Agrocarburants: pour qui roule le gouvernement ?
La Confédération paysanne, Oxfam France, Peuples Solidaires et le Réseau Action Climat dénoncent le double discours du gouvernement sur les agrocarburants: s'il reconnaît les « impacts négatifs graves [de cette politique] sur l’environnement et sur la sécurité alimentaire mondiale », il maintient « les taux d'incorporations à 7 % dans les carburants traditionnels d’ici 2020 » et prolonge les aides accordées à cette industrie.
Le désastre des politiques publiques de soutien aux agrocarburants pourrait enfin toucher à sa fin. Après être restés sourds aux interpellations des Nations unies, de la communauté scientifique et de nombreuses associations, les responsables politiques français et européens reconnaissent enfin publiquement que ces politiques ont des impacts négatifs graves sur l’environnement et sur la sécurité alimentaire mondiale. Le 14 octobre dans Mediapart, Stéphane Le Foll et Pascal Canfin ont reconnu la part de responsabilité de la France en matière de volatilité des prix, et pointé du doigt la concurrence des biocarburants avec la consommation alimentaire. La France et l’Union européenne vont-elles réellement faire marche arrière, et remettre en cause ces politiques ?
Jean-Marc Ayrault a annoncé lors de la conférence environnementale du 15 septembre que la France allait faire une « pause » dans le développement des agrocarburants produits directement à partir de denrées alimentaires, en limitant leur taux d’incorporation à 7 % dans les carburants traditionnels d’ici 2020. Il avait également annoncé que la France souhaitait jouer un rôle de leader sur cette question, en invitant ses partenaires européens à s’engager à ses côtés dans ce processus de « pause ». Pourtant, la Commission européenne semble bien plus ambitieuse que la France, puisqu’elle a confirmé le 17 octobre qu’elle limiterait ce taux à 5 %, c’est-à-dire au niveau déjà atteint aujourd’hui.
Si le gouvernement Ayrault souhaite réellement se démarquer des gouvernements précédents et mettre fin aux impacts négatifs des politiques françaises sur le changement climatique et le droit à l’alimentation des plus vulnérables, pourquoi annonce-t-il un plafond d’incorporation supérieur de 2 points au plafond européen ? Pourquoi décide-t-il de continuer à subventionner largement les industriels du secteur ? Dans un rapport publié en début d’année, la Cour des comptes montrait que, sur la période 2005-2010, les producteurs français d’agrocarburants ont reçu 2,65 milliards d’euros de l’Etat du fait de la défiscalisation partielle dont bénéficie leur production. Or, Jean-Marc Ayrault, loin de supprimer cette niche fiscale, annonce au contraire qu’il la prolonge jusqu’au 31 décembre 2015. Un comble, alors qu’il annonce que les budgets de l’environnement et de l’agriculture doivent diminuer de 15 % d’ici 2015.
Faut-il le rappeler ? Les politiques de soutien aux agrocarburants constituent le principal moteur des accaparements de terres et de la forte volatilité des prix agricoles. A cause d’elles, des millions d’hectares de terres sont confisqués aux paysans du Sud, qui sont déjà les principales victimes de la faim dans le monde, et les prix alimentaires sont poussés à la hausse, privant les ménages les plus vulnérables de leur droit à l’alimentation. Les pics de prix peuvent conduire à des crises alimentaires comme celle que l’on a connu en 2008 lors des émeutes de la faim et qui menace de se renouveler fréquemment. Maintenir les incitations à la production et à la consommation d’agrocarburants aux niveaux actuels ne permettra donc pas de mettre fin à l’insécurité alimentaire et aux violations de droits humains observés aujourd’hui.
Le gouvernement français doit enfin joindre le geste à la parole. Plutôt que de soutenir une industrie coûteuse pour les finances publiques et pour les consommateurs, le gouvernement et le parlement français doivent mettre fin dès maintenant aux objectifs d’incorporation et aux soutiens financiers dont bénéficient les agrocarburants.
Philippe Colin, porte-parole de la Confédération paysanne
Clara Jamart, responsable des questions agricoles, Oxfam France
Carmen Heumann, présidente de Peuples Solidaires en association avec Action Aid
Morgane Créach, directrice du Réseau Action Climat
Le désastre des politiques publiques de soutien aux agrocarburants pourrait enfin toucher à sa fin. Après être restés sourds aux interpellations des Nations unies, de la communauté scientifique et de nombreuses associations, les responsables politiques français et européens reconnaissent enfin publiquement que ces politiques ont des impacts négatifs graves sur l’environnement et sur la sécurité alimentaire mondiale. Le 14 octobre dans Mediapart, Stéphane Le Foll et Pascal Canfin ont reconnu la part de responsabilité de la France en matière de volatilité des prix, et pointé du doigt la concurrence des biocarburants avec la consommation alimentaire. La France et l’Union européenne vont-elles réellement faire marche arrière, et remettre en cause ces politiques ?
Jean-Marc Ayrault a annoncé lors de la conférence environnementale du 15 septembre que la France allait faire une « pause » dans le développement des agrocarburants produits directement à partir de denrées alimentaires, en limitant leur taux d’incorporation à 7 % dans les carburants traditionnels d’ici 2020. Il avait également annoncé que la France souhaitait jouer un rôle de leader sur cette question, en invitant ses partenaires européens à s’engager à ses côtés dans ce processus de « pause ». Pourtant, la Commission européenne semble bien plus ambitieuse que la France, puisqu’elle a confirmé le 17 octobre qu’elle limiterait ce taux à 5 %, c’est-à-dire au niveau déjà atteint aujourd’hui.
Si le gouvernement Ayrault souhaite réellement se démarquer des gouvernements précédents et mettre fin aux impacts négatifs des politiques françaises sur le changement climatique et le droit à l’alimentation des plus vulnérables, pourquoi annonce-t-il un plafond d’incorporation supérieur de 2 points au plafond européen ? Pourquoi décide-t-il de continuer à subventionner largement les industriels du secteur ? Dans un rapport publié en début d’année, la Cour des comptes montrait que, sur la période 2005-2010, les producteurs français d’agrocarburants ont reçu 2,65 milliards d’euros de l’Etat du fait de la défiscalisation partielle dont bénéficie leur production. Or, Jean-Marc Ayrault, loin de supprimer cette niche fiscale, annonce au contraire qu’il la prolonge jusqu’au 31 décembre 2015. Un comble, alors qu’il annonce que les budgets de l’environnement et de l’agriculture doivent diminuer de 15 % d’ici 2015.
Faut-il le rappeler ? Les politiques de soutien aux agrocarburants constituent le principal moteur des accaparements de terres et de la forte volatilité des prix agricoles. A cause d’elles, des millions d’hectares de terres sont confisqués aux paysans du Sud, qui sont déjà les principales victimes de la faim dans le monde, et les prix alimentaires sont poussés à la hausse, privant les ménages les plus vulnérables de leur droit à l’alimentation. Les pics de prix peuvent conduire à des crises alimentaires comme celle que l’on a connu en 2008 lors des émeutes de la faim et qui menace de se renouveler fréquemment. Maintenir les incitations à la production et à la consommation d’agrocarburants aux niveaux actuels ne permettra donc pas de mettre fin à l’insécurité alimentaire et aux violations de droits humains observés aujourd’hui.
Le gouvernement français doit enfin joindre le geste à la parole. Plutôt que de soutenir une industrie coûteuse pour les finances publiques et pour les consommateurs, le gouvernement et le parlement français doivent mettre fin dès maintenant aux objectifs d’incorporation et aux soutiens financiers dont bénéficient les agrocarburants.
Philippe Colin, porte-parole de la Confédération paysanne
Clara Jamart, responsable des questions agricoles, Oxfam France
Carmen Heumann, présidente de Peuples Solidaires en association avec Action Aid
Morgane Créach, directrice du Réseau Action Climat
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