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mardi 15 décembre 2015

Maroc - UE : Sahara Occidental : L'accord agricole UE-Maroc annulé par la justice

De notre bureau de Bruxelles, Aziouz Mokhtari, 14/12/2015

Face à une salle bourrée de journalistes, Gilles Devers, barreau de Lyon, principal avocat du Polisario auprès de la Cour européenne de justice, explique, en détails, pourquoi l’arrêt des juges du Luxembourg ne permet plus aucune tergiversation par l’Union européenne. Les magistrats européens renvoient Rabat et Bruxelles aux fondamentaux.
Maître Devers décortique le pourquoi et le comment les juges du Luxembourg ont balayé les exégèses «bidon» de l’UE pour piller avec le Maroc, les richesses d’autrui, celles du peuple sahraoui.
La Commission européenne, le gouvernement économique des 28, en définitive, est dans de sales draps après l’arrêt rendu par la Cour européene de justice annulant, avec effet immédiat, l’Accord agricole conclu avec le Maroc sur des territoires considérés comme «non autonomes» et relevant de la doctrine des Nations-Unies en matière de décolonisation. 
Le 8 mars 2012, les «commissaires» européens, à leur tête, alors, le Portugais José Manuel Barroso, franchissaient une ligne rouge en piétinant le droit international, celui des Etats membres ainsi que la morale publique. Barroso et les siens s’inventent, alors, pour piller les richesses naturelles du Sahara occidental, un statut «bidon» qui n’existe nulle part en gratifiant le Maroc de «puissance de fait».

Les juges européens balaient cette exégèse de la rapine en renvoyant l’Europe à trois fondamentaux.
La puissance administrante du Sahara occidental est
l’Espagne jusqu’au jour où le statut définitif de ce territoire sera résolu.
A ce niveau, il n’y a aucune alternative au «référendum» d’autodétermination tel qu’édicté par l’ONU et pour lequel le Maroc et le Polisario s’étaient engagés.
Cette «baliverne» de «puissance de fait» a été enterrée rapidement par les magistrats à Luxembourg. 
Le deuxième point à relever dans l’arrêt est la reconnaissance du Front Polisario en tant que représentant unique et légitime du peuple sahraoui en attendant les résultats du processus référendaire.
http://www.lequotidien-oran.com/files/spacer.gifA ce titre, le Polisario est en droit d’ester en justice tout Etat ou entreprise, publique ou privée, qui contracte des accords avec le Maroc englobant le Sahara occidental.
Mohamed Sidati, ministre délégué de la RASD et du Polisario en Europe, n’a pas cessé depuis la date de la signature des Accords agricoles — et de pêche — de Bruxelles avec Rabat de prévenir, d’attirer l’attention des «commissaires» et de leur chef Barroso sur l’illégalité de tels types d’accords. Rien n’y fit, l’Europe aveuglée par l’appât du gain avait préféré la rapine au droit, le commerce illégal au respect de la réglementation et a accepté d’être complice de détournements de biens d’autrui.
Pourtant, les occasions n’ont pas manqué à l’Union européenne pour rectifier le tir et revenir, c’est le cas de l’écrire, dans le... droit chemin. Bon nombre d’eurodéputés de toutes les tendances, notamment ceux regroupés dans l’intergroupe «paix pour le peuple sahraoui», des personnalités politiques de haut rang, des leaders d’opinion, des représentants d’ONG prestigieuses, des femmes et des hommes de droit, des experts, des scientifiques, n’ont cessé d’alerter sur la dangerosité des sentiers empruntés par l’ex-président Barroso.
Jusqu’à tout récemment où l’Association mondiale des juristes, réunie au sein même du Parlement européen (PE) adresse une lettre motivée aux nouvelles instances européennes attirant leur attention sur les caractères illégaux et sortant des clous des plans de l’ONU, des arrangements conclus avec le Maroc au Sahara occidental.
A ce moment-là, il est vrai, les connaisseurs de ce dossier le pressentaient, les lignes commençaient à bouger.
 D’autant plus que ni le nouveau président de la Commission européenne, ni la numéro 2 du gouvernement des 28, l’Italienne Federica Mogherini, ne semblaient vouloir perpétuer l’héritage Barroso sur la question, bâti sur des actes plus proches du banditisme que des relations commerciales entre Etats ou entre un ensemble d’Etats tels que l’Union européenne et d’autres entités.
Le patron actuel de la Commission, Jean-Claude Juncker n’aimait pas à la folie les Accords agricoles et de pêche conclus avec le Maroc.
Federica Mogherini, relations extérieures et de défense commune de l’UE, n’est, d’ailleurs, pas très enthousiaste à faire appel de la décision de la Cour du Luxembourg.
Dans son communiqué elle «acte» l’arrêt des magistrats et dit que la Commission «examinera» cette possibilité.
Quand bien même, elle irait vers l’appel, l’Union européenne n’a aucune chance d’invalider le premier arrêt. Ça ne se passe pas comme ça chez les juges européens.
Gilles Devers, barreau de Lyon, qui a porté la plainte du Polisario à Luxembourg, sourire aux lèvres, satisfait comme on ne peut pas l’être, est catégorique : «C’est la fin des illusions pour l’Union européenne et pour le Maroc... Le tribunal (du Luxembourg, ndlr) ne reconnaît aucune souveraineté au Maroc sur les territoires du Sahara occidental.»
Lors du point de presse animé, hier à Bruxelles pour évoquer ce dossier, maître Devers conseille, vivement, à l’Union européenne de se bouger pour mettre son poids, important, dans l’application des résolutions de l’ONU sur la question du Sahara occidental plutôt que de chercher des «statuts» bidon et hors-la-loi à l’occupant marocain...
Avant de prendre le TGV pour Lyon, maître Gilles Devers ajoute à l’adresse des journalistes, nombreux qui ont assisté à la conférence de presse, «l’administration de fait tombe à l’eau... Il ne reste que le plan de paix de l’ONU pour l’Union européenne»...
A. M.

