Interview publiée dans la Marseillaise le 30/07/2013 - propos recueillis par Léo Purguette
Coordinatrice des députés du Front de gauche au sein du groupe
Gauche unie européenne-gauche verte nordique au Parlement européen, Marie-Christine Vergiat est élue du grand Sud-Est.
Militante des droits de l’Homme et parlementaire attachée à la coopération
entre les peuples, elle est membre de la délégation pour les relations avec le
Maghreb et revient tout juste d’une visite en Hongrie.
Une nouvelle expulsion d’un camp de
Roms a eu lieu récemment à Marseille. De manière générale, quel regard
portez-vous sur la politique menée à leur égard depuis le changement de
majorité ?
Je
fais partie de ceux qui ont appelé sans états d’âme à voter François Hollande
pour battre Nicolas Sarkozy, dont le fameux discours de Grenoble avait donné
lieu à une prise de position du Parlement européen. Malheureusement, dans les
faits les expulsions collectives se poursuivent sans prendre en compte le
respect des droits fondamentaux de citoyens qui sont européens.
Les Roms représentent entre 10 et 15 000 personnes en France. Il faut prendre le problème à bras le corps avec une stratégie nationale d’insertion qui s’inscrit dans un cadre européen. Celle qui avait été définie sous Nicolas Sarkozy est restée inchangée. La seule chose qui ait bougé, c’est une circulaire.
Mais elle peine à être appliquée en fonction des départements. Il ne suffit pas d’écrire des textes, il faut les mettre en oeuvre. Je ne peux me satisfaire de la situation, d’autant que la France ne cesse de se proclamer patrie des droits de l’Homme.
Les Roms représentent entre 10 et 15 000 personnes en France. Il faut prendre le problème à bras le corps avec une stratégie nationale d’insertion qui s’inscrit dans un cadre européen. Celle qui avait été définie sous Nicolas Sarkozy est restée inchangée. La seule chose qui ait bougé, c’est une circulaire.
Mais elle peine à être appliquée en fonction des départements. Il ne suffit pas d’écrire des textes, il faut les mettre en oeuvre. Je ne peux me satisfaire de la situation, d’autant que la France ne cesse de se proclamer patrie des droits de l’Homme.
Vous revenez de Hongrie, où les Roms
sont pris pour cibles par la droite extrême et l’extrême-droite. Quel est votre
sentiment sur la situation politique de ce pays membre de l’Union européenne ?
Je
suis partagée entre inquiétude, rage et impuissance. J’ai constaté la main-mise
croissante de Victor Orban et de son parti, le Fidesz, sur les institutions,
l’administration mais aussi l’économie. Elle s’accompagne d’atteintes à la
liberté d’expression et aux droits des minorités. Victor Orban utilise un
rapport de l’Union européenne sur la situation des droits de l’Homme dans son
pays pour diaboliser l’Europe. Il est pourtant lui-même l’un des dirigeants du
Parti populaire européen (PPE) qui fédère la droite du continent et dont est
notamment membre l’UMP. Après plusieurs modifications constitutionnelles et un
changement de mode de scrutin
pour les élections à venir, les Hongrois que j’ai rencontrés se montrent désabusés. Le Fidesz, qui est en perte de popularité, court après un parti d’extrême droite antisémite, le Jobbik. Le parti socialiste ne constitue pas une alternative et la gauche de la gauche est très divisée... Quant à l’Union européenne, qui se gargarise avec les droits de l’Homme et donne des leçons au monde entier, elle renonce à utiliser ses prérogatives en la matière vis-à-vis d’un pays membre ! Cette situation est d’autant plus révoltante qu’elle se double d’une grande urgence sociale.
En Hongrie, 40% de la population vit sous le seuil de pauvreté et un million de personnes subit l’extrême pauvreté.
pour les élections à venir, les Hongrois que j’ai rencontrés se montrent désabusés. Le Fidesz, qui est en perte de popularité, court après un parti d’extrême droite antisémite, le Jobbik. Le parti socialiste ne constitue pas une alternative et la gauche de la gauche est très divisée... Quant à l’Union européenne, qui se gargarise avec les droits de l’Homme et donne des leçons au monde entier, elle renonce à utiliser ses prérogatives en la matière vis-à-vis d’un pays membre ! Cette situation est d’autant plus révoltante qu’elle se double d’une grande urgence sociale.
En Hongrie, 40% de la population vit sous le seuil de pauvreté et un million de personnes subit l’extrême pauvreté.
Quelle est votre réaction après
l’assassinat de Mohamed Brahmi en Tunisie en tant que membre de la délégation
pour les relations avec le Maghreb ?
