Le roi du Maroc Mohammed VI et le président français Hollande à Casablanca.
Photo RFI / Florent Guignard
La crise diplomatique entre le
Maroc et la France s’est aggravée avec la suspension unilatérale des
accords de coopération judiciaire entre les deux pays. Une réaction qui
fait suite à la convocation, la semaine dernière, du directeur de la DST
marocaine par des policiers français, mandatés par un juge qui instruit
plusieurs plaintes pour torture.
Rien n'y a fait. Ni le coup de
téléphone du président François Hollande au roi du Maroc ni non plus
ceux des ministres Laurent Fabius et Christiane Taubira à leurs
homologues marocains.
Piqué dans son orgueil, le Maroc ne veut pas se contenter de mot ; il
veut des actes. Car la convocation du directeur du contre-espionnage
par des policiers français, qui, circonstance aggravante se sont
présentés à l'ambassade marocaine à Paris, est considérée au Maroc comme
une atteinte grave à la souveraineté du royaume.
Rabat estime que d'autres méthodes existaient et s'étonne d'un comportement aussi « blessant » de la part d'un « pays frère ».
Au Maroc, on veut par ailleurs la garantie que cet homme-clé de la
lutte anti-terroriste pourra voyager librement, et continuer d'aider la
France sans la menace de procédures judiciaires. Des procédures que le
Maroc considère être sans fondement.
La suspension de la coopération judiciaire est donc un geste
politique fort, destiné à réveiller une France qui pour l'instant se
contentait de « regrets » sans portée concrète. Considérant que les
accords ont été bafoués, le Maroc a donc décidé de les rendre
provisoirement inopérants. Une manière de mettre la pression sur Paris.
Il ne fait pourtant pas de doute que les discussions entre les deux
capitales vont se poursuivre. La question est de savoir jusqu'où et
jusqu'à quand.
Les effets du gel de la coopération judiciaire
C'est surtout dans le domaine civil que ce gel aura le plus d'effets.
Un mariage en France ne pourra plus être reconnu au Maroc, et
inversement. Même chose en cas de divorce, d'adoption, ou même de décès.Les 700 000 binationaux vivant dans les deux pays seront donc les
plus touchés.
Mais c'est également le cas dans le domaine économique.
Une entreprise française, par exemple, en conflit judiciaire avec un
contractuel marocain, n'aura plus aucun moyen de faire appliquer une
éventuelle condamnation.
Reste tout de même à savoir dans quelle mesure ce gel sera
effectivement appliqué. Une vingtaine de commissions rogatoires sont
actuellement en cours avec le Maroc. Ces procédures qui visent à
demander l'aide d'un juge étranger pour instruire une affaire sont donc a priori en suspens.
Cependant, la coopération en matière de criminalité
internationale, notamment dans le domaine du terrorisme, pourrait
toujours se faire par des moyens détournés. En effet, même si le gel
était total, on en reviendrait à ce qu'on appelle le principe de
réciprocité, c'est-à-dire une reconnaissance des actes judiciaires, ou
une aide à l'enquête, qui se ferait au cas par cas.
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