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jeudi 13 décembre 2012

Farida Aarrass donne des nouvelles de son frère Ali

En cette fin d’année, je vous demande un simple geste, écrire une carte de soutien et d’amitié

  Par Farida Arrass.
La soif de Justice : 
Ali m'a dit, qu'il n'y a pas un jour où il ne nous imagine pas en train de bouger, lutter pour lui. Je lui ai répondu qu'il n'y a pas un jour où il manque ou serait absent dans nos pensées les plus profondes.

Il est très sceptique quant à une libération, très réaliste se sachant dans une prison marocaine, dans une justice marocaine, dans un système corrompu et si injuste. Il ajoute que quoi qu'il arrive, il sait que nous sommes la pour lui et que cela le rassure énormément.


Je me suis permise de lui avancer de notre part à tous, donc en votre nom et le mien, que jamais on n'abandonnerait ce combat. Puis je lui ai dit que tout peut encore changer et évoluer dans le bon sens et qu'il pourrait être un jour proche, libéré.

Et c'est là qu'Ali me dit, si je suis libre un jour, vous pourrez compter sur moi et mes deux mains. Je vous accompagnerai partout dans vos diverses luttes. Je serai partout avec vous.

C'était trop beau de le voir parler de lutte alors qu'il est encore en détention. Cela reflète bien la soif de justice qu'il contient.
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http://youtu.be/trVYT-5d01E Farida Aarrass, lors du tout 1er rassemblement des familles des détenus belgo-marocains
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Notre visite à Ali Aarrass, à la prison de Salé II, le vendredi 07 décembre 2012 vers midi.

Je me dirige à la prison de Salé en fin de matinée, accompagnée de mon fils Mohamed Dahnin, 18 ans.

Nos passeports sont exigés, nous les remettons au garde qui les réceptionne tous et qui très vite va encore demander le carnet de famille, pour prouver que c’est bien de mon fils qu’il s’agit.

Je conteste en me servant de l’argument suivant :

Vous avez déjà autorisé ma fille Sarah Dahnin à rendre visite à mon frère et cela sans aucun document en dehors du passeport. Là il s’agit de son frère Mohamed, j’ai 7 enfants et il est fort probable que je vienne avec chacun d’eux pour voir leur oncle. Vous n’allez pas m’ennuyer avec le même baratin pour chacun d’eux ?!

Vérifiez votre registre des visiteurs et vous verrez bien que Sarah Dahnin, ma fille, a pu y entrer le voir et que donc il n’y a pas de raison qu’on refuse l’accès à mon fils.

Nous allons attendre à l’extérieur, environ une demi-heure. Cela va nous laisser le temps d’observer avec peine, les proches parents d’autres détenus, qui attendent aussi mais depuis bien plus longtemps que nous. Sous la pluie… Le regard de ces gens est triste et le teint pâle. Ils sont pour la plupart mal vêtus, reflet de leur situation financière qui ne doit pas du tout être rose.

Une fois qu’on nous a autorisés à rentrer, encore une période d’attente d’une autre demi-heure dans la salle de fouilles de tout, des aliments, vêtements et autre….
J’ai ramené entre autre, une plaque réchaud électrique à Ali, afin qu’il puisse de nouveau cuisiner par lui-même, vu que l’autre plaque qu’on lui avait acheté lui a été confisquée et ensuite volée par l’adjoint du directeur de la prison. Nous lui avons ramené aussi du chocolat et des frangipanes, Ali aime beaucoup ça.

Finalement une garde m’appelle pour me fouiller à l’écart. Elle va procéder à des fouilles corporelles et m’accompagner jusque dans la salle de visites. Je réalise qu’ils ont séparé mon fils de moi…Mon sang ne fait qu’un tour. Je demande à la gardienne où se trouve mon fils et elle me répond à moitié, en marmonnant, qu’il arrive. 

