avec Claude Mangin au Sahara occidental
J'ai commencé l'année 2013 derrière le miroir. Un peu comme dans le
film Matrix, lorsque Néo sort de la matrice et qu'il découvre les
coulisses de sa réalité. Cela m'a fait la même chose avec le Maroc. J'en
étais restée au côté face de la monarchie chérifienne : ses riyads,
ses villes magnifiques. Et j'en ai vu les bas-fonds pas ragoûtants :
sa police et son armée, ses prisons où la torture est courante. Pour
entrer dans cet autre monde, il y a un mot de passe : dites juste
« Sahara occidental ». Cela agit comme une sorte de révélateur appliqué
sur une photo et qui tout à coup laisse voir les coins sombres d'un
paysage trop joli.
C'est la drôle d'expérience que j'ai faite la première semaine de
l'année alors que je suivais au Maroc et au Sahara occidental Claude
Mangin, une française dont le mari Naama Asfari, un militant sahraoui
est emprisonné à Rabat depuis 2 ans. Professeure d'histoire géographie,
cette femme de 56 ans se bat depuis des années pour faire connaître la
situation des droits humains au Sahara occidental.
Ancienne colonie espagnole, le Sahara occidental fut l'enjeu d'une
guerre entre le Maroc et le Front Polisario qui s'est terminé par un
cessez-le-feu en 1991 et la promesse d'un référendum sur
l'autodétermination du peuple sahraoui qui n'a toujours pas eu lieu.
Mais le royaume s'obstine à considérer comme sien ce territoire grand
comme la moitié de la France, bande de désert qui plonge dans l'océan
atlantique.
Destruction de Gdeim Izik |
Une résistance pacifique sahraouie s'est organisée. Le 10
octobre 2010, 20 000 sahraouis se rassemblent ainsi à Gdeim Izik, à 16
km de Laayoune, la capitale du Sahara occidental, dans un campement de
"Khaïma", les tentes traditionnelles de ce peuple nomade. Ils protestent
contre les discriminations dont ils sont victimes et réaffirment le
droit des Sahraouis à l'autodétermination. Le mari de Claude Mangin,
Naama Asfari en est l'un des leaders. Mais le 8 novembre 2010, le
campement est violemment démantelé par l'armée et la police marocaine.
Les sahraouis se défendent. Difficile de savoir ce qui s'est réellement
passé. Il y aurait eu 11 ou 12 morts, selon les sources, chez les
militaires et les policiers marocains. Naama Asfari a été arrêté la
veille, le 7 novembre. Qu'importe, il est accusé des meurtres et risque
la perpétuité ou même la peine capitale, avec 22 autres prévenus.
Depuis, il attend un procès qui a déjà été reporté deux fois. Lorsque
nous rencontrons Claude Mangin, elle vient d'apprendre que celui-ci
pourrait avoir lieu le 1er février.
Retrouvez le portrait de Claude Mangin dans le numéro de La Vie, qui paraîtra jeudi.
Avant le démantèlement par les forces d'occupation |
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