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samedi 26 avril 2014

A la veille du vote au conseil de sécurité, une visite «privée» urgente de Mohamed VI en France des plus opportunes

A la veille du vote au conseil de sécurité, une visite «privée» de Mohamed VI en France des plus opportunes. Mohamed VI en France, dernier acte pour s'assurer le soutien français.
La visite de M6 en France, aussi «privée» soit-elle, a une signification. Le roi est-il venu, faire porter ou porter lui-même un message au président français pour s’assurer de la « fidélité » de ses alliés ? En particulier de celle de l’ambassadeur français auprès de l’ONU, Gérard Araud, qui fût malmené il y a deux mois par la révélation par l’acteur Javier Bardem sur la nature (adultérine) entre la France et le Maroc.


Mohamed VI reçu à l'Elysée le 24 mai 2012. Photo : Présidence de la République
Mohamed VI reçu à l’Elysée le 24 mai 2012. Photo : Présidence de la République

De l’usage des visites « privées » de Mohamed VI en France. Une terminologie impropre puisqu’il s’agit d’une pratique de diplomatie parallèle, dont semble jouer le roi : après sa visite « privée » en mai 2012, ce qui en a fait le premier chef d’état reçu par Hollande, voici son arrivée dimanche soir semble-t-il dans son château de Betz, dans l’Oise.

A l’appui de l’idée que ces « visites privées » sont tout sauf des parties de vacances, le contexte dans lequel le roi se déplace en France. Comme en janvier 2011 -c’était alors l’émergence des « printemps arabe », la venue de M6 en mai 2012 et de dimanche dernier doit être analysée au regard du contexte international. Sujet ô combien sensible, le sahara occidental est au menu de ces rencontres qui ne manquent pas de ponctuer le séjour dans l’Oise.
En mai 2012, M6 venait se rassurer auprès du nouveau président français alors que la nomination de Ayrault inquiétait le Maroc. On se souvient d’un courrier de l’ex-Premier ministre de mars 2011, soit un an avant l’élection de François Hollande, dans lequel celui qui était alors président du groupe PS à l’assemblée nationale évoquait « l’occupation » du Sahara occidental par le Maroc et du « droit à l’autodétermination des peuples colonisés ».
Des mots chocs rompant avec la sémantique habituelle du pouvoir français.
La position de François Hollande était également une source de perplexité pour le roi. On le disait, lui comme des éléments de son entourage, assez proche de l’Algérie. Reçu tout de même en présence de la Garde royale, le « visiteur privé » a entendu les paroles qu’il affectionne particulièrement : « Le chef de l’Etat a salué le processus de réforme démocratique, économique et sociale en cours dans le royaume à l’initiative de Sa Majesté le Roi Mohammed VI ».

Le soutien de son ami de toujours…
Un an après, lors de la visite -officielle celle-ci- du président français au Maroc les 3 et 4 avril 2013, les mots prononcés devant les parlementaires marocains par François Hollande devaient finir de rassurer complètement Mohamed VI :

« Le plan présenté en 2007 par le Maroc prévoit un statut de large autonomie pour la population du Sahara occidental. Je le redis ici : c’est une base sérieuse et crédible en vue d’une solution négociée. » (standing ovation) Avant de conclure en apportant sa petite touche personnelle : « Mais, d’ici là, tout doit être fait pour améliorer les conditions de vie pour la population de cette région ».
Demain, 23 avril, le conseil de sécurité de l’ONU va plancher sur ce conflit qui envenime les relations algéro-marocaines, au coeur duquel la France est plongée de fait.
Cette visite impromptue, qui succède à une autre visite « privée » (faut-il l’entendre comme un déplacement non officiel et dans ce cas non financé par l’Etat marocain ?), à Dakhla, ville du sud du Sahara occidental, doit venir garantir le royaume de recevoir une nouvelle fois le soutien de son allié de toujours, et, in fine, le rejet de la création d’un mécanisme de surveillance des droits de l’homme.
RFI voit dans la visite du roi à Dakhla une manière de célébrer -en terres « marocaines »- le succès de la diplomatie marocaine, qui aurait obtenu auprès de Barack Obama et de plusieurs pays (africains notamment) l’assurance que le Conseil de sécurité rejetterait une nouvelle fois la demande d’étendre le mandat de la MINURSO en lui conférant un rôle de surveillance des droits de l’homme. Un projet de résolution rédigé par les USA ne mentionnerait pas, contrairement à l’année dernière, la possibilité d’une telle extension.

Sa Majesté à la mosquée de Dakhla le 18 avril 2014. Photo : MAP
Sa Majesté à la mosquée de Dakhla le 18 avril 2014. Photo : MAP
On peut plutôt voir dans ce geste bien symbolique une signification de fermeté : c’est le commandeur des croyants, Mohamed VI, qui vient prier dans la mosquée de Dakhla. « Leader, dirigeant et bâtisseur, SM le Roi Mohammed VI, Amir Al Mouminine, descendant du prophète, ne cesse d’oeuver et de multiplier les actions pour le bien de la nation », a fait valoir l’Imam, rapporte l’agence officielle MAP.
Ce que Dieu Tout puissant nous a donné (le Sahara occidental -les 300 à 350 000 Marocains partant à la « reconquête » de leurs terres le Coran à la main), seul Dieu Tout puissant pourra nous le reprendre…
Bien plus prosaïque, la visite de M6 en France, aussi «privée» soit-elle, a une signification. Le roi est-il venu, faire porter ou porter lui-même un message au président français pour s’assurer de la « fidélité » de ses alliés. En particulier de celle de l’ambassadeur français auprès de l’ONU, Gérard Araud, qui fût malmené il y a deux mois par la révélation par l’acteur Javier Bardem sur la nature (adultérine) entre la France et le Maroc.


Javier Bardem à Paris mi-février 2014 pour présenter "Enfants des nuages", son documentaire sur le Sahara occidental. Photo : O. Quarante

« Notre relation avec le Maroc, c’est comme une relation avec une amante, il y a plein de choses que l’on n’apprécie pas chez elle, mais l’on doit rester ensemble, et la défendre face aux autres », aurait-il dit devant l’acteur, venu le rencontrer à New-York (la rencontre a été confirmée par le porte-parole du Quai d’Orsay) dans le cadre du documentaire qu’il co-produit et qui sort en France le 30 avril, « Enfants des nuages ». Des propos « scandaleux et inadmissibles », pour les autorités marocaines.
Ces derniers jours, un échange de tweets entre ce même haut diplomate français et le directeur exécutif de Human Right Watch, Kenneth Roth, montrait une réelle tension sur le sujet. Ce dernier interpellait le représentant fançais à l’ONU :
« Shame on France, doing Morocco dirty work, for threatening to veto rights-monitoring for UN mission in Western Sahara » (« Honte à la France de faire le sale boulot du Maroc, en menaçant de poser son veto à un mécanisme de surveillance des droits de l’homme de la MINURSO »)
M. Araud a rejetté ces accusations dans un tweet le 18 avril :

Once for all and I stop here. France has NOT threatened to use its veto directly or not. The last French veto was in the 80s.

Naâma AsfariIl faut dire que ces attaques et ces accusations de connivence entre la France et le roi prennent un sens particulier après la crise diplomatique survenue fin février, à la suite du dépôt de deux plaintes, dont une auprès de la justice française, par un militant sahraoui, son épouse française, avec le soutien de l’ACAT. Naama Asfari est un des 25 Sahraouis condamnés en février 2013 par le tribunal militaire de Rabat.
Ces plaintes, ajoutées à la sortie de Javier Bardem, venue en France quelques jours avant, avaient entraîné une réaction très forte du pouvoir marocain car une juge française avait fait intervenir des policiers français à l’ambassade du Maroc pour convoquer le directeur du contre-espionnage du Maroc, en visite à Paris.

Naâma Asfari

Et, le Quai d’Orsay avait publié le 22 février un communiqué dans lequel il qualifiait cette initiative d’ « incident regrettable ».
La brouille ne s’était pas arrêtée là, puisque le 26 février, le Maroc décidait de mettre fin à la coopération judiciaire entre les deux pays. Une visite de Christiane Taubira, ministre de la Justice française, a été annoncée pour début avril au Maroc pour rétablir la coopération, mais aucun déplacement n’a encore eu lieu et n’est mentionné à ce jour dans l’agenda de la ministre.
Après avoir fait monter une telle pression entre les deux pays, cette nouvelle visite « privée » de Mohamed VI pourrait ressembler à un geste d’apaisement. Les actes d’apaisement succéderont-ils à de nouvelles marques du soutien indéfectible de la France sur le dossier du Sahara occidental ? Une rencontre entre Mohamed VI et Manuel Valls n’est pas à exclure, laisse entendre un media marocain.

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