Maroc : ripostes populaires contre l’injustice sociale
Ce mois d'avril 2014 a vu se développer différents fronts de luttes au royaume de Mohamed VI. Une actualité riche dans un pays où le corollaire d'une profonde misère sociale est une riposte populaire toute aussi profonde et déterminée.A Casablanca, tout d'abord, le 6 avril, quelques 30 000 personnes manifestaient contre le gouvernement islamiste d'Abdelilah Benkirán. Un gouvernement, qui comme les précédents, poursuit un peu plus encore les coupes sombres, provoquant une dégradation aiguë des conditions de vie de la population : augmentation conséquente du prix de l'essence et des produits alimentaires de première nécessité (pain, semoule, sucre), refus réitérés de répondre aux justes revendications de l'association des « diplômés chômeurs » (ANDCM), nouvelle loi dans le service public ponctionnant désormais les journées de grève des fonctionnaires (ce qui n'était pas le cas avant), et dialogue social avec les syndicats interrompu.
A noter deux éléments importants de cette mobilisation :
Si cette manifestation était à l'appel d'une intersyndicale nationale (UMT, FDT, CDT), celle-ci est née surtout de la volonté de secteurs combatifs au sein de ces syndicats qui ont poussé à la convergence et à l'action. Une convergence syndicale, pas évidente à l'origine, tant les appareils de ces mêmes syndicats, pour beaucoup inféodés au système monarchique (Makhzen), ont freiné des quatre fers l'idée d'une telle mobilisation unitaire. En vain, la colère populaire et les bases syndicales ne leur ont pas laissé le choix.
Une fois de plus, on doit déplorer des arrestations et des violences policières. Une répression ciblée à l'encontre de militants du Mouvement du 20 février dont le cortège a été attaqué violemment en pleine manifestation. Son tort : avoir scandé des slogans hostiles au gouvernement mais aussi au roi : inacceptable dans un pays où ce dernier est au dessus de tout et inattaquable !
Le Mouvement du 20 février, issu avant tout des secteurs les plus combatifs de la jeunesse marocaine, né il y a trois ans en écho au Printemps arabe, avait perdu ces derniers mois de sa vigueur et retrouve depuis peu un second souffle.
L’ODT organisait une marche le 20 avril et appelle à la grève dans la fonction publique et collectivités locales le 15 mai.
A Beni Tadjit (province de Figuig, à la frontière algérienne, que certain-e-s appellent le Maroc oublié), ensuite, la population a décrété une opération « ville morte » le 15 avril pour s'opposer à ce qu'elle considère comme la marginalisation de celle-ci. Les revendications portent sur des éléments concrets du quotidien d'habitant-e-s exsangues et particulièrement pauvres : la construction d'un hôpital et l'électrification des bidonvilles en marge de la ville.
A Khourigba, encore, les 16 et 17 avril, 600 mineurs de filiales de l'entreprise d'Etat OCP (Office chérifienne du Phosphate) se sont mis en grève en dépit des pressions et des provocations policières. Les revendications de ces ouvriers : le paiement des heures supplémentaires, un salaire uniforme de tous les salariés, une meilleure couverture sociale, l'arrêt des licenciements et la transformation des contrats à durée indéterminée en CDI.
A Tanger, enfin, le 27 avril, une grève sur le mot d'ordre du « respect des droits syndicaux, pour l'union, la solidarité et la lutte » a été massivement suivie par les ouvrier-es des multinationales des zones franches. Depuis quelques années est née dans cette partie du pays une nouvelle classe ouvrière, issue des emplois créés par les nombreuses entreprises européennes qui y ont implanté des sites de production. Une de ces entreprises est française puisqu'il s'agit de Renault qui y a construit une usine ultramoderne, suite à la délocalisation d'une partie de la production des sites de Douai et de Cléon. Le problème pour les ouvriers : non content de payer des salaires de misère, les multinationales (dont Renault) avaient au préalable négocié avec le roi du Maroc une condition à leur implantation : le refus que s'y développe toute expression syndicale. Les ouvrier-es de ces entreprises ne l'entendent pas de cette oreille et l'ont fait savoir.
Vous pouvez retrouver les informations de la commission internationale de Solidaires sur notre site à l'adresse suivante : www.solidaires.org/www.solidaires.org/
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