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lundi 5 janvier 2015

LE MAROC DES IMPOSTURES


Christopher Ross, l’envoyé spécial de Ban Ki-Moon pour le Sahara Occidental, présente un compte rendu sur les obstacles qu’il rencontre depuis plus d’une année, pour mener à bien le processus de négociations entre le Maroc et le Front Polisario. Hervé Ladsous, le secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix aux Nations unies, et Kim Bolduc, la nouvelle responsable de la Minurso, présentent chacun un exposé sur la même question. Ils ne font pas de com- mentaire en quittant la réunion. La raison ? Ne pas envenimer davantage l’atmosphère avec le Maroc dont le blocage diplomatique se poursuit et irrite de plus en plus le sérail onusien.
Un territoire non-autonome qui ne passe pas 
Nous vous annoncions dans notre dernier bulletin la nomination de la canadienne Kim Bolduc nouvelle responsable de la Minurso (Mission des Nations-Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara Occidental). Elle devait rejoindre son poste début septembre mais elle est toujours personne non grata pour le Maroc et elle n’a pas encore pu se rendre à El Ayoun, dans le territoire non-autonome du Sahara Occidental. Nous utilisons à dessein cette dénomination onusienne que le Maroc rejette dans un des 400 documents sortis secrètement par un «Assange» inconnu du Ministère marocain des affaires étrangères (les consulter sur le site : www. arso.org.). 
Le terme « non-autonome » met en cause la souveraineté du Maroc sur le Sahara Occidental, selon la note diplomatique d’Omar Hilale, ambassadeur marocain auprès des Nations Unies à Genève et depuis avril 2014 à New-York. Rappelons que cette affirmation est une vraie imposture face au droit international et à la 4e com- mission sur la décolonisation de l’ONU. Jusqu’à ce jour, aucun État n’a reconnu la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental qui, depuis 1963 déjà, est considéré par l’ONU comme un territoire non-autonome. 
Dans un autre document, l’ambassadeur Hilale relate une rencontre qu’il a eu le 4 septembre 2014 à New-York avec Christopher Ross qui ne peut toujours pas se rendre dans la région à cause des refus marocains. La question du territoire non-autonome est revenue dans leur discussion, l’ambassadeur marocain affirmant que « le mandat qui lui (C. Ross) est octroyé par le Conseil de Sécurité n’a aucune relation avec un quelconque statut de «territoire non-autonome ». (…) Voici la réponse de C. Ross telle que la rapporte l’ambassadeur Hilale : « II (C. Ross) est revenu à la charge en précisant que l’Assemblée Générale considère le Sahara en tant que «territoire non-autonome»». Mais cet argument juridique n’a pas été convaincant pour Hilale.
Imposture diplomatique 
Depuis près de 40 ans, la diplomatie marocaine est construite sur une suite de contre-vérités concernant ce qui est appelé dans tous les documents marocains « la question nationale » qu’elle brandit avec des arguments trop souvent fallacieux dans les lieux feutrés des salons et dans les instances nationales et internationales. Ses efforts de persuasion n’ont rien à voir avec la réalité des faits tels que l’ONU et ses institutions les défendent. De plus ils s’accompagnent trop souvent de privilèges généreux et luxueux. Il suffit pour s’en assurer de lire les documents envoyés sur twitter par le hacker Chris.Coleman (voir pages 5 à 8). 
De forum en forum 
Le 2e Forum mondial des Droits de l’Homme s’est déroulé à Marrakech du 27 au 30 novembre. La tenue de cet événement a coïncidé avec une politique de musèlement des libertés publiques et de répression subie par les organisations des droits humains. Les associations sahraouies et marocaines, critiques envers le gouvernement marocain, n’ont pas reçu d’invitations officielles, et ont fini par boycotter cette grand messe. Des manifestations ont eu lieu avant l’arrivée des 5000 participant-e-s pour exprimer la préoccupation de nombreux Marocains et Sahraouis sur la dégradation de la situation actuelle des Droits de l’Homme au Maroc et au Sahara occidental. Durant la tenue du forum, plus de 20 prisonniers sahraouis ont mené une grève de la faim soutenue par l’Association des Chrétiens contre la Torture (ACAT France) afin de dénoncer le double langage du Maroc. Sous le couvert d’une communication axée sur la lutte contre l’impunité, ce pays impose la loi du silence aux victimes de torture et entrave systématiquement l’activité des ONG de défense des droits de l’homme. Aujourd’hui la fête des Droits de l’Homme est finie! Nous doutons qu’un changement favorable s’opère dans les pratiques répressives marocaines. 
L’organisation d’événements internationaux se multiplie au Maroc depuis quelques années pour donner du pays une image d’ouverture et d’intérêt pour les questions qui préoccupent le monde. Mais cette « hospitalité » n’a rien de gratuit. Elle a comme objectif de soudoyer par le luxe et l’argent (les exemples sont nombreux dans les documents de C. Coleman) celles et ceux qui répètent ensuite, sans les vérifications d’usage, que le Maroc fait de grands progrès dans le domaine des Droits de l’Homme. Ainsi, du 12 au 14 mars 2015, le Maroc accueillera le forum de Crans Montana à Dakhla. Savez-vous où se trouve cette ville sahraouie proche de la Mauritanie? Contre toutes les résolutions internationales, le site du forum indique qu’elle est au Maroc. N’y a-t-il personne parmi les hautes personnalités familières du forum pour réagir, comme notre ancien président de la Confédération Pascal Couchepin ou le Secrétaire général adjoint de l’ONU, Philippe Douste-Blazy ? Le forum de Dakhla traitera des rapports sud-sud et de l’avenir des femmes en Afrique. Des thèmes d’actualité s’il en est. Or, dans ce même cadre sahraoui, le Club des ports du forum de Crans-Montana (cercle unique, volontairement privé réunissant les grands acteurs de l’industrie maritime) se réunira pour traiter des ressources naturelles, un thème où le Maroc est le prédateur du Sahara Occidental. En ef- fet, les ressources d’un territoire non-autonome doivent revenir à la population de ce territoire et ne pas enrichir l’occupant, fût-il roi. Rappelons qu’à Dakhla aussi, les entreprises de Mohamed VI font pousser les tomates et les melons qui se trouvent peut-être déjà sur les étals de COOP et Migros. Soyons-y attentifs !

http://www.arso.org/nouvellessahraouies/NS155.pdf

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