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mardi 15 décembre 2009

Solidarité de la fédération du Tarn du PCF avec les 850 ouvriers en grève de l’entreprise nationale marocaine OCP

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Par solidarité avec les 850 ouvriers en grève de l’entreprise nationale marocaine OCP, contre leur licenciement sans raison aucune, sauf tirer profit au maximum par le patronat du travail de ces ouvriers, nous avons réalisé cet entretien afin de donner un éclairage sur les questions ouvrières dans le monde et aussi participer à notre niveau à informer le grand public. Nous remercions le camarade Ali Fkir coordinateur du Comité de solidarité, pour son engagement et à travers lui nous adressons notre soutien à tous les ouvriers en grève et à leurs familles et nous saluons leur courage et leur lutte
Entretien réalisé par Moha OUKZIZ responsable fédéral aux questions internationale du PCF Tarn, 11/12/2009
Ali Fkir, l’OCP, est le premier producteur mondial du phosphate, cet une grande entreprise publique, une fierté nationale. Est ce que vous pouvez nous parler de ce géant.
Son chiffre d’affaires, le nombre du personnel y compris les ouvriers, son capital. Ses sites de production ? Données officielles de 2008 :
Création de l’OCP : 1920
Création du groupe OCP : 1975 - transformé en SA en 2008
Réserve de phosphate : 3⁄4 des réserves mondiales
Production : Phosphates et dérivés phosphatés (acide phosphorique, engrais)
Sites de production : * Phosphate : Khouribga, Benguerir, Youssoufia, Boukraâ-laâyoune : 1 – Khouribga : réserves estimées à 35 milliards de m3 2 – Youssoufia : réserves estimées à 10,2 milliards de m3 3 – Benguerir pas de données 4 – Boucraâ-layoune (Sahara occidental) : réserves estimées à 1,13 milliards * dérivés : Safi, Jorf Lasfar (Eljedida)
ports d’embarquement :Casablanca, Jorf Lasfar, Safi, Laâyoune
effectif : 18 000 dont 6% ingénieurs et équivalents (il s’agit certainement des travailleurs "légaux")
Production marchande de phosphate : 24,45 millions de tonnes - Production de phosphate : 27,16 millions de tonnes - Part du Groupe OCP dans le total des exportations marocaines : 33 % (en valeur) - Chiffre d’affaires à l’export : 6,9 milliards de dollars usa (il s’agit certainement de CA déclaré officiellemen) - Parts de marché à l’international : •Phosphate : 40% •Acide phosphorique : 38.4% • Engrais : 8.4%
La vie syndicale et les conditions de travail des ouvriers au sein du groupe ?
Le syndicalisme au sein de l’OCP est très faible, caractérisé par la division. Il y a au Maroc plus de 20 syndicats nationaux légaux liés aux partis réactionnaires et aux partis de gauche plus au moins domestiquée. Seul l’UMT (Union Marocaine du Travail), le plus ancien syndicat ( et le premier par nombre d’adhérents), garde relativement son autonomie. Le taux de syndicalisation au Maroc ne dépasse pas 10% Les salaires sont relativement élevés, des acquis sociaux importants, et cela grâce à des luttes héroïques dans le passé (des grèves illimitées qui avaient duré des mois.) Dans le temps il n’ y avait que l’UMT. Mais les « charges sociales » de l’OCP restent insignifiante en comparaison de la colossale masse de plus-value extorquée par l’OCP. Il y a une véritable surexploitation des mineurs par l’OCP. Seuls les salariés titularisés bénéficient de ces conditions relativement acceptables ; or l’OCP surexploite les milliers de temporaires. Depuis quelques temps il fait appel aux sociétés d’intérim pour l’exécution d’un certain nombre de travaux dans des conditions précapitalistes.
Dans quelle filière travaillent les 850 ouvriers licenciés et en grève ? et dans quelles conditions ?

La majorité de ces 850 victimes travaillaient dans la production directe (dans les galeries ou à ciel ouvert), mais il y a des chaudronniers, des mécaniciens, des chauffeurs, des soudeurs, des informaticiens, des comptables,…
Depuis quand la grève a commencé ?
Le bureau syndical a été constitué légalement en avril 2009, licenciement de 150 en juillet dont les membres du bureau syndical non reconnu par la direction de l’OCP. En Août, licenciement du reste.
Quand et pourquoi le comité de soutien ?
Le comité de solidarité avec les ouvriers de SMESI (CSOS) a été constitué officiellement en octobre 2009, son objectif principal se résume dans les points suivants :
La solidarité morale
Faire connaître les soubassements de la décision arbitraire de l’OCP
Mobiliser l’opinion publique contre ce licenciement abusif
Dénoncer la connivence OCP-Etat marocain
Appuyer les décisions des 850 victimes et se mobiliser pour les faire réussir
De qui est composé ce comité ?
Le comité comprend 20 personnes dont 5 représentants des ouvriers licenciés (4 font partie du bureau syndical de SMESI-UMT), des journalistes, des avocats, des syndicalistes (UMT et CDT), des militants des droits humains et des militants associatifs. Les membres du comité sont là à titre personnel. Il n’y a pas de représentativité organisationnelle.
Quelle est la réaction du patronat et de l’Etat marocain ?
Le patronat en général fait comme s’il n’est pas concerné. Chaque patron a ses conflits sociaux personnels : c’est la « saison » des pratiques illégales dont les victimes ne sont autres que les travailleurs et travailleuses qui ont trimé pendant des années et qui se voient aujourd’hui jeté-es à la rue comme de simples machines amorties
Est ce que vous coordonnez avec le syndicat local représentant des ouvriers ? Le syndical des ouvriers est représenté dans le comité de solidarité (5 victimes parmi les 20 membres du comité). La coordination avec les camarades responsables de l’UMT à Khouribga est continue. Car c’est grâce à eux que les 850 prolétaires ont pu gagner à travers tout le Maroc le soutien et la solidarité des militants épris de justice.
Quelle implication/soutien des syndicats et partis politiques aux grévistes ?
A part l’UMT et quelques sections de la CDT , la solidarité syndicale n’a pas fonctionné. Des calculs mesquins empêchent le développement du mouvement solidaire au sein de la classe ouvrière. Quant aux forces politiques et à part ANNAHJ ADDIMOCRI ( la Voie démocratique), elles ont brillé par leur mutisme. La VD exprime sa solidarité avec les victimes de l’arbitraire de l’OCP dans ses communiqués, assure la couverture de leur résistance par son « journal officiel », par son « journal électronique »… L’AMDH (l’association marocaine des droits humains) joue un rôle important dans le mouvement de solidarité avec les ouvriers de SMESI. Elle a interpellé officiellement les différents responsables de l’Etat concernés par ce conflit.
Quelles sont les réactions du maire de Khouribga et des acteurs de la ville et de la région ?
Au Maroc, le maire (le président du conseil municipal de Khouribga), les autres « élus », les notables, les autorités locales, tout ce beau monde « bouge sur commande » (c’est-à-dire selon les instructions) du ministère de l’intérieur qui, lui-même fonctionne sur ordres qui viennent du palais. La ville est quadrillée. Les persécutions, les intimidations constituent le pain quotidien des ouvriers, et de toutes les autres victimes du système en place.
Les familles des ouvriers sont présentes sur les lieux des manifs, est ce qu’elles sont soutenues dans leur démarche. Sinon quels sont les besoins ?
Les familles des 850 prolétaires, victimes de l’arbitraire vivent économiquement et socialement un véritable drame. Les enfants sont perturbés dans leurs études, les bébés sans lait, les malades sans soins ( les 850 ne bénéficient pas de couverture sociale, ni d’assurance maladie). Des milliers de personnes vivent à Khouribga la situation décrite par Emile Zola dans GERMINAL.
Les medias marocains traitent-ils la grève ou alors le silence radio ?
La presse indépendante et certains journaux partisans tels « ANNAHJ ADDIMOCRATI » de la VOIE DEMOCRATIQUE , « Bayane Alyoume", version arabophone du PPS (parti du progrès et du socialisme » assurent relativement bien la couverture de la résistance ouvrière. Pas un mot dans les medias officiels.
Est ce que les syndicats envisagent et étudient les possibilités d’élargir l’action de grève aux autres ouvriers du groupe OCP par exemple, qui sont pour le moment en dehors de l’action. ?
C’est difficile pour le moment
L’unité syndicale et l’engagement auprès des ouvriers est une réelle problématique…Quoique ces derniers temps, les salariés fassent preuves de courage et de combativité et manifestent une résistance non négligeable ?
L’esprit de solidarité n’est pas développé. On peut expliquer cela par la précarité du travail (l’armée de réserve en force de travail dépasse de loin les besoins potentiels de l’économie nationale dans le cadre du système capitaliste dominant), la faiblesse du taux de syndicalisation (moins de 10%), les blocages bureaucratiques, la faiblesse/l’hésitation d’une partie de la gauche, la méfiance qui caractérise les rapports de la classe ouvrière avec la « politique », la faiblesse de la prise de conscience de classe…
La crise du capitalisme accentue l’exploitation et le licenciement au sein des salariés, quelle réflexion syndicale et politique portez-vous en tant que militant communiste ?