Je ne me gêne pas et lui demande encore une fois, il est où et pourquoi vous le laissez dehors ? Il est venu voir son oncle et je ne vois pas pourquoi vous l’éloignez de moi alors qu’il ne parle pas du tout l’arabe et que c’est bien la première fois dans sa vie qu’il rentre dans une prison ?
La gardienne m’ignore et continue à parler comme si de rien n’était au gars qui tient une sorte de petit magasin qui se trouve dans la salle des visites. Sur ce je me lève et m’approche de la grille qui est fermée derrière moi, en vain, puisqu’elle simule bien ne pas me voir. Je m’approche d’elle et elle me dit en arabe, sur un ton impératif : « Patiente qu’est que t’as toi ? Pourquoi t’excites-tu comme ça ? »Je lui réponds : « Si toi tu as l’habitude de ces lieux, ce n’est point le cas pour nous, je ne me sens pas du tout rassurée avec vos méthodes ! Je veux que vous laissiez rentrer mon fils ou alors je préfère sortir le rejoindre ! D’ailleurs vous allez entendre parler de tout ça ! 

La gardienne appelle de suite un garde par téléphone. Ce garde ne tarde pas à venir, mais à son tour ne réagit pas. Il prend le trousseau de clés que la gardienne lui passe et ne dit rien et reste debout, planté devant moi.
Je me rends compte que j’ai à faire à des gens plus que bizarres, l’arrogance et la malhonnêteté sont si présents en eux…. Je décide de remettre ça et de ne pas me laisser faire. Je m’adresse cette fois-ci à ce garde et lui dis que mon fils est venu rendre visite à son oncle en ma compagnie, mais que cela fait quasi 25 minutes qu’ils l’ont laissé dehors. Ce dernier sourit ironiquement et me dit que c’est tout à fait normal, que les femmes fouillent les femmes et les gardes hommes, les hommes. Sur ce je lui demande, qui va fouiller mon fils ? Là il me répond « Moi » et je lui dis alors pourquoi le laissez-vous attendre plus longtemps, il doit être fort inquiet de ne pas avoir pu rentrer avec moi.
Le garde prend mes dires très à la légère et s’en va tout doucement et en esquissant un sourire diabolique revient quelques minutes plus tard avec mon fils.Je respire enfin normalement et je m’oblige à faire semblant de rien devant lui.
Pendant ce temps, j’ai pu sentir des choses horribles, je vous jure que d’être là-dedans n’est déjà pas du tout rassurant, mais quand en plus ils s’amusent avec vos nerfs avec un sang froid à vous glacer le vôtre….

Nous allons après cela attendre encore 15 minutes approximativement avant de voir arriver Ali enfin. Il entre et avance dans la salle des visites avec un air tellement amer. Un regard triste, exprimant un grand dégout et les traits qui laissent paraître une grande fatigue. Cerné et flétri comme s’il se fanait.

Mais dès qu’il nous voit, le sourire gagne tout son visage en éclat et en émotions ! Il va me serrer dans ses bras à ne plus vouloir me lâcher, et de même à mon fils.

Mon fils le serre aussi mais avec un bras et Ali lui fait la remarque tout en l’étreignant de toutes ses force…. Mais où est donc ton deuxième bras ? Et Mohamed réagit immédiatement en le levant et l’enlaçant de plus belles. Ali poursuit en lui disant, mon Dieu que ça fait du bien…. Je les observe et en écoutant Ali me rend compte à quel point il manque de chaleur humaine et d’affection dans ces lieux lugubres tenus par des diables.

D’habitude, sachant que nous venons de loin, les gardes sous les ordres de la direction, nous donnaient droit à au moins deux heures de visite. Nous nous asseyons autour d’une table et deux gardes prennent des chaises et s’asseyaient à un mètre de notre table, pour entendre ce qu’on se dit.
Nous les avons ignorés et donc commencé à discuter à notre aise, sans penser à donner priorité aux choses les plus importantes, pensant avoir le temps de tout dire. J’ai durant ce temps de discussion découvert qu’Ali avait perdu encore une dent. Il s’agit d’une canine inférieure. Elle faisait partie des dents qui bougeaient entièrement depuis la torture subie. On lui avait fracassé des bouteilles à la bouche….
J’ai pleuré et ne savais que dire, Ali me regardait d’un air qui en disait long, sans rien me dire, comme si pour lui cela ne signifiait plus rien à coté de tout ce qu’il a enduré.