Sahara Occidental : L'accord agricole UE-Maroc annulé par la justice
par R. N.
La Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a prononcé jeudi l'annulation avec effet immédiat de l'accord controversé sur la libéralisation du commerce des produits agricoles et halieutiques du Maroc conclu en mars 2012 entre le royaume chérifien et l'UE. "La décision 2012/497/UE du Conseil (européen), du 8 mars 2012, concernant la conclusion de l'accord sous forme d'échange de lettres entre l'Union européenne et le royaume du Maroc relatif aux mesures de libéralisation réciproques en matière de produits agricoles, de produits agricoles transformés, de poissons et de produits de la pêche, au remplacement des protocoles n° 1, 2 et 3 et de leurs annexes et aux modifications de l'accord euroméditerranéen établissant une association entre les communautés européennes et leurs Etats membres, d'une part, et le royaume du Maroc, d'autre part, est annulée en ce qu'elle approuve l'application dudit accord au Sahara Occidental (occupé)", est-il écrit dans un jugement rendu jeudi 10 décembre 2015 par la CJUE. Selon le même arrêt, la CJUE estime que le Conseil de l'Union européenne n'a pas vérifié si l'exploitation des ressources naturelles du Sahara Occidental sous occupation marocain se faisait ou non au profit de la population sahraouie. La population du Sahara occidental n'a pas été consultée, bien que l'ONU ait statué qu'aucune activité de ce genre ne peut être engagée si elle ne répond pas à la volonté de la population du territoire.

