Mohammed Jaabouk 27/10/2014
La jeunesse des camps de Tindouf est désespérée et le
statu quo profite au Maroc et non au Polisario, constate M’Hamed
Khaddad, le coordinateur du Polisario avec la Minurso. C’est ce que
révèle, entre autre, un nouveau document marocain confidentiel publié
sur Twitter. Mais surtout, la publication vise essentiellement à
discréditer des relais du Maroc au sein d’organisme de l’ONU. Son
timing n’est pas fortuit, elle intervient juste après celle qui a visé,
Anders Kompass, directeur des opérations sur le terrain au
Haut-Commissariat aux Droits de l’Homme.
Omar Hilale, était ambassadeur représentant du Maroc auprès de l'ONU à Genève et désormais à New York / DR
Un autre document confidentiel du ministère des
Affaires étrangères, datant du 31 août dernier, a été récemment publié
sur Twitter par un certain "Chris Coleman". Il concerne une lettre de
Omar Hilale, à l'époque représentant permanent du royaume aux
Nations-Unies à Genève, adressée à son ministre de tutelle.Elle concerne une rencontre, un déjeuner de travail à Genève, entre le diplomate marocain et Athar Sultan Khan, le chef du cabinet du directeur du Haut-commissariat aux réfugiés, un homme que le même Hilale n'hésitait pas à qualifier, dans une correspondance datant du 1er mai 2012, qu’il « a d’énormes gages de sympathie à l’égard du Maroc et une profonde compréhension de la complexité de l’affaire du Sahara ». Les discussions ont porté essentiellement sur la question du Sahara occidental.
Le statu quo profite au Maroc
Selon la même source, le chef de cabinet d’Antonio Gutteres a détaillé à Hilale une réunion qu’il a tenue, récemment, avec M’Hamed Khaddad, le coordinateur du Polisario avec la Minurso, en déplacement en Europe.
Ce dernier a confié à Athar Khan que « la situation de crises politiques et de guerre en Afrique du Nord et dans la région sahélo-saharienne, couplée avec les incertitudes politiques en Algérie, préoccupent profondément les responsables du Polisario », ajoutant que « la stagnation du processus de négociation politique alimente le désespoir chez les jeunes dans les camps ». Des observations déjà exprimées par le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, dans ses rapports de 2012 et 2013 sur le Sahara.
Khaddad, d’origine mauritanienne, et très proche des services algériens de renseignements, a confié à son interlocuteur du HCR que « le statu quo actuel est à l'avantage du Maroc et que Ross mène une mission impossible. Pire, il est devenu un problème pour le processus. Le Polisario a des doutes sur ses chances de faire avancer les négociations ». Athar Khan a soulevé, écrit Hilale, que c’est « la première fois » que Khaddad adopte « un langage plus réaliste » et de soutenir que le polisarien s’est « métamorphosé en négociateur pragmatique et capable de voir la situation avec lucidité et courage ».
Khaddad serait-il prêt à accepter un plan Baker II modifié ?
Le chef de cabinet du directeur du HCR a déduit de la nouvelle position du Khaddad qu’il « serait suffisamment mûr pour accepter le Plan Baker II, sans sa période transitoire, ni l'option de l'indépendance », écrit Hilale à son ministre des Affaires étrangères marocain.
Le Plan Baker, proposé en janvier 2003 par l’ancien envoyé personnel du secrétaire général de l’ONU pour le Sahara occidental, prévoyait l’organisation d’un référendum visant à déterminer le statut définitif du Sahara occidental au plus tôt quatre ans et au plus tard cinq ans après la date d’entrée en vigueur du plan. Le Maroc avait rejeté la proposition du médiateur américain. En revanche le Polisario et l’Algérie avaient, dans un premier temps, adopté la même position avant de se raviser et l’accepter.
Par ailleurs, la déduction d’Athar Khan est un peu hâtive. La marge de manœuvre des cadres du Polisario sur le processus des négociations est très limitée par rapport à la grande influence de l’Algérie. Sachant qu’en agissant de la sorte, M’Hamed Khaddad s’exposerait à de lourdes sanctions, ou pire encore, un sort similaire à celui réservé à Mhafoud Ali Beiba, décédé en juillet 2010, dans des conditions non-encore élucidées, alors qu’il projetait de rallier le Maroc.
Mohammed Jaabouk
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Athar Sultan Khan, agent du Maroc au sein du HCR
Objet : Confidences du Directeur de cabinet du Haut Commissaire aux Réfugiés.
J'ai l'honneur de vous informer que j'ai eu hier, en marge de ma mission
à Genève, un déjeuner de travail avec M. Athar Khan, Directeur de
cabinet de M. Antonio Guterres, Haut Commissaire des Nations Unies pour
les Réfugiés. Ci-après, la synthèse de notre entretien.