Alors que nous parlions d’un peu de tout, voilà que dès la demi-heure passée, un garde est venu mettre un terme à notre visite. Ali réagit au quart de tour en disant que nous venons de très loin, qu’il ne voit jamais personne, que ce n’est pas normal qu’on veuille interrompre ainsi sa visite ! Mais le garde qui a pourtant l’air gêné insiste et simultanément s’éloigne sans savoir que répondre. 5 minutes plus tard, ce même fonctionnaire revient nous demander de nous quitter. Plus moyen de négocier ni d’insister lorsqu’il dit que ce n’est pas lui mais les ordres.

J’ai senti cette interruption comme une rupture terrible car je voyais bien qu’Ali avait besoin d’être en notre compagnie. Il n’était pas très bien physiquement, même si le moral semble lui plutôt bon.
Quoi qu’il en soit, Ali ne va pas bien physiquement, j’insiste pour qu’il soit vu d’urgence par des spécialistes.

Il m’a décrit le malaise qu’il a eu. Il a été pris d’une douleur extrêmement forte dans le bas ventre, douleur qui l’empêchait de respirer, jusqu’à en perdre connaissance.
Il m’a aussi dit qu’il a été pris de frayeur lorsqu’en se réveillant il a vu l’infirmier en train de le piquer au doigt. Ali le hait et se méfie de lui comme de la peste. L’histoire des résultats sanguins perdure, on refuse toujours de lui donner les résultats.

Ali est pour le moment dans l’aile B du pavillon II de Salé. Il a été seul pendant quelques jours, mais pas en isolation. Il a droit à une heure de promenade dans la cour le matin et une autre heure le soir. Il en profite pour faire du sport. Il y a peu il avait droit à 4 heures de sortie dans la cour.

J’ai dû reprendre le nouveau réchaud car les gardes savaient qu’Ali avait récupéré le sien. Ce réchaud, Ali ne peut plus l’utiliser dans sa cellule, ils ont changé les fusibles et ont mis des plus faibles, ce qui fait que tout saute chaque fois qu’il le branche, et cela même alors qu’il était seul dans l’aile B. Du coup, Ali doit cuisiner au fond du Hall de l’aile B, la prise se trouve tout au fond du couloir à l’opposé de sa cellule. En somme comme il le dit, ici il faut se battre et surtout beaucoup patienter pour trouver le moyen de subsister. J'ai appris aujourd'hui que ce réchaud est en panne, ils l'ont détraqué et moi j'ai repris l'autre :-( De vrais ordures!

Et pourtant, malgré tout Ali semble avoir le moral, il est très réaliste et dit très clairement qu’il ne croit pas du tout en une libération proche. Il développe des moyens de résistance, mais je me sens fort inquiète pour lui malgré cela.

Ali a reçu 17 lettres d’un coup, merci à vous tous!

Ali n’a pas reçu de coups durant la dernière révolte des prisonniers mais comme je vous l’avais dit, il a été mis sérieusement sous pression. Nous pensons que c’est grâce au soutien de toutes parts qu’ils n’osent plus lui administrer des coups.

Le nouvel adjoint du directeur semble beaucoup se méfier d’Ali, vu qu’on prétend que l’ancien aurait été démis de sa fonction à cause de la plainte de mon frère. Reste à vérifier, même si c’est ce que les prisonniers ont dit à Ali. Le nouvel adjoint répond donc aux différentes demandes d’Ali par un : « va voir le directeur. »

Vous vous rendez compte, que nous avons fait plus de 2200 km, pris un avion, un train, un taxi, pour seulement une demi heure de visite ?! C’est inadmissible !

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Un appel de Véro :
http://www.freeali.eu/wp-content/uploads/2012/12/familles-9-d%C3%A9cembre-II.jpg
Aujourd’hui, dimanche 9 décembre 2012, j’étais au rendez-vous, sur ce lieu très
symbolique, rue de Stalingrad, à Bruxelles, sous le Pasionaria. Ce porte-voix, pour la parole publique, est dédié à tous les migrants. Il a été inauguré en 2006 à l’occasion des 40 ans de présence de l’immigration marocaine en Belgique. C’est pourquoi, nous nous y rendrons dorénavant tous les premiers dimanche du mois pour y défendre la cause des belges, «belgo-marocains », innocents et pourtant enfermés dans les prisons marocaines !

Ali Aarrass est né en 1962, à Melilla, enclave espagnole au nord du Maroc. En 1977, Ali a 15 ans et, avec sa mère et ses sours (dont mon amie Farida), vient vivre en Belgique. En 1989, Ali obtient la nationalité belge, il a alors 27 ans. En 1993, il effectue son service militaire pour la Belgique. En 2005, il retourne vivre près de son père, à Mélilla.

Le 1 avril 2008, Ali Aarrass est arrêté et détenu en Espagne pour un dossier vide de preuves. Il est soupçonné d’appartenir à la « cellule terroriste Belliraj ». Le « procès Belliraj », mené au Maroc, a été une véritable mascarade. Les inculpés ont été torturés pour ensuite être condamnés sur base de leurs propres « aveux », obtenus sous la torture.

Innocent, Ali est mis en prison d’isolement complet, l’enfer !

Innocenté par le grand juge espagnol Baltazar Garzon, le haut commissariat aux droits de l’homme de l’ONU interdit son extradition vers le Maroc. Et pourtant, il le sera en décembre 2010 ! En extradant Ali AARRASS malgré la mesure provisoire adoptée par le Comité des Droits de l’Homme des Nations Unies, l’Espagne a manifestement violé ses obligations internationales.

Le Ministère des Affaires Etrangères belge s’est retranché derrière la double nationalité d’Ali AARRASS pour refuser toute intervention en sa faveur. La Belgique, son pays, n’a rien fait car Ali est arabe, marocain et musulman.

Au cours du délai illégal de 12 jours de garde-à-vue, Ali AARRASS a été torturé, privé de sommeil et soumis à des interrogatoires incessants. Au cours de ceux-ci, il aurait fait l’objet d’injections de produits chimiques, de chocs électriques dans les parties génitales, du supplice de la bouteille (viol) et de nombreux autres sévices inqualifiables. Sous la torture, il est contraint de signer des papiers en arabe, langue qu’il ne maîtrise pas.

Le 24/11/2011, Ali est condamné à 15 ans de prison.

Les proches de Monsieur AARRASS appellent les gouvernements espagnols et belges à se préoccuper de celui qu’ils ont livré à ses tortionnaires. Ils exigent qu’une enquête impartiale soit réalisée quant à ces allégations de torture. Ils appellent toutes les bonnes volontés à faire pression afin qu’Ali puisse bénéficier d’un procès équitable. Ils implorent les juridictions marocaines à ne pas avaliser l’usage de la torture et à rendre une justice qui puisse honorer le peuple marocain.

Octobre 2012, Ali Aarrass, condamné en appel à 12 ans de prison ferme pour « terrorisme », mais qui affirme avoir signé des aveux sous la torture, va « introduire un recours en cassation ». Les avocats d’Ali qualifient le jugement du tribunal de Salé d’ »inique » (injuste, illégal).

Avec nous, venez le dire haut et fort: « STOP aux extraditions, libérez Ali Aarrass, Bekhti, Belliraj, et les autres innocents » .

En cette fin d’année, je vous demande un simple geste, écrire une carte de soutien et d’amitié à Ali, Bekhti, Belliraj et leurs camarades, emprisonnés, le plus souvent injustement, à 16.000 dans des prisons ne pouvant contenir que 4.000 hommes!

L’adresse:

M. Ali Aarrass
Prison de Salé II
Salé
Maroc

Je sais que vous avez du coeur, vous qui êtes impliqués déjà dans différents engagements, pour les défavorisés sociaux, les malades de la sclérose ou de la leucémie, pour les pays exploités, pour les enfants dans les hôpitaux, pour les prisonniers et aussi pour la protection des animaux et de la nature en général.

D’avance je vous remercie pour votre geste et vous souhaite de passer d’agréables et chauds moments en cette fin d’année 2012 :-)

Véro

PS: et le courrier semble bien arriver dans les mains d’Ali

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