|
Association
de Défense des Droits de l’Homme au Maroc
ASDHOM 79, rue
des Suisses 92000 Nanterre
|
|
Point
hebdomadaire n°50 sur la campagne de parrainage des prisonniers d’opinion au
Maroc, 14/1/2014
Les autorités marocaines ne
tolèrent, décidemment, pas que les citoyens se prennent en charge eux-mêmes et
expriment leur colère ou leur refus des situations, qui leur sont faites, à
travers des sit-in ou rassemblements pacifiques. Si, à chaque occasion, les
responsables marocains font montre au début d’une volonté de dialogue avec les
organisateurs de ces manifestations, ils finissent toujours par recourir à la
force pour les disperser. Chassez le naturel, il revient au
galop !
Au cours de nos points hebdomadaires, vous l’aurez remarqué,
nous avons signalé plusieurs cas où des mouvements de protestation populaire et
pacifique finissent par être dispersés violemment et se soldent par plusieurs
blessés et surtout par des arrestations et des poursuites judiciaires. C’est ce
qui s’est passé par exemple à Ifni, à Assa, à
Béni Bouayach, à Imider, à Tiflet, à Ksiba (Béni Mellal), etc. Dans
tous ces cas, l’approche sécuritaire a été privilégiée et les forces de l’ordre
n’ont pas fait dans le détail, ignorant totalement les règles élémentaires d’une
dispersion de manifestants. Nous disons cela et nous avons en tête les derniers
événements qui ont secoué Ait
Melloul, non loin d’Agadir, à la fin du mois de décembre 2013. Au
total, ce sont 159 ouvrier-ère-s
de deux sociétés locales, Sotemac (matériel agricole) et Evero (conserverie de
poison), qui ont été licencié-e-s pour avoir
constitué un bureau syndical (affilié à la CDT). Pour se défendre et réclamer leur
intégration, les ouvriers, soutenus par leurs familles et leur syndicat, ont
organisé un sit-in tout en entamant un dialogue avec les directions des deux
sociétés et les autorités locales. Le 26
décembre 2013 et sans aucun avertissement, les forces de l’ordre ont
donné l’assaut faisant 27 blessés (une femme enceinte a eu son bras cassé, une
deuxième a perdu son bébé et une troisième a eu une hémorragie en plus d’un coup
porté à l’œil qui s’est infecté, etc.) et 24
arrestations dont 15 ont aussitôt été libérés. Les 9 autres sont poursuivis. Une comparution
immédiate devant le tribunal d’Inzgane a eu lieu le 26 décembre 2013 et des
condamnations lourdes ont été prononcées ce qui a plongé les autres ouvriers,
les habitants d’Ait Melloul et leurs soutiens dans un désarroi
total.
Nous reviendrons sur ce dossier
pour signaler les noms des détenus et leurs condamnations. Mais, sachez
d’ores-et-déjà que l’ASDHOM
travaille avec d’autres associations amies de l’immigration marocaine à mettre
en place une campagne internationale de solidarité avec ces ouvriers licenciés
et pour réclamer la libération immédiate des détenus d’Ait
Melloul.
Arrêtons-nous maintenant sur
quelques informations relatives aux autres groupes de prisonniers politiques et
d’opinion que nous suivons depuis novembre 2012, date du lancement de notre
campagne de parrainage.
Groupe
Imider-Mineurs : Nous restons toujours sans
nouvelles des deux militants, Hamid Berka et
Ichou Hamdan, enlevés à Imider et retenus dans les locaux de la
police à Tinghir (point 49).
Les participants au sit-in au mont Alban, organisé par le Mouvement sur la voie 96, ont eu la
surprise d’avoir la visite éclair du gouverneur de Tinghir, le mercredi 8
janvier. Celui-ci, du haut de son 4x4, leur a intimé l’ordre de lever le sit-in
après leur avoir lancé quelques menaces.
Groupe
Ouarzazate-Microcrédit : Après plusieurs reports,
Amina Mourad et Bennacer Ismaini,
les deux coordinateurs du mouvement des victimes des dérives du microcrédit à
Ouarzazate, ont été convoqués de nouveau devant le tribunal le 6 janvier 2014. Un nouveau juge a été nommé
pour poursuivre l’affaire qui les oppose à l’organisme du microcrédit INMAA. Le
procès a finalement été reporté au 28
janvier 2014. Plusieurs soutiens, notamment des victimes, venues des
villages environnants (Agdz, Kalaât Mgouna, etc.) ont assisté au procès. Les
représentants d’INMAA n’ont pas hésité à les menacer de prison si elles ne
remboursaient pas leurs crédits.