Les militants épris de justice en général, les militants communistes en particulier doivent se mobiliser pour développer chez les travailleurs l’esprit du syndicalisme ( dans le cadre des syndicats militants :UMT et CDT), l’esprit de solidarité, pour cultiver l’idéologie de la classe ouvrière…Tout ce travail nécessite un travail de longue haleine, de persévérance, un travail de profondeur, loin des dérives de l’attentisme d’un côté et de l’aventurisme de l’autre. Mais il ne faut pas hésiter à soutenir énergiquement les luttes des travailleurs, des exploités et de tous les opprimés. La solidarité active doit être une constante dans notre pratique quotidienne. D’un côté, c’est la raison de notre existence, et d’un autre côté, c’est le meilleur moyen de gagner la confiance des travailleurs qui ont été trahis par plus d’un.
Est ce que les communistes marocains et la gauche dans son ensemble travaillent pour changer le rapport de force et quelles sont les difficultés ?
La gauche est traversée par deux grands courants : une gauche qui mise sur le makhzen, et sur la stratégie du changement de l’intérieur des institutions mises en place par le palais. Cette gauche joue le rôle des pompiers : elle est là pour secourir le makhzen chaque fois que « sa maison prend feu » ; il y a une autre gauche qui mise essentiellement sur la lutte déterminée des masses conscientes et organisées. Le salut ne peut venir que par là. Tout le monde prétend vouloir changer les rapports de forces. Le problème qui se pose, c’est comment, "Que faire" selon Lénine.
D’autres entreprises et lieux de travail et production connaissent des mouvements de grève et de protestation, quel bilan pouvez-vous dresser ?
Au Maroc d’aujourd’hui la résistance populaire s’intensifie. Mais globalement cette résistance reste spontanée. Les semi-prolétaires (les journaliers, les marchands ambulants, les paysans pauvres, les petits métiers, les travailleurs du secteur informel…) constituent la majorité des travailleurs, ces semi-prolétaires et avec les associations des chômeurs diplômés, mènent des combats dures et sont à l’origine des Intifadas de ces dernières années : Sefrou en 2007, Sidi Ifni en 2008…Ils faut que les marxistes (au Maroc on parle plus de marxistes et de marxistes léninistes que de communistes. Bine sûr que ces marxistes et marxistes léninistes se réclament du communisme. C’est une tautologie ! ), soient conscients de cette réalité. C’est pourquoi au niveau d’ANNAHJ on parle de forger dans le feu de la lutte de classe le parti de la classe ouvrière et de l’ensemble des travailleurs La formation sociale marocaine diffère beaucoup de celle de la France par exemple.
La crise mondiale du capitalisme est bien visible et réelle chez vous ?
Elle est visible surtout au niveau des exportations (textile, les agrumes, les primeurs…), au niveau du tourisme, au niveau des « envois financiers » des marocains résidants à l’étranger, au niveau des investissements étrangers au Maroc.
Force est de constater que la solidarité internationale fait défaut au plan syndical et politique, qu’est-ce vos suggérez et quels sont vos souhaits ?
Effectivement, le mouvement ouvrier international traverse actuellement une crise qui est due à plusieurs facteurs que je ne peux aborder ici. A mon avis, ce n’est qu’une crise conjoncturelle qui peut durer des décennies si les militants n’arrivent pas à diagnostiquer dialectiquement selon la méthode du matérialisme historique, les causes de ce relâchement et à trouver les moyens de relancer la solidarité internationaliste, syndicale et politque. Mais les initiatives ponctuelles, partielles… peut retisser petit à petit des liens prometteurs. Ce que nous faisons actuellement ( au Maroc, en Espagne, en France, en Italie…) avec les ouvriers de SMESI constitue des grains de semence pour un avenir meilleur.


Message de soutien envoyé par courrier électronique
Au Camarade Ali Fkir Coordinateur du Comité de solidarité des 850 ouvriers en grève de l’entreprise OCP Maroc,
Cher camarade,
La Section du Parti Communiste d’Albi du département du Tarn, région Midi-Pyrénées (France), est solidaire des 850 ouvriers en grève de l’entreprise nationale marocaine OCP, qui luttent contre leur licenciement ; Nous adressons notre soutien au comité de solidarité et surtout à tous les ouvriers en grève et à leurs familles et nous les saluons pour leur courage et leur détermination.
Le secrétaire de la section du Parti Communiste d’Albi
Jo. Hernandez
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