un coup d’arrêt à l’offensive vers le sud du pays de mouvements armés
qui se revendiquent d’un islam radical, il existe cependant d’autres motifs,
militaires et politiques, à l’opération Serval rendant la conduite française des
opérations critiquable.
Le camouflage multilatéral d’une opération française
Cette intervention ne s’inscrit pas dans le
cadre des résolutions de l’ONU. Des mois de négociations ont permis de
faire voter trois résolutions du Conseil de Sécurité, ouvrant la voie à une
intervention internationale sous responsabilité africaine et pouvant faire usage
de la force, mais officiellement sans implication directe des militaires
français. En informant simplement le Conseil de Sécurité sur le fait que son
intervention urgente "s’inscrit dans le cadre de la légalité
internationale" eu égard aux dispositions de la Charte de l’ONU, elle a
finalement pu justifier une décision bilatérale. Ce changement majeur, qui met
ses « partenaires » devant le fait accompli, est complaisamment occulté
afin de laisser à nouveau croire que la France met en œuvre une volonté
multilatérale actée au sein de l’ONU. Il est donc nécessaire qu’elle respecte au
plus vite les résolutions de l’ONU.
Une fois de plus, la France joue le rôle de
gendarme de l’Afrique, en appuyant sa stratégie sur ses relations
bilatérales avec des "régimes amis" africains, sur la présence permanente de son
armée dans la région et sur sa capacité de projection de forces. Ainsi, les
hélicoptères utilisés pour stopper l’offensive adverse sont ceux des forces
spéciales françaises de l’opération Sabre, présentes au Burkina Faso voisin (et
en Mauritanie) depuis deux ans et renforcées au mois de septembre. C’est surtout
le dispositif Epervier, en place au Tchad depuis 1986 alors qu’il était supposé
provisoire, qui est mobilisé. À travers l’opération baptisée Serval, ce sont
donc les liens que Paris entretient avec des régimes totalement infréquentables,
ceux d’Idriss Déby et de Blaise Compaoré, qui se trouvent une nouvelle fois
renforcés. Le rôle phare de la France est reconnu par la plupart de ses
partenaires occidentaux qui lui emboitent le pas timidement dans cette
intervention (Royaume-Uni, Etats-Unis, Allemagne) sans pour autant engager de
troupes combattantes, tandis que d’autres restent en retrait.
Une intervention directe décidée dans l’ombre
Ce scénario rentre dans la logique développée par le
nouvel exécutif français, prônant l’intervention militaire comme un "préalable"
à la restauration de la paix dans le pays (également en proie à une crise
institutionnelle grave). Ces derniers mois, la France n’avait en rien contribué
à l’émergence d’une solution collective discutée par l’ensemble des Maliens et
de nature à favoriser un consensus politique, préalable à une réorganisation
rapide des forces de sécurité. Aujourd’hui, la présence de soldats français
jusque dans Bamako - sous couvert de protection des ressortissants - représente
une pression importante sur les autorités maliennes en état de grande
faiblesse.
L’option d’une intervention directe et rapide des forces
françaises était déjà prévue, au vu de la rapidité de mise en œuvre, et ce bien
avant que l’offensive ne se rapproche de Sévaré-Mopti. L’aval du Parlement n’est
pas nécessaire à l’Élysée pour déclencher une opération extérieure, ce qui
marque l’insuffisance de la modification constitutionnelle de juillet 2008
relative au contrôle parlementaire des opérations extérieures. De rares
réactions critiques dans la classe politique soulignent cette absence de
concertation. La nature préméditée de cette intervention armée aurait
indiscutablement dû susciter une prise de décision
parlementaire.
Dans l’immédiat, l’opération Serval a déjà basculé dans
une phase offensive et semble devoir se prolonger dans la durée. Cette logique
occulte délibérément les risques pour la population malienne et les Etats de la
région, de même que les perspectives politiques et la période post-conflit. Le
bilan accablant des récents antécédents français en Afrique montre pourtant que
ces risques sont bien réels. Les interventions de 2011 en Côte d’Ivoire et en
Libye ont en effet débouché sur des situations internes explosives, passées sous
silence.
En conclusion, la crise malienne et cette nouvelle
intervention militaire française en Afrique révèlent l’échec de 50 années de
"coopération" avec l’Afrique : armées incapables de protéger leurs
populations, chefs d’Etat médiateurs de crises eux-mêmes putschistes, accords de
défense et bases militaires qui ont perpétué le rôle de gendarme de l’Afrique
que la France s’est historiquement octroyé.
On ne peut que constater
l’incapacité des institutions africaines et multilatérales à organiser la
moindre opération de sécurisation dans la région sans avoir recours au poids
lourd français, qui a tout fait pour se rendre incontournable. Ces événements
appellent une fois de plus à une remise en cause de l’ensemble du cadre des
relations franco-africaines. contact@survie.org>;
Contact
presse :
Association
Survie
107,
Boulevard de Magenta
75010
Paris
Tél
: 01 44 61 03 25
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COMMUNIQUÉ
DE PRESSE DU MOUVEMENT DE LA PAIX
13/1/2013
13/1/2013
Condamnons l’état de guerre,
exigeons l’état de Paix !
Le gouvernement français a décidé une intervention militaire
au Mali ce vendredi 10 janvier, sans consultation du Parlement.
Le Mouvement de la Paix refuse l’argumentaire permanent du
caractère inéluctable des interventions militaires. Celui-ci place les citoyens
devant une politique du fait accompli, induit par l’urgence d’une situation
pour laquelle la communauté internationale ne s’est pas dotée des moyens de
préventions nécessaires.
Le Mouvement de la Paix exprime toute sa solidarité avec le
peuple malien qui souffre depuis plusieurs mois d’inacceptables violences
perpétrées par des groupes armés se réclamant de l’islam radical.
L’histoire récente démontre clairement que rajouter la guerre
à la guerre n’apporte aucune solution à un quelconque conflit. L’exemple
libyen, grandement responsable de l’actuelle situation au Mali, oblige la
France et la communauté internationale à repenser leurs stratégies, en vue de
réellement protéger les populations.
Les interventions militaires extérieures ont des effets
directs sur la population française, prise en otage par l’instauration d’un
climat de peur permanente de l’ennemi invisible, et donnant lieu au maintien et
au renforcement du plan Vigipirate avec le dévoiement continuel de la présence
de l’armée sur le territoire impliquant une situation de guerre sans fin.
Pour le Mouvement de la Paix, l’urgence absolue est de
permettre le déploiement d’une force d’interposition internationale mandatée
par les Nations unies pour mettre fin aux conquêtes des groupes armés et
protéger les populations civiles en proie à la terreur des combats.
Le Mouvement de la Paix
Saint-Ouen, le 13 janvier 2013
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Les forces françaises se sont engagées vendredi au Mali, en soutien
de l’armée malienne et contre les groupes armés islamistes, au lendemain
de l’offensive des jihadistes dans le centre du pays, qui a bouleversé
les plans de la communauté internationale.
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