Association
de Défense des Droits de l’Homme au Maroc
ASDHOM 79, rue
des Suisses 92000 Nanterre
|
Point
hebdomadaire n°58 sur la campagne de parrainage des prisonniers d’opinion au
Maroc 26/3/2014
Si en tant que défenseurs
marocains des droits de l’Homme, nous ne pouvons que nous féliciter de la
récente décision prise par le conseil des ministres relativement au projet de
réforme du tribunal militaire, décision qui
met fin à la comparution des civils devant ce tribunal militaire, il
n’en demeure pas moins que nous restons préoccupés et vigilants quant à sa mise
en pratique. Rappelons que ce sujet a été soulevé au moment du procès des 25
civils sahraouis du groupe Gdeim Izik amenant même le Conseil National des
Droits de l’Homme (CNDH) à
présenter au chef de l’État un rapport et une recommandation dans ce sens. Cela
n’a pas empêché le tribunal militaire permanent de Rabat de les condamner une
semaine après, soit le 17 février 2013, à des peines lourdes allant jusqu’à la
perpétuité. Un autre Sahraoui du nom de Mbarek Daoudi, un retraité de 58 ans, a été
entre temps arrêté à Guelmim et présenté devant ce même tribunal militaire pour
y être jugé. L’ASDHOM réclame la
mise en œuvre sans délai de cette réforme. La libération de Mbarek Daoudi ou du moins l’assurance d’un
procès devant une juridiction civile serait un gage de volonté sur le sujet.
Deux autres projets attendent sur
le bureau de la 1ère chambre du Parlement marocain et ce, depuis
longtemps. Il s’agit de la ratification par le Maroc de deux protocoles
facultatifs et importants pour les organisations de défense des droits de
l’Homme. Le premier concerne la Convention
sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des
femmes. Le deuxième est relatif au Pacte international sur les droits politiques et
civils. Les deux protocoles soulignent clairement la compétence de
leurs comités respectifs pour « recevoir et examiner des communications émanant
de particuliers relevant de sa juridiction qui prétendent être victimes d’une
violation par cet État partie ».
Nous demandons qu’une adoption de
ces projets intervienne rapidement et qu’elle soit suivie d’une réelle mise en
pratique. Nous en avons assez des coups d’épée dans l’eau et des coups de
communication destinés uniquement à la consommation et à tromper l’opinion
internationale.
Les événements et l’actualité des
droits de l’Homme au Maroc nous obligent à cette vigilance. Les informations que
nous allons relater dans ce point hebdomadaire montrent bien le contraste entre
les intentions et la réalité.
Groupe
UNEM : À Kénitra, les cinq étudiants, militants de
l’UNEM, arrêtés le 20 janvier 2014 et condamnés en première instance à 8 mois de prison ferme et à une amende de
1000 dirhams chacun (voir point précédent), sont en grève de la faim depuis le 9 février
dernier. Abderrahim Taouil, Ismaïl El-Ahmar,
Karim Boussaâdan, Zakaria Rakkas et Abderrazak Ajakko ont même durci leur
grève de la faim à partir du 14 mars en refusant de s’alimenter en eau et en
sucre. Ils ont assisté à leur procès en appel du 20 mars dans un état de santé
très détérioré (évanouissements, vomissements, etc.) Une caravane solidaire,
composée essentiellement d’étudiants, qui se dirigeait le même jour à la prison
Awad où se trouvent les cinq prisonniers politiques, a été réprimée par les
forces de l’ordre. Un autre sit-in de soutien aux cinq grévistes de la faim a
été réprimé le 16 mars à Casablanca. Une dizaine de jeunes militants et
d’anciens prisonniers du mouvement 20-Février ont été arrêtés. Il s’agit de
Rabie Homazin, Hamza Hadi, Abderrahman Assal, Youssef Bouhlal, Youssef Boula,
Adil Labdahi, Ihim Bakouaber, Khalil Jamal, Mohamed Hassia et Nourdine Awad
À Fès, trois autres militant(e)s de l’UNEM,
poursuivis en liberté, ont été convoqué(e)s le 20 mars devant la cour d’appel.
Mohamed Aït Rais, dit Haha, et
Brahim Lahboubi ont écopé de
4 mois de prison. Rappelons qu’ils
avaient été arrêtés respectivement le 17 et le 15 octobre 2014 et qu’ils ont
passé plus de 4 mois à la prison Ain Kadous. Quant à la militante Fatima Zahra Malkaoui, elle doit encore
attendre son procès puisque l’instruction venait juste de se
terminer.
