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vendredi 17 mai 2013

France : austérité AN II

Par Jean-Paul Piérot, l'Humanité ,17/5/2013


Edito: François Hollande lance l'an II du renoncement


Particulièrement significative, cette phrase prononcée hier à l’Élysée, allusion aux quatre millions d’électeurs du Front de gauche qui au second tour, le 6 mai 2012, apportèrent un soutien décisif à l’actuel président: «La gauche de la gauche ne fait pas partie de la majorité.» 
Que retenir d’une conférence de presse présidentielle qui était annoncée comme un grand moment de « pédagogie » et d’explication face à une opinion publique pour le moins désemparée, voire déprimée par cette première année du quinquennat de François Hollande? Pour des millions de Français, notamment dans les couches populaires qui avaient été sensibles au slogan «le changement, c’est maintenant», le sentiment amer d’avoir été trompés n’a malheureusement pas été dissipé par les réponses du chef de l’État à des journalistes soigneusement triés par le service de presse de l’Élysée. Alors que l’austérité produit en France les mêmes effets calamiteux que dans les autres pays de l’Union européenne, alors que le chômage étend ses ravages dans une société qui compte une dizaine de millions de pauvres, nous n’avons rien appris que nous ne redoutions déjà: le dossier de l’allongement de l’âge de départ à la retraite, amorcé sous Sarkozy, va être remis en chantier avant la fin du printemps. En d’autres termes, l’été risque d’être meurtrier.
C’est peu dire que le peuple de gauche avait rêvé un autre avenir en chassant du pouvoir la bande du Fouquet’s. Sans doute avait-il accordé quelque crédit à la déclaration du candidat Hollande fustigeant en pleine campagne son «véritable adversaire, qui n’a pas de nom, pas de visage, pas de parti, (…) le monde de la finance». Particulièrement significative, cette phrase prononcée hier à l’Élysée, allusion aux quatre millions d’électeurs du Front de gauche qui au second tour, le 6 mai 2012, apportèrent un soutien décisif à l’actuel président: «La gauche de la gauche ne fait pas partie de la majorité.» Il était d’ailleurs tout aussi significatif que le même jour à l’Assemblée nationale le gouvernement organise l’enterrement de la proposition de loi d’amnistie sociale.
Il n’était pas dû au hasard que François Hollande ait ouvert sa conférence de presse en évoquant sa rencontre de la veille avec la Commission européenne. Le chef de l’État avait présenté à Bruxelles sa politique censée renforcer la compétitivité des entreprises et la réforme du marché du travail, marquée du sceau de la flexisécurité. Il a préconisé une sorte de fuite en avant fédéraliste européenne et est même allé jusqu’à affirmer que l’Europe avait sauvé la Grèce… S’agissant de la France, les deux ans de répit accordés par les commissaires pour attendre les 3 % de déficit public seront utilisés pour mener les réformes de structure, l’allongement de l’âge de départ à la retraite, notamment. Ce droit à la retraite que le président de la République considère comme un fardeau.
Offensive, référence à l’an II, le chef de l’État n’a pas eu de mots assez forts pour peindre en rose une politique de renoncement qui, mutatis mutandis, s’inscrit dans une certaine continuité avec la précédente. Le pouvoir d’achat, qui a reculé cette année, l’emploi détruit au rythme des plans de restructuration sont laissés à la discrétion des directions d’entreprise aux pouvoirs renforcés. Droits des salariés, législation contre les licenciements boursiers, le renforcement du droit du travail ne figurait pas à l’ordre du jour du discours présidentiel. Quant à la gauche, elle semblait avoir déserté l’Élysée hier soir. Puisse l’an II de la mobilisation populaire bouleverser la donne.
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