Khadidja Mohsen-Finan joue la carte de la realpolitik
Sahara occidental : “Il faut poser les bonnes questions”
Par : Hafida Ameyar, 16/6/2014
Le Maroc et le Front Polisario
“continuent à penser le conflit comme dans les années 1970 ou 1980”.
C’est l’avis de la Marocaine Khadidja Mohsen-Finan, chercheure associée à
l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris), livré
dernièrement dans un entretien qu’elle a accordé à Nouvelles du Sahara.
Intervenant quelques semaines après la réunion du Conseil de sécurité de l’ONU sur le Sahara occidental, la politologue a joué la carte de la “realpolitik”, en vidangeant pratiquement la nature du conflit, qui dure depuis près de 40 ans, de sa substance matricielle. Khadidja Mohsen-Finan a ainsi mis l’occupant illégal d’un “territoire non autonome” et le représentant légitime d’un peuple dépossédé de ses terres, de ses richesses et de ses droits élémentaires sur un même piédestal, reprochant aux deux parties de ne pas avoir évolué dans leur manière de “penser” le conflit.
Il aurait peut-être fallu revisiter les éléments du processus de décolonisation du Sahara occidental, anciens et nouveaux, du moins rappeler certaines vérités irrévocables du dossier et la responsabilité de l’Espagne, mais aussi les reniements du royaume marocain en matière d’engagements internationaux.
Faut-il être nécessairement “pro-Polisario” pour répéter à l’envi “autodétermination, autodétermination et droit des peuples à s’autodéterminer” ?
Il est normal que l’interviewée, en sa qualité de chercheure, veuille contribuer au dénouement du conflit et rassembler les familles sahraouies, séparées par le “mur de la honte”, mais à quoi vise le recours à la généralisation pour énoncer ensuite que pour le Maroc et le Polisario, “l’essentiel n’est pas de trouver une solution qui puisse satisfaire les Sahraouis, mais d’avoir raison contre l’adversaire”, et d’adopter “des positions qui s’excluent mutuellement” ? Mme Mohsen-Finan pense que c’est la faute des “puissances, grandes et moyennes (qui) ont une responsabilité dans cet immobilisme” par leur appui à telle ou telle partie. Selon elle, si on veut contribuer à trouver une issue à ce conflit, “il faut poser les bonnes questions, inciter les acteurs à proposer de vraies réponses ou offres politiques”. “S’il s’agit d’autonomie, alors il faut veiller à ce que le contenu du plan marocain corresponde à une vraie autonomie. (…) S’il s’agit d’une consultation référendaire, il faut alors s’interroger sur les questions à poser aux Sahraouis et à la définition du Sahraoui”, explique-t-elle, en observant que la seconde offre, qui a toujours été appuyée par l’ONU et qui l’est à ce jour, est “la chose la plus complexe”.
La politologue marocaine pousse encore le bouchon plus loin, en suggérant de définir ce qu’est un Sahraoui, avant d’exprimer son idée.
Aujourd’hui, dit-elle, “le Maroc ne peut négocier l’avenir d’un territoire qu’il considère déjà comme le sien, alors que la communauté internationale et le droit international ne lui en reconnaissent pas la propriété. (…) Si l’autonomie venait à être reconnue, ce serait différent car là, il s’agirait d’une reconnaissance de l’identité sahraouie justement”. Interrogée sur la réunion du Conseil de sécurité du 29 avril, elle se garde de commenter le rejet, par ce Conseil, de l’élargissement des prérogatives de la Minurso (Mission de l’ONU) aux droits de l’Homme.
Cependant, elle admet que “dans tous les conflits, les missions de l’ONU sont dotées de prérogatives au niveau des droits de l’Homme, à l’exception de la Minurso”. Plus loin, l’interviewée assure que ce n’est (…) pas au Maroc de gérer la question des droits de l’homme”, en restant silencieuse sur les atteintes aux droits de l’Homme connues et maintes fois dénoncées. Le même mutisme est observé sur l’accord de pêche Maroc-UE, alors qu’il viole les eaux sahraouies. Si ce n’est de reconnaître le “travail intense de lobbying marocain” sur ce registre.
Enfin, à propos de la France de Hollande, Mme Mohsen-Finan déclare : “La politique saharienne de la France n’est pas différente. Paris appuie et encourage le plan d’autonomie marocain pour plusieurs raisons. La France souhaite certainement atténuer la puissance géopolitique algérienne. Elle veut aussi voir son allié marocain stabilisé et renforcé et redoute une déstabilisation du régime marocain. (…) Pour toutes ces raisons et bien d’autres, la France n’a jamais véritablement pensé le conflit du Sahara de manière intrinsèque, mais toujours en lien avec la politique saharienne du Maroc et de l’Algérie, avec un parti pris pour le Maroc.”