* Le dénommé Ahmed Kheddad est passé le voir récemment à la faveur d'un
déplacement en Europe. Il lui a paru découragé, pessimiste et inquiet
pour l'avenir de « sa cause ». Khan lui a envoyé une lettre de
condoléance -suite au récent décès de sa fille par crise cardiaque-.
* Kheddad a confié que la situation de crises politiques et de guerre en
Afrique du Nord et dans la région sahélo-saharienne, couplée avec les
incertitudes politiques en Algérie, préoccupent profondément les
responsables du polisario. Ajoutant que la stagnation du processus de
négociation politique alimente le désespoir chez les jeunes dans les
camps.
* II lui a, également, déclaré que le statu quo actuel est à l'avantage
du Maroc et que Ross mène une mission impossible. Pire, il est devenu un
problème pour le processus. Le polisario a des doutes sur ses chances
de faire avancer les négociations.
* Khan a constaté que Khaddad lui a tenu, pour la première fois, un
langage plus réaliste que par le passé et que le militant qu'il était
semble métamorphosé en négociateur pragmatique et capable de voir la
situation avec lucidité et courage.
* Khan croit déduire de leur discussion que Kheddad serait suffisamment
mûre pour accepter le Plan Baker II, sans sa période transitoire, ni
l'option de l'indépendance.
* S'agissant des CBM, Khan s'est enquis sur ce que peut ou veut le Maroc
pour la reprise des visites familiales suspendues par le polisario ?
* Je lui ai, immédiatement, répondu que le Maroc ne veut rien sinon que
le HCR dénonce le polisario, le responsabilise pour le blocage actuel et
lui demande de cesser ses manœuvres et ses décisions anti-humanitaires.
Le Maroc n'est plus disposé à faire aucune concession, ni accepter
aucune exploitation politique de ces visites et encore moins les
violations des termes du Plan d'Action agréé par toutes les parties. Il
n'y aura plus ni visites ni séminaire culturel ni réunion d'évaluation
tant que le polisario n'aurait pas rapporté sa décision de suspension.
* Beaucoup de jeunes sahraouis qui participent aux camps d'été en
Espagne refusent de retourner à Tindouf. Ce qui est devenu un sujet
d'anecdote au HCR.
* Lors de sa visite à New York, le mois dernier, Mme Kim Bolduc a
demandé à le rencontrer et lui a révélé qu'elle compte bien s'occuper
des questions des droits de l'Homme au Sahara. Cependant, afin de ne pas
provoquer les autorités marocaines, elle ne le fera pas au début, mais
après s'être bien installée. Khan lui a déconseillée de le faire au
risque de compliquer sa mission.
* L'équipe de Ross a contacté le MENA pour solliciter sa contribution au
rapport du briefing informel du Conseil de Sécurité d'octobre prochain.
Craignant une énième tentative de récupération des CBM, le HCR a
répondu qu'il n'avait rien à signaler pour le moment, d'autant que le
briefing est oral et concerne le volet politique et non humanitaire.
Conclusions :
* Les confidences amicales du Directeur de cabinet du HCR appellent trois remarques:
* Mr Khan semble bénéficier de la confiance du négociateur du polisario.
Ce qui conforte l'investissement dans son possible rôle futur dans la
facilitation du processus politique.
* II est le seul responsable onusien à bien appréhender la complexité
politique du dossier du Sahara et à nourrir soutien et amitié au Maroc.
*I1 est réellement intéressé, motivé et prêt à succéder à Ross. M. Guterres est disposé à l'appuyer le moment venu.
* Sa confidence sur les réelles intentions de Kim Bolduc confirme nos
inquiétudes. Aussi je compte bien soulever cette question lors de ma
rencontre avec Susanna Malcorra, SGA, et Directeur de cabinet de Ban Ki
Moon. A défaut de garanties de sa part, notre pays ne devrait prendre
aucun risque avec elle.
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Au même titre que M. Kompass, M.Athar Sultan Khan a failli à ses
obligations de neutralité dans la gestion du dossier du Sahara
Occidental. Grâce à lui, l'argent du Makhzen coulait à profusion au HCR.
Athar a comploté pour faire échouer la visite entre le président sahraoui et le président du HCR, M. Guterres.
Pour gagner les faveurs du Maroc, Athar Khan n'hésitait pas à
communiquer des informations sensibles à Omar Hilale. Athar a même agi
pour annuler un séminaire humanitaire.
Pour plus de détails sur les services d'Athar Khan en faveur du Maroc, voici les documents révélés par le Wikileaks du Makhzen :
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