Entrevue avec Ensaf Haidar, 13/1/2015
La femme du blogueur saoudien Raïf Badawi, emprisonné en Arabie
saoudite pour avoir diffusé des propos qui ont déplu au régime saoudien,
souhaite ardemment la fin du cauchemar qu'elle vit depuis 2012. En
entrevue à 24/60, Ensaf Haidar a remercié les Québécois et
Canadiens qui l'appuient pour demander la libération de son mari, et a
imploré le premier ministre d'intervenir.
« S'il vous plait, M. Harper, parlez directement au gouvernement
de l'Arabie saoudite pour [faire] sortir Raïf et le faire venir ici,
pour moi et pour mes enfants. On a tous besoin de Raïf. »
— Ensaf Haidar
Plus tôt aujourd'hui, à l'occasion du 32e anniversaire du blogueur saoudien, une vigile a été tenue devant le Complexe Guy-Favreau de Montréal pour
réclamer sa libération. Raïf Badawi est emprisonné depuis 2012 en
Arabie saoudite pour avoir critiqué le régime saoudien et s'être exprimé
sur l'islam dans son blogue. Il a été condamné à 10 ans de prison, à
300 000 $ d'amende et à 1000 coups de fouet.
Une fois la peine de prison purgée, il lui sera interdit de voyager pendant dix ans. Vendredi dernier, il a reçu 50 premiers coups de fouet et, selon les informations obtenues par Amnistie Internationale, il serait mal en point. Si tout se déroule comme prévu, M. Badawi recevra 50 autres coups vendredi.
« Quand Raïf a lancé son blog, a expliqué Ensaf Haidar, il pensait que c'était son droit de s'exprimer et qu'il n'avait pas outrepassé les lois ». Mais il n'y a pas de liberté d'expression en Arabie saoudite, dit-elle. « L'être humain n'a pas sa place. »
Béatrice Vaugrante, directrice d'Amnistie internationale pour le Canada francophone, admet que « liberté d'expression et Arabie saoudite, ça ne va pas ensemble, clairement ». L'Arabie saoudite a un triste bilan en matière de violation de la liberté d'expression et du droit des femmes, de la torture et des exécutions, énumère Mme Vaugrante.
Amnistie internationale considère que Raïf Badawi est un prisonnier d'opinion. « Il n'a fait qu'exercer sa liberté d'expression sur Internet. Donc, il ne devrait pas être en prison », dit la directrice d'Amnistie internationale, qui a interpellé le gouvernement du Canada et le gouvernement du Québec pour qu'il puisse faire pression sur Ottawa. « Nous sommes un peu déçus de la tiédeur de la réaction du Canada, malheureusement », regrette-t-elle.
C'est qu'Ottawa a répondu au groupe de défense des droits de la personne que Raïf n'était pas Canadien.
« Raïf n'est pas un citoyen canadien, mais sa famille est au
Canada [...] On a ici trois enfants, son épouse qui est ici...
Évidemment, le Canada doit tout faire, diplomatiquement, pour réunir
la famille. »
— Béatrice Vaugrante, directrice d'Amnistie internationale pour le Canada francophone
Béatrice Vaugrante dit qu'il est difficile de travailler sur le
plan diplomatique avec l'Arabie saoudite. « Ça a souvent été un pays où,
complaisamment, on tait les violations des droits de la personne. On
hausse le ton - et d'une façon tout à fait légitime - avec l'Iran et la
Corée du Nord, mais quand il s'agit de l'Arabie saoudite, d'un coup, les
tons se font plus feutrés ».
« Mais il y a moyen, en mettant de la pression, de convaincre le roi Abdallah de le gracier, de le libérer, et de le rapatrier ici, au Canada », croit-elle.
Pour faire suite à la vigile d'aujourd'hui à Montréal, une autre manifestation est prévue vendredi à Québec, devant l'Assemblée nationale.
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