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samedi 12 janvier 2013

Scandale ! Le PJD rejette une proposition de loi criminalisant tout rapport sexuel avec les mineures

 

Le PJD a eu le dernier mot au parlement. Mardi soir, il a fait montre de son autorité en rejetant un amendement présenté par l’USFP visant à protéger les filles mineures de viol ou d’actes sexuels.
Au Maroc, les violeurs de filles mineures sont, et jusqu’à nouvel ordre, protégés par la loi à condition de se marier avec leurs victimes. Les députés en ont, ainsi, décidé. Les « élus de la nation » ont fait la sourde oreille aux demandes exprimées par la société civile, au lendemain du suicide d’Amina Filali, mars dernier, d’abroger l’article 475 du code pénal.
Mardi soir à la commission de la Justice à la Chambre des représentants, une forte coalition conduite par les islamistes du PJD, dont le nombre est de 15 sur 30, a rejeté à une majorité écrasante, 12 contre, 3 pour et une seule abstention, une proposition d’amendement présentée par le groupe de l’USFP tendant à criminaliser tout rapport sexuel avec une mineure même si elle est consentante. Les socialistes souhaitaient le mettre au même rang que le viol.

 L’USFP compte actualiser sa proposition
Dans des déclarations à Yabiladi.com, la députée USFPiste Rachida Benmesaoud assure que l’initiative de son groupe parlementaire « est parfaitement en phase avec la dynamique créée par l’adoption de la constitution du 1er juillet 2011, accordant, d’une part, à l’opposition un rôle très important et d’autre part en insistant sur la présentation chaque mois d’une proposition de loi par les députés ». Et d’ajouter que l’amendement des socialistes « vise essentiellement à protéger les filles mineures contre toute atteinte à leur dignité. Malheureusement, les parlementaires avaient une autre opinion ».

A notre question de savoir si l’USFP compterait soumettre, de nouveau, sa proposition au vote, Mme Rachida Benmesaoud n’écarte pas cette possibilité à condition de « l’actualiser ». Outre, l’article 475 du code pénal, les socialistes ont dans le viseur le Code de la famille. Ils veulent introduire des amendements sur la Moudawana de 2004, annonce la députée.

L’opposition en rangs dispersés
Ce rejet atteste, encore une fois, de la division des partis de l’opposition au sein de la Chambre des représentants. Même si la constitution, dans son article 10, lui garantit « un statut lui conférant des droits à même de lui permettre de s’acquitter convenablement de ses missions afférentes au travail parlementaire et à la vie politique » et lui assure "la présidence de la commission de la justice", elle n’est pas parvenue à imposer un amendement, et non l’abrogation comme le réclame les associations féminines, d’un article si décrié comme l’est le 475 du Code pénal.

http://www.yabiladi.com/articles/details/14857/maroc-rejette-proposition-criminalisant-tout.html

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Najat Aadil: «Nous ne lâcherons pas l'affaire jusqu’à l’abrogation de la loi marocaine sur le viol des mineures»

Entrevue par , Rédacteur en chef adjoint, membre de Tolerance.ca®, 26/3/2012
L’enseignante Najat Aadil est membre notamment du mouvement international Soroptimist qui œuvre à l’intégration professionnelle et sociale des femmes. Le suicide de l’adolescente Amina Al Filali en mois de mars a eu l’effet d’un électrochoc sur la société marocaine. 
 

Pour pousser à l’abrogation de l’article 475 du Code pénal qui avait permis à son violeur de la marier pour échapper à la réclusion ferme, un groupe, ''La marche des femmes libres'', s’est constitué sur Facebook, autour de la féministe Najiba Berrada, et a organisé, le 25 mars, un sit-in à Casablanca. Mme Aadil est son porte-parole. C’est à ce titre que nous nous sommes entretenu avec elle à ce propos. Entrevue réalisée par Aziz Enhaili pour Tolerance.ca ®.

Tolérance.ca: Quelle est la raison qui vous a poussée à lancer ''La marche des femmes libres''?
Najat Aadil: C'est devant ce drame choquant du suicide de la jeune Amina Al Filali qui a eu lieu le 10 mars 2012 qu'on a eu l'idée de protester contre cette loi indigne.
Cette mineure issue d'une famille modeste à Larache a été violée et mariée de force à son prédateur. Ce mariage qui a été approuvé par un tribunal conformément à l'article 475 du Code pénal qui stipule que «Quiconque, sans violences, menaces ou fraude, enlève ou détourne, ou tente d’enlever ou de détourner un mineur de moins de 18 ans, est puni de l’emprisonnement d’un à 5 ans et d’une amende de 120 à 500 dirhams (Alinéa 1). Lorsqu’une mineure nubile ainsi enlevée ou détournée a épousé son ravisseur, celui-ci ne peut être poursuivi qu’à la suite de la plainte des personnes ayant qualité pour demander l’annulation du mariage et ne peut être condamné qu’après que cette annulation du mariage a été prononcée (Alinéa 2)».
Si Amina est décédée aujourd'hui, c'est parce que la loi marocaine en vigueur a autorisé la cessation de toute poursuite contre son violeur qui l’a épousé (Art. 475). Sans oublier une disposition du Code de la famille (article 20) qui autorise le juge à marier les mineurs sous certaines conditions.

