Le Seigneur des Animaux : Le Retour du Baston
Par aboulahab, C.D.J.M., 30/5/2011
Un Tyran pour les gouverner tous,
Un Tyran pour les trouver.
Un Tyran pour les amener tous,
Et dans les ténèbres les lier,
Au Pays du Zen-Môkh-Äl où l'ignoble est Roi.
Dans une contrée lointaine, au-delà des rivières et derrière les montagnes, vivaient les Grand Hommes du Sud sous le joug d'un tyran terrible et rusé. Ses ancêtres avaient bâti leur Empire grâce à la magie maléfique du Zen-Môkh-Äl qui procurait à l'Empereur le pouvoir de maîtriser et de Commander tous les animaux du pays. Ceux-ci se nourrissaient à sa main, qu'ils ne manquaient pas de lécher en signe de soumission. En contrepartie, ils protégeaient le tyran contre les Grands Hommes du Sud : les chiens mordaient, les renards planifiaient et les meutes de loups pillaient en prétendant lever l'impôt. Une fois par an, les animaux renouvelaient leur soumission dans des cérémonies solennelles et médiévales, où la verticalité est un crime de lèse-majesté : La bénédiction qu'ils reçoivent est proportionnelle à l’élasticité de leur colonne vertébrale.
A l'origine, ces animaux furent nés humains, mais ils ont fait le choix spontané de se mettre une laisse autour du cou, se défaire de leur dignité, contre un soupçon de pouvoir et une poignée d'argent. D'autres sont tombés encore plus bas, en défendant l'Empereur et ses animaux sans aucune forme de rémunération.
Cette lignée de dictateurs, mi-[o]dieux mi-tyrans, avait réussi à transformer, patiemment, méthodiquement, ce magnifique pays en un (putain de) bordel à ciel ouvert. Leurs seules ambitions étaient la survie de leur couronne et l'expansion de leur fortune. Pendant ce temps, dans les montagnes, les Hommes du Sud mourraient de froid, la misère habitait la rue, et les chiens enragés mordaient ceux qui osaient se lever contre l'injustice impériale.
Un de ces jours mélancoliques d'hiver, un murmure de soulèvement, surgissant de partout et de nulle part, assourdissait le Zen-Môkh-Äl et menaçait sa survie. Le murmure était tel que, si l'on faisait taire une bouche, des dizaines d'autres s'ouvraient, criant désormais leur mécontentement. Surpris, pris de panique, le Makhzen est tombé de déni, prétendant que la Main Invisible de l'Ennemi (une espèce de créature mythologique, ubique, vivant derrière le désert ou après les mers) les guide et les oriente. Il ne pouvait pas faire appel aux gorilles armés pour abattre les Hommes, comme il a toujours fait. Ses jours étaient désormais comptés, Une lueur d'espoir brillait au fond du tunnel.
Mais les renards, les têtes pensantes de cet empire, ne tardèrent pas à trouver un plan diabolique pour mettre fin à cette rébellion. Ils prétendirent vouloir changer, sincèrement, tout en demandant un délai, une grâce, le temps de s'organiser et de se réformer. Un pacte implicite aurait été établi, selon lequel les Hommes voudraient bien garder à leur tête le Seigneur des Animaux, si celui-ci promettait de repartager ses pouvoirs illimités. Ils lui offraient ainsi une issue honorable et la sauvegarde de ses titres et sa fortune.
Certains des grands Hommes du Sud, un peu bêtes et peut-être naïfs, accordèrent au Tyran la présomption de bonne foi. Il en est ainsi de ceux qui refusent de lire l'Histoire : ne savaient-ils pas que Zen-Môkh-Äl avait déjà trahi leurs ancêtres, qu'il avait même vendu le pays aux étrangers ?
Soudain, probablement rameutés par leur Seigneur, les animaux retrouvèrent leurs instincts primaires, et organisèrent une battue policière pour se venger de ceux-là même qui voulaient racheter leur liberté avec leur propre sang. Ils furent terribles et sanguinaires, mus par une rage et une haine profondes contre les Hommes demeurés libres et dignes. Certains hommes, mi-soumis, mi-cons, et entièrement ridicules, ont soutenu et chanté à la gloire de ces fauves dans un spectacle abject et navrant.
Un jour, le Seigneur comprendra qu’il est impossible, par définition, de gouverner des Hommes sans leur consentement. Il sera peut-être trop tard pour lui.
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