16/12/2015 | |
Trois ans auront été nécessaires pour que la Cour européenne de
justice examine de manière approfondie le sujet – le Sahara occidental
n'appartient pas au Maroc – et fasse droit au Front Polisario et au
peuple sahraoui quant à l'illégalité de l'accord agricole passé en mars 2012
entre le Maroc et l'Union européenne. accord La Cour vient de rendre son jugement ce 10 décembre 2015, en prononçant l'annulation de l'acte du 8 mars 2012 du Conseil de l'Union européenne relatif à la conclusion de l'accord agricole entre l'UE et le Maroc. Cette annulation est à effet immédiat. Très régulièrement, le Front Polisario conteste les accords internationaux conclus par le Maroc, car celui-ci les applique sur le territoire du Sahara occidental, qui ne relève pas de sa souveraineté. Pour l'accord agricole, le Front Polisario avait été fortement soutenu dès 2011 par le groupe vert du Parlement européen et le rapporteur de l'accord de libre-échange, José Bové, qui avait alerté, en vain, sur la possible non-conformité de cet accord par rapport aux traités internationaux. La situation est désormais claire : avec cette décision de justice, le Front Polisario est confirmé comme représentant légitime du peuple sahraoui, et est en mesure d'agir en tant que sujet de droit international devant la juridiction européenne et celle de chacun des 28 Etats européens. Autre élément confirmé par la Cour : il n'y a pas de souveraineté du Maroc sur le Sahara Occidental et aucun mandat international n'est susceptible de justifier la présence marocaine sur ce territoire. L'idée d'une « administration de facto » du Sahara, retenue jusqu'alors par l'UE, est battue en brèche par la Cour dans la mesure où le Maroc n'a jamais communiqué au Secrétaire général de l'ONU les « renseignements statistiques et autres de nature technique relatifs aux conditions économiques, sociales et de l'instruction » sur le Sahara Occidental, renseignements qu'il aurait dû régulièrement fournir s'il avait été reconnu « responsable » du territoire (cf. article 73 de la Charte des Nations Unies sur les territoires non-autonomes). L'UE ne peut plus ignorer ce fait. Le Maroc a réagi comme toujours avec violence et hors de toute raison puisque ce jugement de la Cour est considéré par le Ministre des Affaires étrangères comme « une attaque contre sa souveraineté ». L'Europe et sa Ministre des Affaires Étrangères, Madame MOGHERINI, essaient de calmer le jeu, pour préserver les « fructueuses » relations économiques entre Maroc et Europe, avec le statut avancé et l'ensemble des accords commerciaux. Les conseillers juridiques se sont mis également au travail pour essayer de sortir l'Europe et son Conseil de ce « guêpier » ! L'idée est-elle de contourner la sentence de la Cour de justice ? Ne serait-il pas plus raisonnable pour l'Europe d'aller au-delà des déclarations de principe et des intérêts à court terme, pour faire cesser le pillage des ressources naturelles du territoire et enfin mettre en œuvre, de manière opérationnelle, son soutien à l'autodétermination du peuple sahraoui ? Il s'agirait alors de négocier avec la partie directement concernée, le Front Polisario, confirmé comme représentant légitime et interlocuteur autorisé dans toutes les négociations qui concernent le Sahara Occidental. Le Polisario quant à lui est prêt à négocier avec l'UE, avec ses États membres et avec les entreprises européennes concernées sur les intérêts dont ils et elles peuvent légitimement se prévaloir. L'engagement actuel du Secrétaire général de l'ONU en faveur de la résolution du conflit du Sahara Occidental devrait inviter l'UE à agir concrètement dans ce sens, alors que le Maroc développe partout un bras de fer pour « garder son Sahara », ce qu'il ne pourra jamais faire valoir devant la Communauté internationale. Le mieux serait que des décisions courageuses accélèrent le dénouement de ce trop vieux conflit. | |
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