http://telquel.ma/2014/07/03/histoire-justice-selon-hassan-ii_141206
3 juillet
16:04
2014
Arrestations abusives, procès iniques, jugements lourds et sévères… Hassan II a utilisé la justice pour renforcer son pouvoir et fragiliser son opposition. Retour sur quelques procès politiques où l’ombre du roi planait sur les salles d’audience.
« Il y a deux manières de combattre, l’une avec les lois, l’autre
avec la force. La première est propre aux hommes, l’autre nous est
commune avec les bêtes. Un prince doit combattre avec ces deux espèces
d’armes », écrivait Machiavel dans son célèbre livre Le Prince.
Hassan II a fait de cette formule un style de gouvernement et un
fondement de son pouvoir. La violence politique et l’usage de la loi se
confondaient chez le monarque pour ne faire qu’un. Il n’avait aucun état
d’âme à les utiliser quand il fallait affronter un adversaire trop
menaçant et le terrasser. Pour lui, les tribunaux étaient une extension
du domaine de la lutte pour la conquête du pouvoir. Alors que son père
Mohammed V, symbole de l’indépendance, n’a jamais utilisé la justice
pour museler l’opposition, Hassan II n’hésitera pas à le faire. Dès le
début de son règne, il met les juges au service de son désir de
domination. Les décennies 1960 et 1970 sont fortement marquées par le
grand nombre de procès destinés à fragiliser l’opposition et la réduire
au silence. Déjà en 1963, un an après son intronisation et deux mois
après les premières élections législatives sous son règne, le souverain
recourt à la justice pour affaiblir l’Union nationale des forces
populaires (UNFP), principal parti d’opposition, dont les principaux
dirigeants sont arrêtés et jugés. Ils sont accusés de complot contre le
roi et d’atteinte à la sûreté de l’État. Juriste de formation, Hassan II
souhaite donner, à travers ce procès, un semblant de légalité à un pur
processus de répression politique. Depuis cette date, ce procédé s’est
inscrit dans la pratique du pouvoir par Hassan II. Les leaders de
l’opposition passent plus de temps devant les juges et dans les salles
d’audience que dans les locaux de leurs partis. Les photos de Abderrahim
Bouabid, Abderrahmane Youssoufi, Fqih Basri ou Omar Benjelloun traînés
devant les tribunaux du royaume font partie du panthéon de la gauche au
Maroc. Cette instrumentalisation du pouvoir judiciaire à des fins
politiques atteint, à la fin du règne de Hassan II, des dimensions
pathétiques et d’un autre âge, notamment avec la campagne
d’assainissement, en 1996. Lors de cet épisode, les destins d’individus
et de familles sont détruits par une justice aux ordres, qui n’est qu’un
pion dans un immense jeu de pouvoir où se disputent des courants rivaux
au sein de l’État. Des exemples qui nous rappellent que la réforme de
la justice et l’affirmation de son indépendance sont plus qu’une
nécessité. Sinon, l’histoire risque de se répéter.
Le complot de juillet 1963
• Verdict : 102 personnes poursuivies et 11 condamnations à mort
• Les stars : Abderrahim Bouabid et Mohamed Tber à la défense
• Procureur : Abdelmajid Benjelloun
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