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mercredi 1 juin 2011

Du Maroc à la Belgique : Petit manuel à la poursuite du mouvement du 20 février.


Par Nordine Saïd, Militant anticolonialiste, 26/5/2011

Au moment même où le peuple marocain se soulève à l’image de la Tunisie et de l’Egypte contre le régime du « commandeur des croyants », la Commune de Molenbeek Saint-Jean et son Cadi ont invité à une conférence qui s’est tenue le 21 mai des envoyés du Royaume du Maroc, qui sont venus présenter sous le meilleur jour la réforme constitutionnelle globale.Le communiqué de presse parlait de cette dernière comme d’un tournant historique dont l‘approbation par voie référendaire est de nature à renforcer le caractère démocratique de ce pays, jugé également comme exemplaire au sein de ce monde arabe en pleine mutation. A voir les orateurs, la journée du 21 laissa peu/pas de place à l’expression des oppositions.

Pourtant le lendemain au Maroc, le « mouvement du 20 février » qui appelle à des réformes politiques radicales dans le royaume, manifestait dans l’ensemble du pays sous le mot d’ordre « Mennouni Dégage ! ». Notez que Monsieur Abdelatif Mennouni n’est rien de moins que l’homme du roi à la tête de la Commission consultative de révision de la constitution (CCRC) dont les membres sont nommés par… le roi seul !

En effet, aucun représentant du « Mouvement du 20 Février », de l’association nationale des diplômés chômeurs (ANDCM), de l’UNEM (Union Nationale des Étudiants Marocains), ATTAC Maroc, ou de l’Association marocaine des Droits de l’Homme (AMDH) dont il aurait été facile de trouver un représentant… ici même à Bruxelles.

Les revendications du « mouvement du 20 février » sont nombreuses, qu’elles soient politiques, sociales, économiques, elles parlent essentiellement de pain, de liberté et de dignité.
Voici quelques revendications retrouvées dans les différentes manifestations depuis la date du 20 Février :
• Dissolution du Gouvernement actuel ;
• Dissolution du Parlement ;
• Organisation d’élections équitables et transparentes ;
• Amendement de la Constitution visant à réduire les pouvoirs du roi, et à donner plus de prérogatives au Parlement. Les Marocains sont égaux devant la Loi. Personne n’est au-dessus de la loi, y compris la personne du roi et de la famille royale ;
• Vote au suffrage universel d’un Premier Ministre ayant toutes les prérogatives pour choisir les membres du gouvernement ;
• Démolition des bidonvilles dans tout le territoire national, relogement des familles, et habitat digne pour les Marocains lésés ;
• Garantie du droit au Travail pour tous, création d’une caisse d’indemnisation des chômeurs ;
• Réforme profonde de l’éducation et lutte contre l’abandon scolaire. Éradication définitive du fléau de l’analphabétisme ;
• Réforme profonde de la Justice. Poursuite de tous ceux qui sont impliqués dans le détournement des deniers publics ;
• Liberté des prisonniers politiques et condamnation des tortionnaires ;
• Réforme en profondeur du secteur de la Santé, sous le slogan : « Santé pour tous » ;
• Investissements dans la construction de logements, d’hôpitaux, d’écoles et d’universités, octroi de prêts aux jeunes porteurs de projets à des taux de 0%
• Reconnaissance officielle de la langue Amazigh, …

Aussi, celui qui est présenté comme le « Roi des pauvres » n’échappe-t-il pas à la contestation.

Le régime marocain est une monarchie constitutionnelle. Le principe de séparation des pouvoirs n’est pas reconnu. Il suffit de lire la Constitution pour se rendre compte que le Maroc n’est pas une démocratie.

Le roi doit régner et non pas gouverner, est le mot d’ordre minimal admis par tous.

Le problème c’est que le roi concentre tous les pouvoirs (exécutif, législatif, judiciaire, économique et religieux), il est une des plus grosses fortunes du monde alors que la population dans sa majorité vit dans la pauvreté et que la jeunesse choisit l’exil, certains au risque de leur vie, pour survivre.

Aucun changement n’aura lieu sans une réforme radicale de la constitution, c’est-à-dire, sans réformer les articles suivants :

• L’article 23 qui stipule que « La personne du roi est inviolable et sacrée ». Non seulement la personne du roi est inviolable et sacrée, mais tous les pouvoirs se trouvent concentrés entre ses mains.

