Lorsqu’il a décidé d’envahir le Sahara Occidental, le roi Hassan II avait à l’idée d’occuper son armée. Il en avait peur.
L’ONU envoie, en juin 1975, une mission d’enquête dans la région, dirigée par l’ambassadeur ivoirien Simeon Aka. Son rapport conclut à la nécessité absolue d’organiser un référendum d’autodétermination.
Le 25 avril 1974, l’armée portugaise renverse le régime salazariste de
Gaetano. La révolution des œillets va ouvrir la voie à la
décolonisation des territoires africains sous domination portugaise,
c’est-à-dire l’Angola, le Mozambique, la Guinée Bissau, le Cap-Vert, Sao
Tomé-et-Principe. L’OUA vient de concrétiser une partie des objectifs
qu’elle s’était assignés à sa création, en mai 1963. Il restait
l’Afrique du Sud, dirigée d’une main de fer par le système d’apartheid ;
la Namibie, administrée par la même Afrique du Sud ; et le Sahara
occidental, sous occupation espagnole.
Pour ce dernier pays, une question de décolonisations avortée va devenir une source de tension qui bloque l’avenir du Maghreb jusqu’à ce jour. Pourtant, on s’attendait à ce que l’évolution soit toute autre. En 1964, le Pérou et la Mauritanie (!) déposent aux Nations unies le premier projet de résolution sur le Sahara occidental qui, depuis, est considéré comme territoire non autonome auquel doit être appliquée la résolution 1514 reconnaissant aux peuples colonisés le droit à l’autodétermination et à l’indépendance.
Malheureusement, moins d’une dizaine d’années plus tard, les deux pays opèrent une volte-face en reniant leur combat pour la décolonisation du Sahara occidental. Entre-temps, le roi Hassan II échappe à une tentative de coup d’Etat en 1971, lorsque des militaires ont pénétré au palais de Skhirat près de Rabat au moment où il donnait une réception. Il n’a eu la vie sauve qu’en se cachant dans les toilettes. En 1973, lorsqu’il revient d’un séjour en France, son Boeing est intercepté par des chasseurs des Forces armées royales qui tentent de l’abattre. Son sang-froid lui permet d’échapper à une mort certaine.
L’auteur de cette tentative de coup d’Etat n’était autre que son bras droit et homme des basses besognes, comme l’assassinat de Bachir Ben Barka, le général Mohamed Oufkir, également agent du Sdece, le service du renseignement français. Il sera abattu par le roi en personne dans le palais royal. A partir de ce moment, Hassan II a commencé à avoir peur de son armée et à chercher les moyens de l’envoyer le plus loin possible de Rabat. Or, à la même période, il apprend que du pétrole a été découvert au Sahara occidental par la société Esso.
Cela aiguise son appétit et provoque son revirement à l’égard de la cause sahraouie. De son côté, l’Espagne, elle aussi, a décidé de se retirer de sa colonie. Le général Franco contacte Houari Boumediène et lui propose de prendre le contrôle du Sahara occidental, selon les révélations faites par Mohamed Benahmed Abdelghani en 1984 à l’auteur de ces lignes. Boumediène réunit le Conseil de la révolution pour lui faire part de la proposition espagnole ; un débat s’ensuit. Il y avait des pour et des contre.
Finalement, Boumediène tranche. Il faut respecter la décision des Nations unies, c’est-à-dire soutenir le droit à l’autodétermination et à l’indépendance. A la même période, le souverain marocain avait pris attache avec le président algérien pour lui proposer le partage du territoire entre les deux pays. Refus net de Boumediène, qui ne voulait pas violer la règle sacro-sainte de l’Organisation de l’unité africaine sur le respect des frontières héritées à l’indépendance. Un climat de tension s’installe dans la région. Tout le monde avait oublié une donne.
Le peuple sahraoui avait décidé de prendre en charge son destin et, pour cela, il crée, en mai 1973, le Front Polisario, qui s’avérera plus être une redoutable machine de guerre qui emportera plus tard le régime mauritanien de Mokhtar Ould Daddah et a failli faire tomber le trône alaouite s’il n’y avait pas eu le soutien militaire direct de la France et de certains pays arabes du Golfe. A partir de là, les événements vont se précipiter.
L’ONU envoie, en juin 1975, une mission d’enquête dans la région, dirigée par l’ambassadeur ivoirien Simeon Aka. Son rapport conclut à la nécessité absolue d’organiser un référendum d’autodétermination. Hassan II panique. Il se met à préparer son opinion pour la mobiliser sur la «marocanité» du Sahara occidental, reprenant pour cela une thèse inventée en 1936 par le parti l’Istiqlal sur le «Grand Maroc» qui irait jusqu’au fleuve Sénégal et engloberait une grande partie de l’ouest algérien.
Un événement inattendu survient en septembre 1975 : le général Franco tombe dans le coma.
Toute l’Espagne s’angoisse et a peur pour son avenir. Hassan II profite du désarroi qui s’est emparé des Espagnols et organise le 6 novembre 1975 ce qu’il appelle une «Marche verte», en fait une opération pour tenter d’envahir le Sahara occidental par, dit-il, des «moyens pacifiques». En réalité, les «marcheurs», de pauvres malheureux ramenés de force par camions et abandonnés à leur sort à la frontière marocco-sahraouie, mais qui étaient accompagnés par des chars portés par des porte-chars. L’armée espagnole, refusant d’être humiliée de cette façon par le palais royal, a un sursaut d’orgueil. Elle menace de tirer sur les marcheurs et sur les militaires qui les accompagnent.