À Meknès, c’est le procès de cinq autres
militants de l’UNEM (Hassan Koukou, Mounir
Ait Khafou, Soufiane Sghéri, Mohamed Eloualki et Hassan Ahamouch) qui a été encore une fois
reporté du 17 mars au 21 avril 2014. Ces prisonniers politiques, arrêtés le 17
décembre 2012 et placés à la prison Toulal 2 de Meknès, ne sont toujours pas
jugés. Ils ont observé plusieurs grèves de la faim pour alerter sur leur
situation. Leur parrain, le Français Gilles
Deloustal, n’a cessé d’interpeller les autorités marocaines sur leur
sort. Celles-ci font la sourde oreille comme dans tous les autres
cas.
À Rabat, la police a procédé à l’arrestation
musclée du militant de l’UNEM, Omar
Chamma. Il a été traduit devant le tribunal le mercredi 12 mars 2014.
Nous n’avons pas plus d’éléments le concernant.
Groupe Liberté
d’expression-Avocats : Me Mohamed El-Messaoudi, l’avocat et défenseur
des droits de l’Homme, sera fixé sur son sort le 4 avril prochain. Les témoins
appelés à la barre lors de son procès du vendredi 21 mars, tenu à Casablanca, ont déclaré ne
rien avoir remarqué comme acte d’outrage venant de sa part. Ses avocats ont
ensuite plaidé sa relaxe. Rappelons qu’il est poursuivi pour outrage à magistrat
lors d’un procès où il défendait en 2009 le groupe sahraoui dit Tamek qui
revenait d’un voyage à Tindouf et qui était accusé d’intelligence avec des
services étrangers. Le bureau régional de l’AMDH-Casablanca a appelé le jour de son
procès à un rassemblement de soutien devant le tribunal de
Casablanca.
Groupe
Ouarzazate (nouveau) : Le 17 mars 2014, six ouvriers,
licenciés de la société Total/Ouarkaz de Ouarzazate, ont comparu devant le
tribunal d’Ouarzazate pour « entrave à la liberté de travail-article 288 du code
du travail ». Il s’agit d’Abderrahim Sedki,
Salaheddine Rakibi, Aziz Outajda, Hassan Bouhou, Youssef Ourdi
et Mohamed Ikan, tous
membres du parti du socialisme unifié (PSU). Ils avaient été condamnés en
première instance à 4 mois de
prison ferme et une amende de 6000 dirhams chacun en plus d’un dédommagement de
40 000 dirhams.
Toujours à Ouarzazate, rappelons
qu’Amina Mourad et Bennacer Smaini, les deux coordinateurs du
mouvement de défense des victimes du microcrédit, ont été condamné(e)s le 17
février dernier à un an de prison ferme et à 30 000 dirhams
d’amende en plus des 10 000 dirhams de dédommagement à l’organisme du
microcrédit INMAA, qui avait porté plainte contre eux alors qu’ils avaient été
relaxé(e)s. Quatre autres organismes avaient retiré leur plainte. Un mouvement
de solidarité s’est développé autour d’eux, traversant même les frontières du
Maroc, et deux avocats se sont chargés de préparer le recours en cassation qui
sera déposé à Rabat avant le 18 avril.
Groupe
Sahraouis : Le prisonnier politique
sahraoui Kays Hiba, arrêté le 7
octobre 2013 à Guelmim, vient
d’être condamné le 20 mars par le
tribunal d’Agadir à un an de
prison ferme. La justice lui reproche d’avoir participé aux
manifestations qu’a connues Guelmim en soutien à celles qui se sont déroulées en
septembre 2013 à Assa et qui ont conduit à la mort du jeune sahraoui Rachid
Chine.
Nous apprenons par ailleurs que
Sidi Sbai, Mohamed Jemour, Hafed Toubali et
Bachir Bouâmoud, les quatre défenseurs des droits de l’Homme, arrêtés
à Ifni et condamnés à 4 et 6 mois de prison
ferme, avaient été transférés, le 14 mars, de la prison de Tiznit à
la prison d’Ait Melloul pour pouvoir comparaitre devant la Cour d’appel
d’Agadir. Ils se plaignent tous des mauvais traitements qui leur sont réservés
ce qui les a poussés à observer une grève de
la faim de 48h à partir du 18 mars.
D’autres prisonniers politiques
sahraouis, se trouvant dans cette même prison sans jugement depuis plus de 4
mois, ont également entamé une grève de la
faim pour protester contre leurs conditions de détention et pour
réclamer qu’on leur fixe enfin une date de procès. Mohamed Lamine Attar, Hiba Chouiar
et Abdallah Boukiout
avaient été arrêtés en octobre 2013 à la suite du démantèlement du campement
Tizimi à Assa.
L’étudiant sahraoui, Hassan Chouiar, en détention provisoire à
la prison d’Ait Melloul, a, quant à lui, vu son procès fixer par le tribunal
d’Agadir au 3 avril prochain. Il a été arrêté le 17 octobre 2013 suite aux mêmes
événements d’Assa après le démantèlement du campement Tizimi.
Le bureau exécutif de
l’ASDHOM
Paris, le 26 mars 2014
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire