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vendredi 23 novembre 2012

Ricardo Montserrat, un artiste engagé aux côtés des mineurs marocains


Découvrir Ouarzazate, Zagora, Errachidia, Tinghir et la région Sud Est du Maroc

Romancier, nouvelliste et surtout scénariste et dramaturge, Ricardo Montserrat est un artiste engagé voir humaniste. Il était présent à Ouarzazate dans le cadre de la caravane des mineurs marocains du Nord Pas de Calais pour y présenter son roman « Mauvaise Mine » consacré à l’histoire des anciens mineurs marocains. Artiste militant en faveur des exclus, il partage son regard et son expérience dans ce domaine.
Ricardo Montserrat à Ouarzazate par A. Azizi

Almaouja.com - Comment cette dimension humaniste est née en vous en tant qu’artiste ?
Ricardo Montserrat - Je suis né dans une famille engagée depuis plusieurs générations. Mon grand père maternel a été condamné à un an de prison en 1913 pour avoir refusé de faire la guerre au rif marocain. Mes propres parents sont des catalans engagés. Quant à mon père, il était dans la résistance en France, arrêté puis envoyé en Allemagne. Mais moi j’ai choisi un autre moyen face à la violence de la guerre, particulièrement celle de la guerre civile : j'ai choisi le parti du dialogue.

Le choix du dialogue
Je pense que les gens peuvent sortir de l’engrenage de la guerre, de la haine et de l’humiliation par la culture. Autrement dit par l’échange des mots, par la possibilité de trouver des histoires, d’inventer une autre façon de vivre ensemble. Personnellement, j’ai vécu au Chili sous la dictature du général Pinochet. Il y avait deux choix en matière d’engagement : la voie de la violence et la voie de la culture. C’est-à-dire inventer ensemble une identité avec les victimes qui souffraient de l’oppression. L’objectif était alors de créer un espace de liberté par les musiciens, les peintres et les artistes à travers l’éducation populaire. C’était efficace car le Chili a relever le défi de la démocratie sans passer par un bain de sang.

Almaouja.com - Vous optez alors dans la résolution des conflits pour une voie de paix au lieu de la force ou toutes les parties concernées perdent d’une manière ou d’une autre ?
RM - Oui bien sûr en passant par l’art et la culture. Chacun à sa petite histoire qui rejoint la grande histoire. Si on aide chacun à réparer sa petite histoire, on répare indirectement la grande histoire. Surtout une histoire humiliée, blessée, sous estimée. Si on prend l’exemple de la grande histoire des peuples marocains, car il n’y en a pas uniquement un, il y a toute une histoire qui n’existe pas parce qu’elle n’a pas été écrite, chantée ou valorisée. Or cette histoire que vous croyez avoir oubliée, vous la portez dans votre corps, votre façon de vivre ...
Je pense qu’il faut créer un espace où toute cette mémoire offensée voir oubliée puisse ressurgir. Je cite l’exemple de cette magnifique histoire des mineurs marocains. Elle était au départ écrasée. Alors qu’en réalité, c’est une histoire de héros, de gens qui sont toujours beaux.

Mauvaise Mine de Ricardo MonserratAlmaouja.com Dans le cadre relatif aux anciens mineurs marocains du Nord-Pas-de-Calais, pourriez-vous nous rappeler le contexte d’écriture de votre roman « mauvaise mine » ?
RM - Ce livre n’est fait que de paroles que j’ai collectées, des paroles croisées. Nous avons accueilli des mineurs marocains dans des ateliers. Différents d’origine, d’âge, de langue… Ils ont raconté des choses très intéressantes. Il faut remettre aussi ce roman dans le contexte actuel. Aujourd’hui en France il y a une montée d’un mouvement xénophobe, raciste. Un racisme anti arabe, antimusulman, anti islam avec de plus en plus de jeunes néonazis fascinés par des idées extrémistes. Face à cette réalité, nous avons décidé de réagir en collaboration avec l’association « colère du présent ». Dans ce cadre j’ai écrit une pièce de théâtre intitulé « Naz ». Elle raconte comment un jeune français devient con, raciste, xénophobe…
Le problème de ces jeunes, c’est qu’ils ne connaissent pas leur histoire, particulièrement l’histoire de l’émigration. Alors nous avons décidé de créer une collection de feuilletons populaires destinés à être lus par un large public. Nous avons aussi constitué des groupes, celui des mineurs marocains était le premier, de gens vivant dans le Nord qui racontent l’histoire telle qu’ils l’ont vécue, leur propre histoire. Une histoire de petites gens inconnus auprès du public, dans une forme populaire où amour, sang, émotion, suspens sont tous présents. Cette initiative a eu un grand écho. Dans le journal la Voix du Nord on a eu 120.000 lecteurs par jour qui on découvert l’histoire de mineurs marocains.
C’est dans l’invention que se joue l’avenir de l’humanité
Almaouja.com - Quel est l’objectif de votre initiative ?
RM - L’objectif est de changer le regard sur cette catégorie de personnes en l’occurrence les anciens mineurs marocains du Nord-Pas-de-Calais en réparant leur histoire. Nous pouvons changer les choses à travers les moyens éducatifs et culturels. « Si on change les mots et les images qui disent le monde, le monde changera ». Je suis convaincu que l’éducation populaire est un moyen efficace qui permet à un peuple de revendiquer son histoire, de la réinventer afin de concevoir un autre destin que celui qu’on lui a promis.

Almaouja.com - Croyez-vous que vos idées sont partagées par les acteurs politiques et les décideurs en général sachant qu’il y a toujours un rapport dominant-dominé entre les pays ?
RM - Quand vous dites fort, ça sous entend un rapport de force. Personnellement, je crois à la force des faibles puisque ils sont nombreux et ils n’ont rien à perdre. Ils ont tout à inventer. Or c’est dans l’invention que se joue l’avenir de l’humanité. Prenons l’exemple de nos vieux pays riches qui se croient forts. Leur force est fondée sur des choses du passé. Alors que c’est dans le présent, parmi ceux qui n’ont rien ou pas grand chose que le monde de demain est en train de s’inventer. Dans cette situation de faiblesse, il y a lieu d’inventer une nouvelle force différente d’une vieille basée sur le pouvoir financier, médiatique, militaire ...

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