Intervenant quelques semaines après la réunion du Conseil de sécurité de l’ONU sur le Sahara occidental, la politologue a joué la carte de la “realpolitik”, en vidangeant pratiquement la nature du conflit, qui dure depuis près de 40 ans, de sa substance matricielle. Khadidja Mohsen-Finan a ainsi mis l’occupant illégal d’un “territoire non autonome” et le représentant légitime d’un peuple dépossédé de ses terres, de ses richesses et de ses droits élémentaires sur un même piédestal, reprochant aux deux parties de ne pas avoir évolué dans leur manière de “penser” le conflit.
Il aurait peut-être fallu revisiter les éléments du processus de décolonisation du Sahara occidental, anciens et nouveaux, du moins rappeler certaines vérités irrévocables du dossier et la responsabilité de l’Espagne, mais aussi les reniements du royaume marocain en matière d’engagements internationaux.
Faut-il être nécessairement “pro-Polisario” pour répéter à l’envi “autodétermination, autodétermination et droit des peuples à s’autodéterminer” ?
Il est normal que l’interviewée, en sa qualité de chercheure, veuille contribuer au dénouement du conflit et rassembler les familles sahraouies, séparées par le “mur de la honte”, mais à quoi vise le recours à la généralisation pour énoncer ensuite que pour le Maroc et le Polisario, “l’essentiel n’est pas de trouver une solution qui puisse satisfaire les Sahraouis, mais d’avoir raison contre l’adversaire”, et d’adopter “des positions qui s’excluent mutuellement” ? Mme Mohsen-Finan pense que c’est la faute des “puissances, grandes et moyennes (qui) ont une responsabilité dans cet immobilisme” par leur appui à telle ou telle partie. Selon elle, si on veut contribuer à trouver une issue à ce conflit, “il faut poser les bonnes questions, inciter les acteurs à proposer de vraies réponses ou offres politiques”. “S’il s’agit d’autonomie, alors il faut veiller à ce que le contenu du plan marocain corresponde à une vraie autonomie. (…) S’il s’agit d’une consultation référendaire, il faut alors s’interroger sur les questions à poser aux Sahraouis et à la définition du Sahraoui”, explique-t-elle, en observant que la seconde offre, qui a toujours été appuyée par l’ONU et qui l’est à ce jour, est “la chose la plus complexe”.
La politologue marocaine pousse encore le bouchon plus loin, en suggérant de définir ce qu’est un Sahraoui, avant d’exprimer son idée.
Aujourd’hui, dit-elle, “le Maroc ne peut négocier l’avenir d’un territoire qu’il considère déjà comme le sien, alors que la communauté internationale et le droit international ne lui en reconnaissent pas la propriété. (…) Si l’autonomie venait à être reconnue, ce serait différent car là, il s’agirait d’une reconnaissance de l’identité sahraouie justement”. Interrogée sur la réunion du Conseil de sécurité du 29 avril, elle se garde de commenter le rejet, par ce Conseil, de l’élargissement des prérogatives de la Minurso (Mission de l’ONU) aux droits de l’Homme.
Cependant, elle admet que “dans tous les conflits, les missions de l’ONU sont dotées de prérogatives au niveau des droits de l’Homme, à l’exception de la Minurso”. Plus loin, l’interviewée assure que ce n’est (…) pas au Maroc de gérer la question des droits de l’homme”, en restant silencieuse sur les atteintes aux droits de l’Homme connues et maintes fois dénoncées. Le même mutisme est observé sur l’accord de pêche Maroc-UE, alors qu’il viole les eaux sahraouies. Si ce n’est de reconnaître le “travail intense de lobbying marocain” sur ce registre.
Enfin, à propos de la France de Hollande, Mme Mohsen-Finan déclare : “La politique saharienne de la France n’est pas différente. Paris appuie et encourage le plan d’autonomie marocain pour plusieurs raisons. La France souhaite certainement atténuer la puissance géopolitique algérienne. Elle veut aussi voir son allié marocain stabilisé et renforcé et redoute une déstabilisation du régime marocain. (…) Pour toutes ces raisons et bien d’autres, la France n’a jamais véritablement pensé le conflit du Sahara de manière intrinsèque, mais toujours en lien avec la politique saharienne du Maroc et de l’Algérie, avec un parti pris pour le Maroc.”
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