Témoignage rédigé par Martine Gozlan le Mardi 29/2/2013
Attention, dynamite ! On espère que nul n’intentera à Amale el Atrassi, auteur d’un témoignage saisissant, l’habituel procès en islamophobie qui guette ces temps-ci au coin du verbe...
Les mots, cette Française qui dénonce « l’Islam des
illettrés » n’en a pas peur. C’est là-dedans qu’elle est née, sans
savoir qu’il existait un autre Islam, une religion de réflexion et de
tolérance, inaccessible au destin d’Amale. Si la jeune femme cite
quelques magnifiques sourates coraniques dans l’introduction à sa
terrible histoire, elle ne les a découvertes que très tard.
Là où elle a grandi, près de Bourges, dans une famille d’immigrés marocains arrivée de son bidonville de Rabat, la religion se confondait avec la « tradition ». Et la tradition locale est dure aux filles et aux femmes. Non, on n’avait pas appris au père d’Amale que « le paradis se trouve sous les pieds des mères » comme le dit joliment un « hadith », une autre « tradition » fréquemment citée par les lettrés.
Mais de lettres ou d’esprit, il n’y en a pas dans le foyer où nait Amale. Les filles n’y existent pas. Elles ne devraient pas exister car seuls les garçons ont droit à une fête et à un regard au moment de leur naissance. L’accouchée d’un nourrisson femelle est maudite. La mère, jusqu’à l’arrivée de Farid et de Mustapha, vit un enfer.
Là où elle a grandi, près de Bourges, dans une famille d’immigrés marocains arrivée de son bidonville de Rabat, la religion se confondait avec la « tradition ». Et la tradition locale est dure aux filles et aux femmes. Non, on n’avait pas appris au père d’Amale que « le paradis se trouve sous les pieds des mères » comme le dit joliment un « hadith », une autre « tradition » fréquemment citée par les lettrés.
Mais de lettres ou d’esprit, il n’y en a pas dans le foyer où nait Amale. Les filles n’y existent pas. Elles ne devraient pas exister car seuls les garçons ont droit à une fête et à un regard au moment de leur naissance. L’accouchée d’un nourrisson femelle est maudite. La mère, jusqu’à l’arrivée de Farid et de Mustapha, vit un enfer.
Cet enfer que décrit Amale El Atrassi est commun à bien des Franco-
Marocaines issues de foyers pauvres, de parents analphabètes. La
tentation de se débarrasser des bouches féminines inutiles en les
abandonnant contre leur gré « au bled » vaut chaque année quelques
faits-divers tragiques mais vite oubliés. Amale et ses sœurs seront
retenues prisonnières au Maroc pendant trois ans dans le bidonville
d’origine de leur père. Chaque été, à son retour, il rivalise de
mensonges pour assurer à ses filles que leur exil est une décision de
justice. En réalité, il s’est bâti une vie oublieuse en France avec les
deux garçons, seuls dignes à ses yeux d’être élevés. Chaque été, c’est
le même déchirement pour les filles quand la voiture du père repart
vers la France : « Des gamins courent en criant Fransa, Fransa !
Puis la voiture gravit la côte et disparaît au premier tournant dans un
nuage de poussière. Nous regagnons la maison. La lourde porte métallique
se referme sur nous, comme celle d’un caveau mortuaire »...
La saga de l’évasion des détenues laissera des blessures indélébiles à
Amale et une réadaptation chaotique après son retour à Bourges. Tissée
de vols et de violences, la résurrection de cette jolie fille sera
difficile. Louve, elle est devenue. « Louve musulmane » elle se
nomme, tant un islam trahi a dévoré son enfance. Sa mère, mariée de
force à 16 ans à Choukri, un homme alcoolique et violent, mettra
longtemps à réagir contre son propre esclavage.
Aujourd’hui encore, elle ne s’est pas défaite des réflexes ancestraux.
Bien qu’elle se soit décidée à divorcer en contactant enfin les services
sociaux, les enfants mâles ont investi toutes ses capacités d’amour.
Amale, sœur de l’humoriste Mustapha El Atrassi, voit ainsi se redessiner
les dominations d’autrefois, dans un monde où, en apparence, chacun a
conquis enfin sa liberté. La supériorité du garçon demeure une
forteresse. A fortiori celle du célèbre Mustapha, resté silencieux sur
la tragédie de ses sœurs et trop distant, comme le lui crie Amale la
révoltée.
La dénonciation d’une culture archaïque et de « l’islam des illettrés »
constituent des tabous que bien peu, aujourd’hui, osent enfreindre dans
l’atmosphère de mensonges pontifiants qui nous entoure. Amale a pris la
plume avec un courage qui lui vaudra de nombreuses haines. L’intérêt
de son terrible jet de confidences va bien au delà du destin personnel.
Là-bas, le Maroc est encore enserré dans un corset de souffrances dont
les échos nous parviennent régulièrement : mariages forcés, obligation
de marier la violée à son violeur, une loi aberrante qui a jeté
récemment la société civile dans la rue. Ici, en France, les ondes de
l’ignorance sont encore ressenties à la seconde ou troisième génération,
dans ces trous noirs où un islam fanatisé fond sur l’islam des
illettrés et l’occupe avec aisance et jouissance.
La seule réponse est républicaine, féministe et universaliste : éducation et égalité.
* « Louve musulmane »par Amale El Atrassi. L’Archipel.
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