Des chercheurs de renom en droit international ont déclaré à plusieurs reprises que l'UE viole le droit international au Sahara Occidental. L'ancien sous-secrétaire général des Nations unies aux affaires juridiques, Hans Corell avait déclaré à propos de l'accord de pêche UE-Maroc : "il est clair qu'un accord de ce type, qui ne fait pas la distinction entre les eaux adjacentes au Sahara Occidental et les eaux adjacentes au territoire du Maroc, viole le droit international". Un avis partagé par le service juridique du Parlement européen et plusieurs Etats membres. Par une démarche qui fera date, le mouvement de libération du Sahara Occidental (Front Polisario) avait porté en novembre 2012, devant la Cour européenne de justice un accord de libre-échange UE-Maroc. Un recours similaire pour l'accord de pêche UE-Maroc est engagé par le Front Polisario devant la CJUE.
Le ministre sahraoui délégué pour l'Europe, Mohamed Sidati a salué le jugement rendu jeudi par la Cour de justice de l'Union européenne qui annule l'accord agricole entre l'UE et le Maroc, estimant que par cette décision, la CJUE reconnaît la capacité du Front Polisario à agir en justice en tant que seul représentant du peuple sahraoui. "De cette décision de justice, il en résulte que l'interlocuteur est bel et bien le Front Polisario, représentant authentique, unique et légitime du peuple sahraoui", a-t-il déclaré à l'APS, appelant l'UE à "emboîter le pas" à la CJUE qui a "confirmé et consacré l'identité des deux parties au conflit, à savoir le Maroc et le Sahara Occidental". L'annulation de l'accord agricole entre l'UE et le Maroc constitue, selon M. Sidati, "une victoire" à porter à l'actif du Front Polisario et du peuple sahraoui qui ont obtenu gain de cause des institutions juridiques de l'UE.
Maroc – UE : quand l’annulation de l’accord de pêche provoque une crise diplomatique
11 décembre 2015 à 14h42 —   
Préparation des filets de pêche sur le nouveau port de Dakhla (Maroc).JA © Vincent Fournier/Jeune Afrique
Suite à la décision de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) d’annuler l’accord agricole et de pêche avec le Maroc, ce dernier a vivement réagi demandant à l’Union européenne de clarifier sa position menaçant de revoir l’ensemble de leurs relations.
 « Le Maroc rejette cette décision. Nous demandons aux responsables européens de prendre une position claire et ferme. Sinon, cette décision d’annulation nous poussera à revoir l’ensemble de nos relations bilatérales et aura un impact sur tous nos accords ».
C’est en ces termes que le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement, Mustapha El Khalfi, s’est exprimé à Jeune Afrique au lendemain de la décision de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) d’annuler l’accord agricole et de pêche conclu entre le Maroc et l’Union européenne (UE) en 2012.
« Nous avons commencé à appliquer cet accord de bonne foi tel qu’il a été ratifié», poursuit le porte-parole du gouvernement. Le 10 décembre, suite au verdict de la Cour de justice européenne, le Maroc affirme avoir entamé une série de discussions avec les responsables de l’UE pour les pousser à prendre position.
Quels bénéfices pour la population du Sahara ?
Suite à une requête du Polisario, la Cour de Justice a rejeté l’accord de libéralisation des échanges agricoles et de pêche entre le Maroc et le conseil de l’Union européenne, au motif que cet accord « ne présente pas les garanties nécessaires pour que les ressources de la région du Sahara profitent aux habitants locaux ».
Un coup dur à la diplomatie marocaine qui avait difficilement obtenu la signature de cet accord en 2012 malgré les réserves européennes exprimées à l’époque quant aux réels bénéfices tirés par les populations sahraouies de l’accord de pêche. Le Maroc était alors obligé de présenter un rapport démontrant la preuve de son engagement auprès de ces populations.
Le Polisario, en conflit avec le Maroc depuis 1975, considère que tous les accords internationaux conclus par le royaume chérifien sur le territoire du Sahara violent le droit international. L’organisation concentre tous ses efforts diplomatiques à l’international pour empêcher la résolution de tels accords.
L’Union européenne rassure mais le Maroc demande plus
Dans une déclaration ce vendredi 11 décembre, la haute représentante de l’UE aux Affaires étrangères et à la politique de sécurité, Federica Mogherini, a considéré que les accords bilatéraux de l’UE avec le Maroc ne sont pas remis en cause. Mais, échaudé par la décision d’annulation, le royaume demande plus d’engagement de la part des responsables européens afin qu’ils clarifient leur position, estimant que le jugement de la Cour européenne est « une décision politique et non juridique ».
Le 28 septembre, une crise diplomatique majeure avait éclaté entre le Maroc et la Suède au sujet de la position jugée anti-marocaine de ce pays sur le dossier du Sahara. Rabat a par la suite envoyé une délégation de partis politiques marocains afin d’entamer un dialogue avec leurs homologues suédois et de tenter de contenir les hostilités à la cause marocaine qui menaçait de gagner d’autres pays européens.

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