Bladi-net, 25 /6/ 2014 -
Le langage ordurier utilisé par certains députés marocains sous la coupole de l’hémicycle exacerbe le Roi Mohammed VI. Le Souverain en a même fait part début juin au président du parlement Rachid Talbi Alami. Les Représentants de la nation sont désormais appelés à faire preuve de civisme et de travailler, au lieu de passer leur temps à s’insulter, si toutefois ils assistent déjà aux séances du parlement.
Le Roi a même manifesté sa colère
et son mécontentement quant à la bassesse du discours de certains
députés, qui ont transformé le parlement en une véritable arène, pour
échanger les accusations et le langage ordurier, au lieu de produire des
lois et de mettre en œuvre la Constitution.
Le Roi appelle les députés à travailler au lieu de s’insulter
C’est
en tout cas ce que rapporte le quotidien Akhbar Al Yaoum, qui cite une
audience accordée début juin par le Souverain au président du parlement,
au cours de laquelle le monarque a ordonné à Rachid Talbi Alami, d’appeler les députés à observer des règles de bonne conduite et de remplir les missions pour lesquelles ils ont été élus.
Mardi
dernier, Talbi Alami a transmis lors d’une réunion la colère et les
directives du Souverain aux présidents des groupes parlementaires. "Le
message est passé, mais les députés sauront-ils se retenir. Cela
m’étonnerait. Beaucoup de nos parlementaires ont des niveaux
intellectuels très bas et ne sont là que pour servir leurs propres
intérêts et bénéficier par la même occasion de l’immunité parlementaire.
Ce n’est un secret pour personne...", explique à Bladi.net un
politologue marocain requérant l’anonymat.
"Ils ont déjà du mal à
gérer une discussion normale. Comment voulez-vous qu’ils se comportent
au moins comme des adultes sensés, au lieu d’étaler leurs vies privées
sur la place publique... (...). L’unique soucis de certains est
d’accumuler les richesses tant qu’ils en ont l’occasion... ".
Les Marocains lassés de la classe politique vieillissante
"Les
Marocains se sont lassés aujourd’hui des batailles rangées opposant une
classe politique vieillissante avide de pouvoir et d’argent, dont le
discours n’interprète que fort bien l’état d’esprit... . "Le jeu de
cette élite politique n’est que trop flagrant. Le chantage, les
passe-droits et les élections unilatérales, dont les candidats succèdent
à eux-mêmes. On n’en voit pas trop l’utilité...", constate un autre
chercheur marocain.
Un élu communal de la région de Sidi Slimane, à 60 km de Kénitra
nous confie : "comment peut-on encore accepter par exemple qu’un jeune
homme, sans aucun passé militant, ni culture politique, ni fibre
sociale, soit parachuté du jour au lendemain dans le microcosme
politique, pour devenir député, alors qu’il ne connaît ni la réalité de
sa région, ni les électeurs qui ont voté pour lui. En quoi cela
servirait cette zone plongée dans la misère...?. Comment voulez-vous que
des personnes pareilles puissent parler correctement. Les députés
doivent être bien éduqués".
"Aujourd’hui, le Maroc a intérêt à cesser cette mascarade. Des élus dont certains sont analphabètes, qui ont acheté les voix
de leurs électeurs à coups de millions de DH, l’ont-ils fait pour
servir les intérêts du pays à votre avis ?. Des exemples d’élus
corrompus tombés en disgrâce rien que dans la région du Gharb sont
légion", conclut notre source.
Députés et analphabètes
"Si
les membres du parlement marocain ne participent pas au processus
législatif, c’est parce qu’ils sont incapables de prendre part à ce
débat, en raison de leur faible niveau d’instruction. (...), commente un
politologue tombé aujourd’hui en disgrâce.
Il faut bien que les
analphabètes soient représentés au parlement, sachant que près de 50% de
la population est analphabète...", plaisante notre source non sans
amertume.
La crise de vocabulaire dans le discours politique marocain
Un
universitaire marocain interrogé par Bladi.net estime pour sa part que
"la crise de vocabulaire dans le discours politique marocain, apparaît
surtout dans le fossé séparant de plus en plus le discours de l’action.
Aujourd’hui, il faut réévaluer l’action politique, la moraliser, et
produire un discours anticipant les attentes des citoyens... (...).
Ceci
reflète à mon point de vue la grave crise minant le microcosme
politique au Maroc. Je parle ici des partis de la majorité, mais
également de l’opposition.... . Le discours politique au Maroc n’est pas
un acte institutionnel, mais plutôt une pratique individuelle au
service malheureusement uniquement de la propagande partisane...".
Le discours du PJD irréaliste et populiste ?
"Le
discours de certains leaders du Parti Justice et Développement au
pouvoir (PJD), jugé simpliste et populiste, aurait pour objectif de
créer une symbiose avec les citoyens", affirment des militants du parti
islamiste. Un détracteur du PJD pense, au contraire, que le discours de
la formation politique est irréaliste et n’aurait pour but que de
séduire l’opinion publique à l’approche des scrutins électoraux.
"Le
mal provient des partis politiques qui désignent des mafieux. Un parti
mafieux ne peut désigner que des mafieux et le résultat est
malheureusement là", clamait haut et fort le défunt militant marocain Mohamed Mjid.
Abdelhadi
Khairat, membre du Bureau politique de l’Union socialiste des forces
populaires (USFP), avait affirmé en 2011, que beaucoup de parlementaires
marocains étaient poursuivis pour des crimes financiers, d’autres
seraient même impliqués dans le trafic de drogue.
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