Chers amis lecteurs de solidmar,

Solidmar est fatigué ! Trop nourri ! En 8 ans d’existence il s’est goinfré de près de 14 000 articles et n’arrive plus à publier correctement les actualités. RDV sur son jumeau solidmar !

Pages

vendredi 14 novembre 2014

Hercule et le petit faiseur de pluie

allal


A l’extrême Nord-Ouest de l’Afrique, au pays des «Grottes d’Hercule» où réalité et mythologie s’entremêlent bien volontiers, c’est un misérable qui a joué, le 4 novembre 2014,  le treizième acte improbable des Travaux d’Hercule qu’on aurait pu intituler « Hercule et les Égouts d’Al Massira », cependant qu’un petit prince, agissant sur ordre, allait s’improviser, le vendredi suivant,  faiseur de pluie.
Au quartier « Al Massira », ainsi appelé en souvenir de la fameuse Marche verte, lancée en novembre 1975, par Hassan II,  pour récupérer le Sahara occidental, alors que la marche n’en finit plus de verdir et de triompher dans les discours officiels, les constructions n’en finissent plus de vieillir de cette obsolescence précoce, dont notre pays a le secret. Le tout-à-l’égout est à l’avenant : Sous-dimensionné, surchargé, pollué et encombré. Alors lorsque l’inondation a frappé son quartier, ce mardi-là, le sang de Mustapha Semlali, Alias «Allal» n’a fait qu’un tour, face à l’ampleur du désastre. Débarrassé de son chemisier hawaïen de seconde main, muscles saillants, cage thoracique en porte-à-faux et posture conquérante, le héros d’un jour semblait marcher sur l’eau, n’hésitant pas à plonger, dans la boue des eaux usées de son quartier, pour curer quelques regards des déchets  hétéroclites qui les obstruaient, sous les yeux éberlués d’une foule en délire.
Il y avait quelque chose d’Hercule en Allal, pourrait-on chanter. Physique noueux, acharnement du sort, domicile familial abandonné, nom d’emprunt et, in fine, l’immortalité avec ces quelques minutes d’une vidéo qui a fait le tour du monde.
Mais au pays du Couchant, c’est bien connu, il ne peut y avoir d’autre héros que le tyran, ce dernier détestant qu’on lui fasse de l’ombre. Alors, un vulgaire préposé au chauffage d’un hammam bâti comme un athlète et qui joue les empêcheurs d’inonder en rond, vous pensez bien ! Son exploit à peine accompli, l’égoutier improvisé, subissait un interrogatoire serré et une visite inquisitoire à son misérable et sombre une-pièce, histoire de s’assurer que l’homme n’allait pas se transformer en leader révolutionnaire rassembleur de foules. Rassurés par la misère, le discours simpliste, les louanges et les vivats de notre héros pour le roi  et son chef du gouvernement, les sécuritaires avaient battu en retraite, cependant qu’une rumeur, savamment distillée, laissait entendre que l’homme avait agi sous le coup de quelques substances illicites.  Allal, lui, se répandait en interviews où il promettait de damer, à lui tout seul,  le pion à tous les ouvriers de la Redal, et tous ceux que l’on voudra, si « on » faisait appel au savoir-faire, dont il venait de faire la démonstration.
prière rogatoire
En ce début novembre, ce sont donc les averses qui ravissent la vedette. Abondantes et dévastatrices. La direction de la météorologie avait émis, dès dimanche,  un avis de tempête, avec « averses parfois orageuses et souvent accompagnées de vents forts dans plusieurs régions du nord, du centre et de l’est du pays. ». Des coups de tabac impressionnants, aux conséquences parfois incalculables, particulièrement dans les campagnes profondes, où les oueds peuvent, en quelques minutes, passer de la configuration de rus à celle de torrents impétueux aux accès de colère qui broient  tout sur leur passage, n’épargnant ni les biens, ni le vivant.
L’histoire aurait pu s’en tenir là, si, guère impressionné par ces alertes, le Palais ne s’était fourvoyé à organiser le vendredi 7, entre deux averses,  des prières rogatoires, sous la conduite de prince héritier, Hassan. Un grand moment de honte pour le régime qui instrumentalise la religion, depuis qu’il a compris le bénéfice qu’il pouvait en tirer. Les rues de la plupart de nos villes étaient noyées sous des trombes d’eau et tout ce que le pays comptait de notables et d’ « élites »,  avait pris le chemin des mosquées, pour y emprunter à l’animisme africain, un de ses rites les plus obscurantistes, pour en appeler à la pluie.
Au même moment, à cinq cent millions de kilomètres de notre galaxie, un petit robot achevait sa course dans l’espace intersidéral, pour aller se poser sur une comète, au milieu de nulle part, avec une précision diabolique. But de l’exercice, étudier les origines du monde et tenter de dire son futur. Autant dire un moment de grande solitude et de frustration pour nos compatriotes,  pris dans les serres  d’un régime qui a érigé le moyen-âge, le mensonge et l’hypocrisie en outils de gouvernance et fait d’un enfant l’instrument d’une forfaiture, preuve qu’il n’y a rien à espérer de cette génération qui passe les portes du collège royal.
Sauf miracle, les chemins de Mustapha Semlali, Alias Hercule et Hassan Ben Mohammed Alaoui,  ne devraient jamais se croiser.
Le premier est retourné à l’enfer de ses copeaux et au bûcher du four à bois de son hammam de quartier. Personne ne viendra jamais l’y chercher, pour lui confier les rênes de la voirie de Rabat, malgré ses nombreux appels du pied au roi et à Benkirane.
Le second est retourné à la douceur de ses palais, et à ses rêves d’enfant, sans se douter que les adultes s’acharnent chaque jour, à corrompre les plus infimes parcelles de son innocence, à le faire participer, à son corps défendant, aux mensonges et aux singeries coupables du régime marocain.
Ainsi va la vie du côté des grottes d’Hercule !
prière rogatoire 2

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire