Le comité international de soutien au journaliste et historien Maâti Monjib (1) « appelle
le gouvernement marocain à respecter (son) droit à la libre
circulation, et à mettre un terme à toutes les formes de harcèlement
dont il est l’objet. » Maâti Monjib, dont l'état de santé est préoccupant, est en grève de la faim depuis le 7 octobre.
Au Maroc, la liberté
d’expression court à nouveau de graves dangers. Plusieurs journalistes
et intellectuels sont actuellement victimes de répressions policières
accrues. La dernière affaire en date, celle de l’historien Maâti Monjib,
professeur à l’université Mohamed V de Rabat, est particulièrement
alarmante.
Enseignant-chercheur reconnu internationalement, Maâti Monjib est le
fondateur du Centre Ibn Rochd d'Etudes et de Communication de Rabat
(Maroc). Il est membre de l'« Association marocaine pour un journalisme
d'investigation » (AMJI), et aussi président de l’association «Freedom
now», dont le but est de protéger la liberté d’opinion et la liberté de
presse au Maroc. Cette association compte parmi ses membres le
journaliste Ali Anouzla, condamné puis incarcéré en 2013 pour « apologie
au terrorisme » ; ainsi que Khadija Ryadi, ancienne présidente de
l’AMDH, association marocaine de défense des droits de l'homme.
Depuis deux ans, Maâti Monjib fait l’objet d’intimidations (campagnes
de dénigrement, attaques sur des sites d’information créés et financés
par le régime pour diffamer ses opposants, interdictions diverses)
devenues systématiques, et qui viennent de prendre un tour
particulièrement inquiétant. Le 31 août 2015, Maâti Monjib apprend qu’il
est recherché pour « atteinte à la sûreté de l’État ». Le 16
septembre, il est empêché de se rendre à un colloque à Barcelone. Il
entame alors une première grève de la faim de trois jours. La visite du
Président François Hollande oblige le ministre de l’Intérieur marocain à
publier un communiqué affirmant que M. Monjib n’est plus sous le coup
d’une interdiction de quitter le territoire. Mais le 7 octobre, Maâti
Monjib est à nouveau interdit de se rendre à un congrès à Oslo. Il
entame alors une seconde grève de la faim, illimitée, dans les locaux de
l’AMDH à Rabat.
Le harcèlement dont fait l’objet Maâti Monjib intervient après les
attaques subies par ses deux principaux collaborateurs au sein de
l'association AMJI, Hicham Mansouri et Samad Ayach. En septembre 2014,
alors qu’il sortait d'une réunion de travail, Hicham Mansouri a été
passé à tabac par trois inconnus. Le 17 mars 2015, il est arrêté à son
domicile dans des conditions très violentes. Quelques semaines plus
tard, le tribunal de Rabat le condamnait à 10 mois de prison et une très
forte amende pour « adultère ». Le 13 août 2015, c'est au tour
de Samad Ayach d'être arrêté. La police l’interroge sur ses relations au
Mouvement du 20 février (la version marocaine des « printemps
arabes »), et ses liens avec Maâti Monjib au sein de l’AMJI et de
« Freedom now ». A l'issue d'un interrogatoire de dix heures, Samad
Ayach est relâché avec l’accusation d' « atteinte à la sûreté du Royaume », et de « déstabilisation de l'opinion citoyenne ».
Lorsque Samad Ayach veut voyager en Tunisie, le 25 août, pour
participer à une formation de journalistes, il est empêché de monter
dans l'avion par la police qui lui signifie une interdiction de quitter
le territoire national.