• L’article 24 : « Le roi nomme le 1er ministre. Sur proposition du 1er ministre, il nomme les autres membres du Gouvernement. Il peut mettre fin à leurs fonctions. Il met fin aux fonctions du gouvernement, soit à son initiative, soit du fait de la démission du gouvernement ».

• L’article 19 illustre quant à lui l’imposture de la monarchie au Maroc : « Le roi, Amir Al Mouminine. Représentant Suprême de la Nation, Symbole de son unité, Garant de la pérennité et de la continuité de l’Etat, veille au respect de l’Islam et de la Constitution. Il est le protecteur des droits et libertés des citoyens, groupes sociaux et collectivités. Il garantit l’indépendance de la Nation et l’intégrité territoriale du Royaume dans ses frontières authentiques ».

Les rapports accablants d’Amnesty International et de Human Rights Watch ont-ils été révélés au public venu s’informer de la situation au Maroc ?

Le Maroc dégringole au 126ème rang du palmarès établi par le Rapport mondial sur le développement humain, une publication annuelle du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD).
Dans ce rapport, l'ONU classe 175 pays du monde selon divers paramètres sociaux et économiques tels que l’alphabétisation, le revenu par habitant et l'espérance de vie. Le rapport signale un phénomène inquiétant pour le Maroc : il a accusé un recul de sa situation au cours des 3 dernières années (rang 112 en 2001, 123 en 2002 et 126 en 2003).

Le sort du citoyen molenbeekois Ali AARRASS détenu arbitrairement au Maroc a-t-il été évoqué en présence de l’Ambassadeur ? Le public a t il été informé que celui-ci se fait actuellement torturer dans les geôles marocaines ? Il est clair que non, car jamais la commune n’a pris d’initiative pour faire connaitre le cas d’un de ses propres concitoyens.

A l'heure où le peuple marocain dans son ensemble paie chaque jour un lourd tribut pour recouvrir sa dignité et sa liberté spoliées par un régime criminel, la commune de Molenbeek se solidarise avec leur oppresseur !
Les dernières annonces du Roi montrant une volonté de soutenir les réformes constitutionnelles, libérations de prisonniers politiques,… auraient pu laisser paraître une lueur d’espoir, mais la répression, les agressions, les violences, les arrestations envers les manifestants montrent plutôt que le Makhzen compte durcir la répression envers le mouvement protestataire.
Dans le journal télévisé d’RTL-TVI du 24 Mai 2011, l’ambassadeur du Maroc Samir Addahre, méprise et justifie la répression policière : « Le mouvement de contestation … de revendication au Maroc, qui était légitime, qui était spontané au départ, ne l’est plus malheureusement aujourd’hui »… Le mouvement du 20 février n'est plus légitime selon l'ambassadeur ! Samir Addahre DEGAGE !, c'est toi qui es illégitime.
La Commission Mennouni doit remettre ses conclusions dans un mois, soyez certains que celles-ci seront en-deçà des attentes du peuple marocain et soyez certains que la rue marocaine sera dans la rue.
Le « Mouvement du 20 février » est devenu aujourd’hui un acteur incontournable de la réalité marocaine et tous ces éléments nous démontrent à quel point son action révolutionnaire est légitime et salutaire. 

Notre rôle consiste à soutenir les revendications légitimes des peuples qui luttent.
Toutes proportions gardées, les conditions de la révolte sont aussi présentes chez nous, à « Bruxelles est caractérisée par une importante concentration de la pauvreté dans les quartiers fortement peuplés du “croissant pauvre” au centre de la ville, notamment le bas de Saint-Gilles, Cureghem, les Marolles et le sud du pentagone, le bas de Molenbeek, Laeken, le bas de Schaerbeek et Saint-Josse-ten-Noode. Cette zone est habitée par de nombreuses familles avec des jeunes enfants. Le taux de chômage y atteint plus de 25% et même plus de 40% chez les jeunes. La proportion de ménages qui vivent d’une allocation du CPAS y est jusqu’à 5 fois plus élevée que dans le reste de la région. Dans certains quartiers, jusqu’à un enfant sur deux vit dans un ménage sans revenu du travail ».

Que ceux qui soutiennent le peuple marocain demandent aux autorités belges, aux élus d’origine marocaine ou pas de prendre position et de s’exprimer publiquement sur la répression en cours au Maroc. Leur silence vaudrait complicité voire approbation, et chacun devra s’en souvenir !


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