Groupe
UNEM : Le groupe de Marrakech, réparti
sur les prisons de Tiznit (Aziz El-Bour,
Mohamed Mouaden), de Safi (Hicham Meskini), d’Essaouira (Mohamed Ahrik), de
Kalaât Sraghna (Boujamaâ Jamou), d’Ouarzazate (Brahim Najmi, Hamid Zadou,
Mohamed Ouakkassi, Hamid Baghdadi, Abdelhaq Talhaoui), est à son
63ème jour d’une
grève de la faim ouverte.
Rappelons que ce groupe
purge des peines allant de 2 à 3 ans de prison ferme pour avoir
participé aux protestations estudiantines de 2012 au campus universitaire Kadi
Ayyad de Marrakech.
S’agissant toujours des militants
de l’UNEM, ce sont deux autres
étudiants du courant politique la Voie
Démocratique Basiste à Fès qui avaient rendez-vous avec la justice.
Jilali Kosseiri a été enlevé à
Taounate le 6 janvier et présenté devant le juge le 7 janvier. Le tribunal a
reporté son procès au 2 février
2014. Quant à Rachid Amlah,
poursuivi en liberté, a été convoqué par le tribunal de Fès le 7 janvier. Son
procès a également été reporté au 2
mars 2014.
Groupe
Sahraouis-Laâyoune-Dakhla : Le prisonnier politique
sahraoui Mahjoub Oulad Cheikh, qui
purge une peine de 3 ans, a été convoqué et interrogé par la police judiciaire
dans les locaux de l’administration pénitentiaire de la prison de Laâyoune après
une plainte déposée contre lui par l’un des fonctionnaires de ladite prison. Il
s’étonne, et sa famille avec, de cette plainte parce qu’il estime qu’il y a là
une inégalité de traitement. Alors qu’il avait déposé plusieurs plaintes contre
ce même fonctionnaire pour mauvais traitements, c’est lui qui se retrouve accusé
de violences.
Après 3 mois d’attente, un autre
prisonnier politique sahraoui de la même prison, Atik Baray, a été transféré, le 7 janvier 2014, vers la
prison locale de Dakhla. Rappelons
qu’il avait été transféré une première fois, le 29 septembre (voir points précédents) de la prison de Dakhla
vers la prison de Laâyoune pour pouvoir bénéficier de son procès en appel (Cour
de cassation) de la première condamnation (3 ans) prononcée en 2011. Après deux
reports (1er et 22 octobre 2013), la cour d’appel de Laâyoune a,
finalement, confirmé le 19 novembre 2013 la première
condamnation.
Groupe Liberté
d’expression-Avocats-Journalistes : Le procès
intenté au défenseur des droits de l’Homme, l’avocat Maître Mohamed
El-Messaoudi, tenu le 27 décembre 2013 a, encore une
fois, été reporté au vendredi 7
février 2014 (voir points
précédents). Le bureau régional de l’AMDH-Casablanca a appelé à un rassemblement
de soutien ce jour-là devant le tribunal d’appel.
La prochaine audience du journaliste Ali Anouzla devant le juge est
prévue le 18 février 2014.
Rappelons qu’il avait été arrêté le 17 septembre 2013 et remis en liberté
provisoire le 25 octobre 2013. L’État marocain lui reproche des faits relavant
de la loi antiterroriste de 2003. Sa poursuite judiciaire a suscité une large
campagne de solidarité internationale à laquelle s’est jointe l’ASDHOM en le
proposant au parrainage. Ali
Anouzla a déposé le 10 janvier 2014 auprès de l’Agence Nationale de
Réglementation des Télécommunications au Maroc (ANRT), une demande de levée de la censure qui frappe son site
Lakome.com depuis son incarcération.
Le journaliste Mustapha El-Hasnaoui, détenu à
la prison centrale de Kénitra pour des faits également en lien avec la loi
antiterroriste (point 49) et
qui mène une grève de la faim depuis le 1er janvier 2014, a obtenu gain de cause, en tout cas en ce
qui concerne ses conditions de détention. L’administration pénitentiaire a
promis d’accéder à ses doléances. Reste la revendication principale et qui
consiste en la révision de son procès, et ça c’est du ressort du ministère de la
Justice ! Son comité de soutien animé par la LMDDH se félicite déjà de cette
première victoire.
Pour clore ce point hebdomadaire,
l’ASDHOM se félicite que soit mis fin, enfin, à la cavale de l’assassin,
l’ex-commissaire de police, Mohamed
Kharbouche, qui avait torturé jusqu’à la mort le citoyen Mohamed Ait Si Rahal dans un commissariat à
Marrakech. L’ASDHOM avait soutenu sa femme, Zoubida Ait Si Rahal, une citoyenne
résidant en France, dans sa quête de justice. L’assassin de son mari avait écopé
de 10 ans de prison ferme et il a tout fait pour s’y
soustraire.
Le bureau exécutif de
l’ASDHOM
Paris, le mardi 14 janvier
2014
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire