Racisme / Écharde dans la conscience de l'humanité !
Par Mohammed Belmaïzi, 21/3/2014
A
l'occasion de la journée contre le racisme, j'ai le plaisir de
partager avec vous, mes ami-es, ces quelques éléments de réflexion,
pour commémorer à notre manière, notre opposition de toujours contre
cette calamité! Toutes les citations ont leurs références, et j'ai
choisi de ne pas les mettre pour ne pas alourdir le texte...
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La
question de l’identité ne peut être traitée sans une relecture de
l’Histoire axée sur l’hégémonie coloniale, où l’altérité se trouve
écrasée sous le joug d’une homogénéisation ressentie par l’infériorisé
comme une déclaration de guerre.
Ce
débat d’une étendue planétaire a eu lieu autour de la dichotomie
diversité et uniformité, mettant au centre l’altérité et la guerre des
identités ancrée dans le mépris et le racisme. Il est opportun de
rappeler que le concept de la Race a vu naître des
classifications du genre humain, paradoxalement au siècle des Lumières,
en fonction de la couleur de la peau (Blancs, Noirs, Jaunes...), qui
présupposent presque toujours la prééminence et la supériorité de la
race blanche, prônée par les pionniers tels que Linné, Buffon,
Montesquieu, Voltaire... Car « le racisme est né avec les idées de
“progrès”, chez une élite intellectuelle. Et il va être propagé tout au
long du XIXème siècle et même jusqu’au début du XXème, par les milieux
scientifiques». C’est qu’« à la base du colonialisme il y a la
supériorité de la race blanche. On a besoin de l’ériger en dogme pour
justifier la conquête. Elle repose sur l’axiome de l’absence de toute
civilisation chez ceux que l’on va subjuguer. Le mieux qu’on puisse
faire est de leur imposer celle qu’on apporte par les armes ». L’un des
exemples les plus patents se lira dans les propos de Paul
Painlevé, un grand savant du 20ème siècle, attaché de surcroît aux
droits de l’homme : « La civilisation occidentale », dit-il au moment de
la guerre du Rif, « se dresse aujourd’hui contre la civilisation
islamique qui cherche à rejeter l’emprise de notre culture... les Blancs
seuls peuvent guider à travers la planète la marche constante du
progrès.»
Mais la
conscience vive de l’Occident n’a de cesse de déconstruire et de
dénoncer la « soi-disant triomphante avant-garde de la fin du 19ème
siècle » qui « a prétendu répondre aux découvertes scientifiques, voire
aider à l’avènement d’une nouvelle humanité », et qui n’a développé que
des « poncifs couvant sous l’apparence de l’État
libéral bourgeois : le fascisme. » Victime d’une vision binaire
étriquée, cette avant-garde avait hiérarchisé le monde en « un Orient
obscur, négatif et infini, un esprit aryen inventeur d’un panthéisme que
la science moderne soi-disant confirme, et des aspects réalistes et
gnostiques du christianisme », pour appeler ces derniers « à vaincre
l’esprit sémitique.»
Ce
réquisitoire accablant indexant l’exclusion et la domination, permet de
cerner cet antagonisme criant entre diversité et uniformité. C’est que
« comme jamais auparavant dans l’histoire de l’humanité, le combat
entre la diversité et l’uniformité est devenu un enjeu planétaire. La
crise actuelle des sociétés industrielles avancées donne une
signification nouvelle aux pratiques de résistance ». Partant, n’a-t-on
pas vu ici même en Occident des revendications identitaires
exacerbées englobant des pays allant de l’Est à l’Ouest : les peuples
corses, basques, des Alpes suisses… ? Le réveil des peuples qui
proclament leur différence et tentent ouvertement « une rupture avec une
civilisation qui l’a niée, avec son discours totalitaire, missionnaire,
salvateur, révolutionnaire ».
La
recherche de l’identité, dans une société moderne en mutation
vertigineuse, devenait également aiguë. Elle ne cesse d’interpeller
observateurs, intellectuels, artistes et écrivains qui soulignent la
menace et la gravité de la montée des identités meurtrières.
Levi-Strauss, bien qu’exaspéré et prétendant en finir avec la crise de
l’identité, écrit dans l’avant-propos d’un ouvrage : « Quand des
habitudes séculaires s’effondrent, quand des genres de vie
disparaissent, quand des vieilles solidarités s'effritent, il est
certes, fréquent qu’une crise d’identité se produise ».
Mais
pareille recherche ne va pas sans dérapage, essaimant désarroi et
souffrance. Elle peut générer, chez un pouvoir véhiculant une idéologie
raciste, crimes et génocides, calfeutrés derrière une « purification
ethnique » indigne, en Yougoslavie, en Afrique (au Rwanda ou en Afrique
du Sud), ainsi qu’en Israël…
Dans
ces confrontations violentes et meurtrières des identités, le mythe du
retour aux sources, à la pureté raciale, aux valeurs religieuses et à la
suprématie nationale, acquiert une valeur-refuge chez l’infériorisé,
l’humilié. La thématique de l’atavisme brandie
aujourd’hui, fait penser à l’utilisation des thèmes sordidement
mobilisateurs qui ont fait le support des idéologies totalitaires,
notamment le nazisme. Car dans ce sens, il suffit de dévoiler ce qui se
trame et se draine derrière l’idéologie fasciste, pour noter que « le
mythe primitif » auquel recourt le nazisme, « recèle déjà l’élément
mensonger qui triomphe dans les charlataneries du fascisme et que
celui-ci attribue à la Raison. Mais aucune œuvre n’apporte un témoignage
plus éloquent des imbrications de la Raison et du mythe que celle
d’Homère, qui est le texte fondamental de la civilisation européenne ». Assertion, toutefois, discutable et mérite un débat de fond.
Dans
le même sillage, l’idéologie islamiste communément identifiée comme
« l’islam politique », tente, à son tour, d’exacerber la notion de
l’appartenance et de l’identité, en vue de se décentraliser vis-à-vis de
l’Occident. L’islam ne peut s’exercer que comme « religion et État»,
selon ce projet; et l’individu arabo-musulman ne peut revêtir que
l’étiquette de « Musulman ». Identité frelatée qui étouffe la notion de
la « citoyenneté », et suscite le vocable de « l’islamophobie », invoqué
à tout moment, dès que la critique de la religion est déployée. Le
recours au sacré et à Dieu devient le pivot et la matrice de l’identité,
du patriotisme, du sang et du sol. En cela cette idéologie de
« l’islamisme politique » qui propulse la religion comme moteur
essentiel de l’identité ethnique, à l’instar d’Israël qui glorifie la
notion du « peuple élu » révoquant et condamnant toute mixité, évoque à
maints égards, les idéologies totalitaires qui pourrissent l’avenir de
l’humanité.
Gardons à
l’esprit que « chez les individus, la conscience de l’humiliation est
l’un des principaux moteurs de la révolte et de l’action politique. Sans
elle, pas de progression de l’Humanité ».
Il est de bon ton, en Europe ou ailleurs, d’abolir
les frontières mentales, culturelles et psychologiques qui séparent les
humains. Seule une approche culturelle est dotée d’une vision où, de
l’attachement à « l’identité humaine » peut naître un monde nouveau et
une solide éthique « pour résister à l’esprit de vengeance et se
comporter autrement qu’avec la naturelle sauvagerie d’un fauve ».
Mohammed Belmaïzi
21/03/2014
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