Prolonger :
Voici d'abord la vidéo de l'entretien accordé par Pierre Joxe à
France Inter, le jeudi 2 janvier (la question Dieudonné-Valls est
abordée à 8 min 40 sec), suivie du communiqué de la Ligue des droits de
l'homme, en date du lundi 6 janvier.
Communiqué LDH, Paris, le 6 janvier 2014
Contre l’antisémitisme, les principes républicains doivent triompher
Quand une démocratie est attaquée dans ses fondements, elle se montre
forte quand elle applique ses principes. Elle est faible si, face aux
extrémismes, elle les abdique.
Dieudonné a réussi ce tour de force : le Front national défend la
liberté d’expression, alors que le ministre de l’Intérieur a déclaré
vouloir interdire a priori son spectacle et lui sera en tournée dans de
très nombreuses salles, notamment les Zéniths qui sont sous contrat avec
l’Etat.
Or, en France, depuis le début du XXe siècle, la loi, et c’est
heureux, ne permet plus l’interdiction a priori des spectacles.
Dieudonné et ses zélateurs s’indignent donc de ce que l’Etat s’apprête à
violer une liberté fondamentale, la liberté d’expression.
Tour de force, donc, que de se faire passer pour une victime quand on
est celui qui a fait son fonds de commerce de l’agression systématique
d’un groupe de personnes à raison de leur origine ethnique, de leur
religion, et des horreurs qu’elles ont subies.
Dieudonné a pourtant tort de se revendiquer de la liberté de création
pour justifier, dans ses spectacles, ses insultes antisémites, son
apologie du révisionnisme, ce pour quoi la LDH s’honore de l’avoir fait
condamner. Reste qu’il a toujours transformé ses procès en tribunes,
organisant son insolvabilité de façon à échapper aux condamnations
financières, qu’elles soient des amendes pour l’Etat ou des dommages et
intérêts pour les associations qui, comme la LDH, l’ont poursuivi avec
un succès qui reste théorique.
Le ministre de l’Intérieur, en cherchant à obtenir des préfets qu’ils
interdisent ses spectacles, prend un risque d’une autre dimension,
celui de fédérer autour de Dieudonné une sympathie réactionnelle de ceux
qui se considèrent, pour des raisons qui peuvent par ailleurs
parfaitement se comprendre, opprimés, socialement ou politiquement. Et
auprès de ce public, le jeu ambigu, voire pervers, entre humour et
haine, agression et victimisation, politique et show-business, peut
marquer les esprits dans un sens particulièrement dangereux.
Dieudonné, dont les sympathies avec les thèses les plus extrêmes de
la droite antisémite ne sont plus un mystère pour personne, met donc en
défaut la démocratie, lorsqu’elle répond à la haine par une menace de
restriction de la liberté d’expression.
La LDH rappelle donc que la règle qui doit prévaloir est la liberté,
et que tout abus de celle-ci doit être condamné de façon ferme et
efficace. La LDH et ses militants seront très vigilants et attentifs à
ce que les propos de Dieudonné qui méritent une sanction pénale soient
poursuivis, comme elle l’a fait par le passé, et elle engage vivement
les pouvoirs publics à poursuivre les atteintes à la loi une fois
qu’elles sont commises, plutôt qu’à se lancer dans des interdictions
préalables au fondement juridique précaire et au résultat politique
incertain, voire contreproductif.
Il est scandaleux que les associations parties civiles dans les
procès qui ont été fait contre cet individu n’aient aucun moyen de le
forcer à exécuter les condamnations, que les magistrats n’aient pas à ce
sujet de plus amples pouvoir d’investigation, et prononcent donc des
peines dont ils savent par avance qu’elle ne seront pas exécutées.
Puisque Dieudonné a fait son fonds de commerce de la haine, il faut
qu’il soit condamné à chaque fois qu’il l’exprime, et que les peines
prononcées soient effectives et décourageantes.
Communiqué LDH, Paris, le 6 janvier 2014
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