Mais le coup de bluff de Hassan II a marché. Son opinion croit au succès — qui n’en a jamais été un — de son coup de poker. Il arrête à temps les marcheurs pour échapper à une humiliation face au Tercio, la fameuse légion étrangère espagnole.Il n’en transforme pas moins cet échec en victoire et elle est célébrée comme telle chaque année par le Maroc. Mais Rabat, par son expansionnisme d’un autre âge, venait de détruire la fragile unité maghrébine naissante.
Pour ce dernier pays, une question de décolonisations avortée va devenir une source de tension qui bloque l’avenir du Maghreb jusqu’à ce jour. Pourtant, on s’attendait à ce que l’évolution soit toute autre. En 1964, le Pérou et la Mauritanie (!) déposent aux Nations unies le premier projet de résolution sur le Sahara occidental qui, depuis, est considéré comme territoire non autonome auquel doit être appliquée la résolution 1514 reconnaissant aux peuples colonisés le droit à l’autodétermination et à l’indépendance.
Malheureusement, moins d’une dizaine d’années plus tard, les deux pays opèrent une volte-face en reniant leur combat pour la décolonisation du Sahara occidental. Entre-temps, le roi Hassan II échappe à une tentative de coup d’Etat en 1971, lorsque des militaires ont pénétré au palais de Skhirat près de Rabat au moment où il donnait une réception. Il n’a eu la vie sauve qu’en se cachant dans les toilettes. En 1973, lorsqu’il revient d’un séjour en France, son Boeing est intercepté par des chasseurs des Forces armées royales qui tentent de l’abattre. Son sang-froid lui permet d’échapper à une mort certaine.
L’auteur de cette tentative de coup d’Etat n’était autre que son bras droit et homme des basses besognes, comme l’assassinat de Bachir Ben Barka, le général Mohamed Oufkir, également agent du Sdece, le service du renseignement français. Il sera abattu par le roi en personne dans le palais royal. A partir de ce moment, Hassan II a commencé à avoir peur de son armée et à chercher les moyens de l’envoyer le plus loin possible de Rabat. Or, à la même période, il apprend que du pétrole a été découvert au Sahara occidental par la société Esso.
Cela aiguise son appétit et provoque son revirement à l’égard de la cause sahraouie. De son côté, l’Espagne, elle aussi, a décidé de se retirer de sa colonie. Le général Franco contacte Houari Boumediène et lui propose de prendre le contrôle du Sahara occidental, selon les révélations faites par Mohamed Benahmed Abdelghani en 1984 à l’auteur de ces lignes. Boumediène réunit le Conseil de la révolution pour lui faire part de la proposition espagnole ; un débat s’ensuit. Il y avait des pour et des contre.
Finalement, Boumediène tranche. Il faut respecter la décision des Nations unies, c’est-à-dire soutenir le droit à l’autodétermination et à l’indépendance. A la même période, le souverain marocain avait pris attache avec le président algérien pour lui proposer le partage du territoire entre les deux pays. Refus net de Boumediène, qui ne voulait pas violer la règle sacro-sainte de l’Organisation de l’unité africaine sur le respect des frontières héritées à l’indépendance. Un climat de tension s’installe dans la région. Tout le monde avait oublié une donne.
Le peuple sahraoui avait décidé de prendre en charge son destin et, pour cela, il crée, en mai 1973, le Front Polisario, qui s’avérera plus être une redoutable machine de guerre qui emportera plus tard le régime mauritanien de Mokhtar Ould Daddah et a failli faire tomber le trône alaouite s’il n’y avait pas eu le soutien militaire direct de la France et de certains pays arabes du Golfe. A partir de là, les événements vont se précipiter.
L’ONU envoie, en juin 1975, une mission d’enquête dans la région, dirigée par l’ambassadeur ivoirien Simeon Aka. Son rapport conclut à la nécessité absolue d’organiser un référendum d’autodétermination. Hassan II panique. Il se met à préparer son opinion pour la mobiliser sur la «marocanité» du Sahara occidental, reprenant pour cela une thèse inventée en 1936 par le parti l’Istiqlal sur le «Grand Maroc» qui irait jusqu’au fleuve Sénégal et engloberait une grande partie de l’ouest algérien.
Un événement inattendu survient en septembre 1975 : le général Franco tombe dans le coma.
Toute l’Espagne s’angoisse et a peur pour son avenir. Hassan II profite du désarroi qui s’est emparé des Espagnols et organise le 6 novembre 1975 ce qu’il appelle une «Marche verte», en fait une opération pour tenter d’envahir le Sahara occidental par, dit-il, des «moyens pacifiques». En réalité, les «marcheurs», de pauvres malheureux ramenés de force par camions et abandonnés à leur sort à la frontière marocco-sahraouie, mais qui étaient accompagnés par des chars portés par des porte-chars. L’armée espagnole, refusant d’être humiliée de cette façon par le palais royal, a un sursaut d’orgueil. Elle menace de tirer sur les marcheurs et sur les militaires qui les accompagnent.
Mais le coup de bluff de Hassan II a marché. Son opinion croit au succès — qui n’en a jamais été un — de son coup de poker. Il arrête à temps les marcheurs pour échapper à une humiliation face au Tercio, la fameuse légion étrangère espagnole.Il n’en transforme pas moins cet échec en victoire et elle est célébrée comme telle chaque année par le Maroc. Mais Rabat, par son expansionnisme d’un autre âge, venait de détruire la fragile unité maghrébine naissante.
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