Tolérance.ca: En quoi consiste votre démarche de protestation contre cette loi autorisant le mariage d’une mineure avec son violeur?
Najat Aadil: Le décès d'Amina a provoqué une grande émotion au sein de la population et une indignation de la part des associations qui demandent l'abrogation de ces lois qui continuent à dénier toute humanité aux femmes; et poussent beaucoup d'entre elles au désespoir et par conséquent au suicide comme l'illustre le cas d’Amina.
Si nous avons appelé à un sit-in dimanche dernier, c'était pour exprimer notre colère envers une loi qui ne concorde pas avec les revendications féminines. C’est aussi notre manière de dire non à la fois à l'article 475 du Code pénal marocain et à l'article 20 du Code de la famille. Sans oublier le fait de manifester notre indignation envers ces pratiques législatives qui ne respectent nullement les droits de la femme marocaine.

Tolérance.ca: Quel est l’objectif de ''La marche des femmes libres''?
Najat Aadil: Nous cherchons à court terme à pousser les législateurs du pays à abroger ces deux articles et, à moyen ou long termes, à mobiliser tous les organismes concernés par cette question pour arriver enfin à faire en sorte que la culture de l’institution judiciaire répudie la misogynie qui continue de l’imprégner à ce jour.
Nous dénonçons la loi sur le viol et nous lançons, à cette occasion, un appel aux autorités concernées pour qu’elles révisent le Code pénal et se penchent également sur les dispositions du code de la famille.
Nous voulons une justice équitable envers les femmes.
Tolérance.ca: Quel est l’état réel de la situation de la violence contre les femmes au Maroc?
Najat Aadil: La violence à l'égard des femmes et des filles imprègne l’ensemble du tissu social. En ville comme en campagne! Avec la particularité de croître significativement dans les grandes villes. Ces violences sont diverses: psychologique, physique, sexuelle et légale. À ce chapitre, les violences conjugales arrivent en tête.
La violence contre les femmes au Maroc représente le plus grand scandale de notre époque en matière de droits humains. De la naissance à la mort, en temps de paix comme en temps de guerre, les femmes sont confrontées à la discrimination et à la violence dont se rendent coupables l’État, la société ou la famille.
Chaque année, des centaines de femmes sont violées par leur compagnon, un proche, un ami ou un inconnu, par leur employeur ou un collègue. La violence au sein de la famille est un phénomène endémique. La très grande majorité des victimes sont des femmes et des filles.
Tolérance.ca: Pensez-vous qu’on va, à court terme, assister à l’abrogation de l’article 475 que les féministes marocaines décrivent (et décrient) comme étant à l’origine du suicide d’Amina Al Filali?
Najat Aadil: Absolument! Nous avons un grand espoir de voir cette loi abrogée. D’ailleurs, nous avons déjà eu la belle surprise de constater l'impact qu'a eu l’action de notre groupe au pays. Mais l’action de notre mouvement ne s’arrêtera pas là. C’est pourquoi nous envisageons dans le cadre de notre stratégie d’entreprendre d’autres démarches. Avec comme mot d'ordre ici: la sensibilisation à grande échelle.
Tolérance.ca: Comment s’est passé votre sit-in? Étiez-vous nombreux? Cela s’était déroulé comme vous l’espériez?


Najat Aadil: Le dimanche 25 mars 2012, à 15 heures, différents acteurs étaient présents à Place Mohammed-V. De nombreuses femmes, de nombreuses associations, ainsi que des citoyens de différents âges et catégories sociales. Ils étaient tous là en mémoire d'Amina Al Filali et en signe de soutien à toutes les autres victimes d'une loi inique qui facilite, de facto, la prédation sexuelle. Sans crainte ni limite!
Ont pris également part à ce sit-in de nombreux hommes. Cette participation très appréciée a montré que de nombreux hommes marocains veulent eux aussi que l’on abroge ces lois misogynes. Il fallait les voir, tous fiers, crier, de toutes leurs forces: ''on veut le changement de la loi'', ''on veut l'égalité'', ''on veut que la femme soit protégée,'' etc.
Ce sit-in a été un franc succès. On y est arrivés grâce à l’œuvre collective de l'équipe organisatrice et à la collaboration, bon enfant, des personnes participantes.
Cela dit, qu’on ne fasse pas l’erreur, en face, de croire que nous allons rentrer chez nous et passer à autre chose... Tant et aussi longtemps que cette loi inique reste en vigueur, nous ne lâcherons pas l'affaire. Nous le devons à la mémoire d’Amina Al Filali et à toutes les Amina passées et à venir. Le changement n’est pas une option parmi d’autres. C’est la seule option acceptable. D’ici là, nous continuerons notre travail d’éducation du peuple et de sa mobilisation. Notre pression sur le gouvernement et sur les instances politiques et législatives ira donc crescendo…
Entrevue réalisée par Aziz Enhaili pour Tolerance.ca®.

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