Par Hamza Mahfoud
Interprétation de Salah Elayoubi, 15/11/2014
Sire,
Si je m’adresse à vous, c’est pour faire suite à votre discours du 6
novembre et vous exposer mon avis de citoyen, tiraillé par le doute et
vous dire combien il est ardu de défendre la mère patrie, lorsque
celle-ci est gouvernée par l’autoritarisme, les atteintes aux droits de
l’homme, les privilèges et la rente ?
«Halte aux surenchères sur le Maroc, et halte à l’instrumentalisation des droits et des libertés, pour comploter contre lui
», disiez-vous, insinuant, que défendre les droits de l’homme et la
liberté d’expression, serait assimilable à la trahison. Je pense qu’une
appréciation différente sur la question du Sahara, relève plutôt de la
liberté d’opinion, alors que le mélange des genres entre pouvoirs et
affaires, se rapproche bien plus du crime que vous évoquez.
Défendre les droits de nos semblables est un devoir citoyen, même
s’il est le fait de ceux qui ne partagent pas nos opinions. A contrario,
justifier les exactions et les atteintes aux droits de l’homme et en
protéger les auteurs est assurément un crime.
Affirmer que l’Algérie est une dictature est une vérité que nul ne
vous contestera. Mais cela ne fait de sens que si vous vous décidiez à
sauter le pas, pour vous joindre au club des démocrates tout en
abandonnant le monde des affaires, avant que les indépendantistes
sahraouis ne fassent, demain, des émules, dans d’autres régions du pays.
Vous dites que le Sahara occidental coûte au Maroc sept dirhams
investis, pour un dirham de ses recettes ! Que doivent en penser les
habitants du Sud-est marocain qui survivent dans l’exclusion et dans la
plus insupportable des misères ? Devraient-ils, à leur tour, revendiquer
leur indépendance, pour que nous leur prêtions enfin attention ?
Comment se convaincre de son appartenance à une nation qui vous refuse
toute dignité et vous contraint à l’exil, au péril de votre vie. Vous
citez votre ancêtre, à propos des envieux. Pourquoi n’évoquez-vous pas
plutôt cet autre Hadith : « Je m’étonne que ne brandisse le glaive, celui qui ne dispose de son pain quotidien ! ».
Dois-je comprendre de vos paroles qu’un ralliement des sahraouis à la
patrie, signerait la fin des investissements colossaux que vous
évoquez, comme vous le faites des autres provinces du pays ?
Pardonnez toutes ces questions. Elles viennent en réponse à ce jeu
hilarant que vous aviez initié, avec votre drôle de question, « Où sont les richesses du Maroc ?
». Nous avions répondu, dans un même élan, que leur grande majorité
était passée dans vos poches, celles de votre famille et vos courtisans.
Des richesses bâties grâce à la proximité avec le Palais. Nul ne nous
avait alors, écoutés.
Sire,
De Washington à Paris en passant par New York et Bruxelles,
nombreuses sont les bonnes volontés, des compatriotes, des amis du
Maroc, cadres hautement qualifiés et décideurs qui seraient disposées à
défendre un projet cohérent, mais qui s’en abstiennent, face à l’ampleur
de la tyrannie, des exactions et de la corruption qu’ils découvrent et
qui les révulse. Alors, affirmer aussi péremptoire que vous le faites,
que « Le Maroc restera dans son Sahara jusqu’à la fin des temps »
relève, si vous me le permettez, du sophisme pur ! Nul ne sait, en
effet, si le Maroc existera dans une centaine d’années, car l’une des
particularités de « l’injustice est de détruire toute civilisation », comme disait notre ancêtre commun, Ibn Khaldoun.
Tout comme il ne peut y avoir d’horizon commun, sans un minimum de justice.
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