Ces attaques de plus en plus fréquentes contre les défenseurs de la
liberté de la presse interviennent dans un contexte de régression sans
précédent de la situation des Droits humains au Maroc. Face à cette
situation alarmante, un comité national de soutien à Maâti Monjib s’est
créé à Rabat le 12 octobre 2015. En parallèle, un comité international
de soutien, présidé par Abdellah Hammoudi, professeur à l’université de
Princeton (USA), a pris forme autour de plusieurs personnalités (Noam
Chomsky, Abdellatif Laabi, Bachir Ben Barka, Mohammed Harbi, Abdellah
Hammoudi, etc.). Ce comité international de soutien appelle le
gouvernement marocain à respecter le droit à la libre circulation de
Maâti Monjib, et à mettre un terme à toutes les formes de harcèlement
dont il est l’objet.
Le comité informe que la liste des signataires reste ouverte à
l’ensemble des intellectuels, universitaires, auteurs, et artistes
désireux de rallier cet élan de solidarité.
Contact du Comité : soutienmaatimonjib@gmail.com
Post scriptum : avant-hier, 14 octobre 2015, après huit jours
de grève de la faim, Maâti Monjib a été hospitalisé à l'hôpital de
Rabat. Il a pris la décision, malgré les risques très importants qu'il
encourt, de poursuivre sa grève de la faim.
Pour le comité de soutien international,
Ignace Dalle, journaliste et écrivain
16 octobre 2015
Membres du Comité international de Soutien à Maâti Monjib :
Abderrahim Afarki, Paris ;
Jean-Paul Augier, docteur en histoire, enseignant, Paris ;
Michelle Auzanneau, professeure à la Sorbonne nouvelle, Paris ;
Redouane Baroudi, journaliste, Bruxelles ;
Bachir Ben Barka, universitaire ;
Mohammed Larbi Benotmane, professeur à l'université Mohammed V, Rabat ;
Margaret Bento, professeure des universités, Paris – Descartes ;
Ahmed Bennani, universitaire établi en Suisse ;
Abdou Berrada, journaliste ;
Omar Brousky, universitaire et journaliste, Maroc ;
Maria Candea, professeure, Sorbonne nouvelle, Paris ;
Ian Birchall, historien, Londres ;
Cécile Canut, professeur des universités, Paris-Descartes ;
Stuart Chaar, City University of New-York, USA ;
Gérard Cholvy, professeur d'histoire émérite, université de Montpellier ;
Noam Chomsky, professeur émérite, USA ;
Joël Combres, journaliste, France ;
Ignace Dalle, journaliste et écrivain, France ;
Lucile Daumas, militante Attac et CATDM Marcoc ;
Abdoulaye Deme, linguiste, Université Paris-Descartes ;
Jean François Durand, Universitaire à Montpellier ;
Said Fawzi, président de l'ASDHOM (association de défense des droits de l'homme au Maroc), Paris ;
Richard Greeman, professeur émérite, Columbia University, USA ;
Abdellah Hammoudi, professeur à l’université de Princeton, USA ;
Mohammed Harbi, historien universitaire, Paris ;
Shamil Jeppie, universitaire, Afrique du Sud ;
Abdellatif Laabi, écrivain ;
Sandrine Lacombe, comité de rédaction revue Ancrage, France ;
Bernabe Lopez, professeur d'université émérite, Espagne ;
Edris Makward, professeur émérite à l'Université Wisconsin, USA ;
Mahmood Mamdani, professeur Université Columbia, USA ;
Danièle Manesse, professeure émérite, Sorbonne nouvelle, Paris ;
Catherine Miller, directrice de recherches, CNRS, France ;
Claudine Moise, professeure des universités, Grenoble ;
Brahim Ouchelh, militant des droits de l'homme, Paris ;
Jean-Bernard Ouedraogo, professeur à l'EHESS, Paris ;
Marguerite Rollinde, sociologue et militante associative, France ;
Ebrima Sall, secrétaire exécutif du CODESRIA, Dakar ;
Mohamed Habib Samrakandi, anthropologue, Université Jean Jaurès Toulouse ;
Ali Sbai, fonctionnaire international, Genève ;
Leigh Swigart, International center for Ethics, Justice and Public life, USA.
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