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mardi 15 janvier 2013

La « Main » de Dieu / La main à couper !

par Mohammed Belmaïzi, 14 /1/2013



Dès l’abord, il faut rappeler un débat crucial du temps d’Al-Amine, fils de Haroun Errachid, qui régna de 809 à 813. Ce Khalif voulait imposer la doctrine du « Coran créé » (de la même nature que ce qui est tangible, où l'esprit humain est sollicité pour l'interprétation) face à la thèse de l’orthodoxie qui veut imposer « le Coran incréé » - (Texte de la même nature que Dieu, où nulle intervention de l'esprit humain n'est possible) ; s’en suit alors une période qu’on appela la Mihna (traduit dans le jargon d’aujourd’hui par «les années de plomb») où le Khalif ne lésinait sur rien pour torturer, assassiner ou faire disparaître. Les orthodoxes feront de même contre les partisans du « Coran créé » après la mort d’Al-Amine...

Rendez-vous manqué! Un Khalif de grande culture, très brillant et libre penseur, n’a pu mener

à bien une réforme prometteuse de l’islam, à travers la notion du « Coran créé ». Notion qui éloigne le Coran de la littéralité dans laquelle les courants dogmatiques ne cessent de l’insérer et de fermer toute tentative de l’effort intellectuel qui ose des interprétations dans le sens des valeurs d’un monde non figé, et qui fatalement bouge et évolue.

L’un des arguments des Mou’tazilites à cette époque, évoquait « la Main de Dieu » dans une myriade de passages du Coran, où il est dit que «la Main de Dieu est au-dessus de leurs mains» (yadou allahi fawqa aydiihim), pour demander, quel sens, alors, donner à cette « Main » ? Les défenseurs de la thèse du «Coran incréé» ne peuvent l’expliquer littéralement. Car Dieu n’engendre point et n’est point engendré. Dieu n’est point de la nature humaine et il ne peut, par conséquent, avoir d’attribut corporel comme la «Main». Donc l’esprit analytique ne peut qu’appuyer la notion métaphorique. Il s’agit bel et bon d’une image recourant à l’épaisseur symbolique de la « main ». Dans ce sens, « leurs mains » dans « au-dessus de leurs mains », s’y prêtent également et sans détour au même symbolisme. C’est qu’il devient clair que la lecture du Coran ne peut être littérale.  

A partir de ce constat, on peut s’interroger si la lecture littérale ne produit pas des déviances dangereuses. Ne commet-elle pas une monstruosité sémantique, pour ne pas dire hérétique, lorsqu’elle s’écarte du sens métaphorique du signe « la main » dans le passage : «Il faut couper la main au voleur» ? D’autant plus que les voleurs se drapent derrière diverses formes. Il y a des voleurs qui détournent les richesses de tout un pays, et qui piquent l’argent des contribuables sans utiliser «la main», un clic et un ordre et voilà que le pillage s’organise majestueusement.

Et dans le même élan métaphorique, le signe « couper » ne peut-il pas jouir de la même dimension symbolique. D’ailleurs, dans le dictionnaire arabe, « lissan Al ‘Arabe », (langage/langue/éloquence des Arabes), les mots jouissent d’une profusion de sens. Une chance à notre disposition pour ouvrir la porte de l’ijtihad (l’effort) et oser des interprétations qui vont dans le sens d’un ordre humain où les aspirations des êtres que nous sommes restent au centre des préoccupations du savoir et de la science. Il faut rappeler que la Maqama, la Séance, genre littéraire comme par hasard à l'aube de la décadence du monde arabo-musulman, a formidablement aboli le Moi suprême du mot... pour brouiller le sens et donner une vision du monde plus adaptée à l'humain.

Hassan Tourabi, le fameux islamiste soudanais et surtout littéraliste, devait assister à une séance où l’on coupe la main d’un voleur… Avant même que la main ne soit tranchée, il s’est évanoui et est tombé par terre ! C’est que ce bonhomme lit et explique le Coran selon un angle incompatible avec la dignité, la liberté, l’égalité et la prospérité.


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