C’est
la stupeur et la consternation. Le gouvernement dominé par Ennahda nous
explique que son assassin présumé serait le même que celui de Chokri Belaïd et
qu’il aurait utilisé la même arme. C’est à peine croyable. C’est à ce genre de
salafistes qui manient la violence et terrorisent la population que la police
et la justice tunisiennes devraient s’en prendre, plutôt qu’aux démocrates qui
osent critiquer le régime - à commencer par Amina, la jeune Femen en détention.
Comme en Egypte, les attentes sociales qui étaient à la source des révolutions
arabes demeurent insatisfaites. L’Union européenne et la France en portent une
part de responsabilité car rien n’a été fait pour accompagner la transition
démocratique et le développement de la Tunisie. L’accord de partenariat est
resté exactement le même que sous Ben Ali avec au menu : libéralisation des
services et de l’agriculture.
Or, on le sait bien, ce type d’accord ne bénéficie à aucun des peuples des deux rives. Il servent exclusivement les grandes firmes qui en profitent pour faire grossir
leurs profits.
Or, on le sait bien, ce type d’accord ne bénéficie à aucun des peuples des deux rives. Il servent exclusivement les grandes firmes qui en profitent pour faire grossir
leurs profits.
Est-ce pour vous la même philosophie
qui motive le projet de marché transatlantique ?
Oui, c’est la raison pour laquelle les députés européens du Front de gauche ont refusé de voter le mandat de négociation. Nous avons été les seuls avec les Verts. Cet
accord Union européenne-Etats- Unis ne doit pas être combattu de manière isolée : un accord de libre-échange Union européenne- Canada est en cours de discussion.
Il comporte les mêmes dangers et pourrait offrir une porte d’entrée aux Etats-Unis puisque ils sont eux-mêmes liés au Canada par l’Accord de libre échange Nord-Américain (Alena). Il faut savoir que c’est l’Union européenne qui est à l’origine de ces négociations avec l’objectif de permettre aux grandes entreprises européennes de contenir la concurrence des pays émergents. Or, ces entreprises sont des multinationales qui n’ont plus que leurs sièges sociaux en Europe et qui pratiquent « l’optimisation » pour ne pas dire l’évasion fiscale. Elles ne contribuent en rien au développement de l’emploi ou aux recettes publiques et ne poursuivent qu’un seul but : maximiser les dividendes de leurs actionnaires.
Pendant ce temps-là, l’Europe s’enfonce dans la pauvreté. Entre 2008 et 2013, le taux de pauvreté est passé de 18 à 22%. C’est exponentiel.
Personne n’en parle et ça me rend folle de rage. En imposant au nom du pacte de stabilité le démantèlement du code du travail, la casse des services publics et des retraites, les politiques d’austérité aggravent la situation. Face à cela et au danger de l’extrême droite, nous affirmons qu’une autre politique est possible. C’est ce que le Front de gauche portera lors des élections de 2014.
Oui, c’est la raison pour laquelle les députés européens du Front de gauche ont refusé de voter le mandat de négociation. Nous avons été les seuls avec les Verts. Cet
accord Union européenne-Etats- Unis ne doit pas être combattu de manière isolée : un accord de libre-échange Union européenne- Canada est en cours de discussion.
Il comporte les mêmes dangers et pourrait offrir une porte d’entrée aux Etats-Unis puisque ils sont eux-mêmes liés au Canada par l’Accord de libre échange Nord-Américain (Alena). Il faut savoir que c’est l’Union européenne qui est à l’origine de ces négociations avec l’objectif de permettre aux grandes entreprises européennes de contenir la concurrence des pays émergents. Or, ces entreprises sont des multinationales qui n’ont plus que leurs sièges sociaux en Europe et qui pratiquent « l’optimisation » pour ne pas dire l’évasion fiscale. Elles ne contribuent en rien au développement de l’emploi ou aux recettes publiques et ne poursuivent qu’un seul but : maximiser les dividendes de leurs actionnaires.
Pendant ce temps-là, l’Europe s’enfonce dans la pauvreté. Entre 2008 et 2013, le taux de pauvreté est passé de 18 à 22%. C’est exponentiel.
Personne n’en parle et ça me rend folle de rage. En imposant au nom du pacte de stabilité le démantèlement du code du travail, la casse des services publics et des retraites, les politiques d’austérité aggravent la situation. Face à cela et au danger de l’extrême droite, nous affirmons qu’une autre politique est possible. C’est ce que le Front de gauche portera lors des élections de 2014.
Nous
disons : peuples d’Europe, travaillons ensemble
pour changer de cap.
http://www.eurocitoyenne.fr/content/votre-deputee/interview-pour-la-marseillaise-leurope-senfonce-dans-la-pauvrete
Eurocitoyenne
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