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dimanche 1 février 2015

Un an de brouille entre la France et le Maroc


  François Hollande accueilli à Casablanca par le roi du Mohammed VI en 2012.



En riposte aux plaintes pour torture à l’encontre de dirigeants marocains, le ministère marocain de la justice poursuit l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture.
L’Acat, l’action des chrétiens pour l’abolition de la torture, qui mène un inlassable combat contre les pires violations des droits humains, se retrouve au banc des accusés, aux côtés de victimes de torture du régime marocain.
L’ONG est assignée à comparaître devant le tribunal de grande instance de Rabat le 26 février prochain dans le cadre d’une plainte pour « diffamation » et « utilisation de manœuvre et de fraude pour inciter à faire de faux témoignages ».

Plaintes pour torture

Le combat de l’ONG suscite la colère des autorités marocaines. En mai 2013, l’Acat a déposé une plainte pour torture au nom de la victime franco-marocaine Adil Lamtalsi auprès du tribunal de grande instance de Paris après que la victime détenue au Maroc a été transférée en France.
Adil Lamtalsi avait été condamné par la justice marocaine à dix ans de prison en 2008 pour trafic de stupéfiants « sur la base d’aveux obtenus sous la torture » selon l’Acat.
Le 20 février 2014, une nouvelle plainte était déposée devant la justice française et le comité contre la torture des Nations unies pour le cas de Naâma Asfari, Sahraoui de nationalité marocaine, pour les mêmes motifs.
Zacharia Moumni, l’ancien champion de boxe thaïe qui n’a de cesse de demander des excuses pour avoir été torturé en 2010 – il a depuis lors été gracié et libéré – a également déposé plainte avec grand bruit à Paris.

Absence de coopération judiciaire

Ce même 20 février 2014, des policiers se sont rendus à la résidence de l’ambassadeur du Maroc à Paris pour délivrer une convocation au chef des services de renseignements marocains Abdellatif Hammouchi, directement visé dans ces plaintes, qui était de passage à Paris. Le courrier ne put être remis.
Mais le Maroc fut atteint au sommet. « La DST est une direction de souveraineté. Son patron nommé par le roi ne rend compte que devant le roi. Le palais s’est senti directement visé et humilié », explique Omar Brouksy, auteur de « Mohammed VI, derrière les masques » (1). Au point que le Maroc a rompu unilatéralement la coopération judiciaire entre les deux pays.
« Il n’y a plus de coopération entre les services judiciaires des deux pays pour les questions de terrorisme et de sécurité, mais aussi pour celles concernant les binationaux, les familles mixtes, qu’il s’agisse de mariage, divorce, garde des enfants, etc. », liste Joseph Breham, avocat de l’Acat.
Mais surtout selon lui, ce gel des relations judiciaires « empêche le transfèrement des dizaines de détenus au Maroc vers la France ». « Or nous attendons que les victimes soient sur le sol français pour déposer des plaintes », explique l’avocat.

Incidents

« Le Maroc prétend combattre la torture et communique beaucoup sur cette question, mais de fait il impose une omerta et poursuit les victimes pour dénonciation calomnieuse », ajoute Hélène Legeay, en charge du Maghreb à l’Acat.
Sur fonds de glaciation des relations, toute une série d’incidents ont conforté Rabat dans l’idée que la France n’était plus l’amie de toujours.
Après l’épisode Hammouchi – qualifié dans la forme de « maladresse évidente » selon un diplomate –, ce fut au tour du ministre marocain des Affaires étrangères Salaheddine Mezouar de voir ses bagages fouillés à Roissy en mars 2014, puis à un général hospitalisé au Val de Grâce de voir un ancien militaire qui l’accuse de meurtre faire irruption dans sa chambre.
« Un malheureux concours de malchance » dit-on dans l’entourage de Laurent Fabius qui a à plusieurs reprises fait des excuses au Maroc. Mais qui depuis cristallise la fâcherie.

« Principal soutien » du Maroc

Le Maroc a boudé la marche républicaine du 11 janvier. Et la visite de Salaheddine Mezouar vendredi 23 janvier a été reportée pour « se donner plus de temps pour régler les dossiers en souffrance », selon le porte-parole du gouvernement marocain.
Le nouvel axe franco-algérien n’est en l’occurrence pas le dernier des dossiers en souffrance. Rabat avait vu avec inquiétude l’arrivée des socialistes au pouvoir en France en raison de leur tropisme algérien. Et de fait « Paris et Alger vivent une lune de miel et resserrent leurs liens sur les terrains économique et sécuritaire », fait valoir l’historien Mohammed Hachémaoui.
« Mais les liens entre la France et le Maroc sont trop importants pour être suspendus, et en l’occurrence les enjeux sont sans doute encore plus déterminants pour le Maroc que pour la France, estime Omar Brouksy. La France est le principal soutien du Maroc dans le dossier du Sahara occidental ».
C’est d’ailleurs sur proposition du Maroc que le ministre de la justice Mustapha Ramid vient jeudi 29 janvier à Paris pour une réunion de travail avec Christiane Taubira afin de dénouer la crise.
Mercredi 28 janvier à l’Assemblée, Manuel Valls a appelé à « dépasser » cet épisode « basé sur de nombreuses incompréhensions ».
(1) Nouveau monde, 2014, 240 p., 16,90 €
29/1/15 - 12 H 50
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