Pour
Naser Khader, ancien membre du Parlement danois d'origine syrienne,
«les islamistes radicaux sont les nazis de l'islam». Il estime que les
musulmans sont à même de les combattre.
Ce dimanche, dans le New York Times,
23 intellectuels musulmans influents des États-Unis, du Canada et de
Grande-Bretagne, soutenus par le Gatestone Institute, ont signé un appel
vibrant à une «réforme de l'islam».
«Que peuvent faire les musulmans pour se réapproprier leur “belle
religion”», s'interrogent-ils, soulignant que les massacres, les
décapitations et mutilations perpétrés par l'État islamique, les prises d'otages de jeunes filles innocentes orchestrées par Boko Haram ou la mise en esclavage de chrétiens en Irak sont autant de crimes menés au nom d'Allah. «Notre déni et notre silence relatif doivent cesser», écrivent ces personnalités.
«Nous
devons nous engager dans la promotion de réformes quand nécessaire, y
compris une réinterprétation honnête et critique des écritures et de la
charia, utilisées par les islamistes pour justifier la violence et
l'oppression.» «La théocratie est un échec prouvé», disent-ils encore.
«Le chemin vers la justice et la réforme doit se faire à travers la
liberté», ajoutent ces musulmans
laïcs, dévoués à la cause de la démocratie. Un propos bien éloigné du
discours généralement entendu dans le monde musulman, selon lequel
l'islam n'a rien à voir avec les dérives terroristes de certains de ses
membres.
Parmi les signataires, se trouve notamment Naser Khader,
un ancien membre du Parlement danois, d'origine syrienne, qui y a créé
une association «des démocrates musulmans» pendant la crise des
caricatures de 2006. Aujourd'hui chercheur au Hudson Institute de
Washington, Khader est bien placé pour mesurer la gravité du défi qui se
pose à l'Occident et à l'ensemble du monde musulman. Il a été très
actif après 2006 au Danemark pour défendre le point de vue des musulmans
laïcs contre la domination médiatique des radicaux islamistes. «J'en
avais marre de leur monopole sur ce que doit être l'islam, c'était
toujours eux que les journalistes allaient interviewer dans les
mosquées, mais nous, les musulmans laïcs, avons notre mot à dire.» Il
connaissait très bien les journalistes de Charlie Hebdo pour
avoir témoigné à leur procès et aussi reçu un prix de la laïcité de la
Mairie de Paris, dans le jury duquel figuraient presque tous les
journalistes de Charlie.
La démocratie doit venir avant la religion
«J'ai
essayé de créer des ponts. Ce que j'ai toujours expliqué aux musulmans,
c'est que les Danois n'aiment pas ceux qui haïssent la liberté. Mais si
vous êtes pour la liberté, vous serez toujours bien accueilli. Le fossé
n'est donc pas entre promusulmans et antimusulmans, mais entre
démocrates et antidémocrates», affirme Khader. «La démocratie doit venir
avant la religion comme principe organisateur de la société», ajoute
cet homme qui reçoit régulièrement des menaces de mort.
Naser
Khader sait que seulement 20 % des musulmans danois sont d'accord avec
lui, selon un sondage réalisé il y a quelques années. Mais il insiste
pour qu'«une bataille s'engage à l'intérieur de la maison islam» afin
que prévalent ces idées. «Pour moi, les islamistes radicaux sont les
nazis de l'islam. Les gens les mieux placés pour les combattre sont les
musulmans, nous devons être en première ligne. Actuellement, mon camp
est petit, de même que celui des extrémistes, et au milieu il y a 80 %
de gens passifs et silencieux, qu'il faut convaincre de nous rejoindre
pour mener cette révolution», analyse l'ancien député, soulignant que
pas un religieux n'a signé son appel pour l'instant.
Naser Khader affirme qu'Obama et Hollande«n'aident
pas» en répétant sans cesse que les terroristes n'ont rien à voir avec
l'islam. «Je ne suis pas d'accord. C'est l'islam aussi. En refusant de
le reconnaître, les Occidentaux ne nous rendent pas service, à nous les
musulmans démocrates. Car comment se battre si on n'identifie pas
clairement l'ennemi?» Naser Khader se dit en revanche favorablement
impressionné par les récentes déclarations du président égyptien al-Sissi qui
a appelé à une révolution dans l'islam. «Il faut qu'il aille plus loin,
dit-il. Qu'il explique qu'on ne peut continuer de tolérer que les juifs
soient traités de singes et les chrétiens de cochons dans les mosquées
égyptiennes.» «Il est très important que le pouvoir politique donne
l'exemple, car les grands centres théologiques comme l'université
al-Azar ne bougeront que s'ils se sentent soutenus», conclut Khader.
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