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samedi 16 novembre 2013

Colère des paysans de Taliouine : comment le safran devient source de malheur !


Par Lahoucine Amal, 13/11/2013

Taliouine situé au sein de l’Anti Atlas et du Haut Atlas, deux grandes réserves d’eau (jbel Siroua à 3 304 m d'altitude et jbel Toubkal à 4165 m d'altitude), est une région essentiellement  paysanne. La culture du Safran  d’une haute  qualité biologique était la caractéristique de cette agriculture traditionnelle. 
Une belle activité traditionnelle
Chaque année dès le début de l’automne, les paysannes de Taliouine s’activaient à la récolte de cette fleur précieuse, activité socio-culturelle qui a de profondes racines  dans l’histoire paysanne de la région, en harmonie avec le cycle de la nature. Dès l’aube, leur panier à la main elles se rendaient dans les champs.
Mais « l’Or Rouge du Maroc » passe aux mains des rapaces de la finance
La cueillette de « l’Or Rouge du Maroc »  ainsi appelé au domaine du commerce touristique est devenue une exploitation proche de l’esclavage.  La fleur de couleur violette doit être enlevée avant qu’elle ne soit refermée par l’effet de la chaleur des rayons du soleil. Un difficile travail attend alors la paysanne à la maison après la récolte : elle passe des nuits blanches à séparer les étamines de la fleur : le Safran.
 
Ce travail de la femme paysanne est une activité parmi d’autres durant sa vie, transmise de mère en filles qui se préparent au mariage et à ce travail malheureusement sans salaire. Car la plupart des femmes paysannes qui travaillent aux champs du Safran, malgré ce dur travail au prix de leur sueur et de leur sang, ne reçoivent pas un dirham et restent toute leur vie dépendantes de leur homme. Ce dernier porte une partie de la récolte chaque semaine au souk (marché) : et en tire un petit revenu qui sert à payer les frais de la nourriture de la famille pendant une semaine. Mais ce revenu dépend de la décision des grands commerçants du Safran qui fixent le prix de vente pour chaque jour du souk.
Une double exploitation de la force du travail de la femme paysanne : aux champs et à la maison, et une valeur ajoutée dans les poches des grands commerçants. Au nom de la liberté du travail et des prix, le capital impérialiste intervient pour récupérer le taux de revenu que le capital comprador ne peut pas dominer. La marge de revenu qui était longtemps attribuée aux paysans n’est plus accepté dans le système capitaliste financier.
La qualité biologique exceptionnelle du Safran d’origine n’est plus qu’un souvenir !
 Des études scientifiques sur l’Or Rouge du Maroc ont été réalisées dans les laboratoires des pays impérialistes, véritable massacre de la qualité biologique de ce végétal ! Le safran naturel avait préservé depuis des millénaires ses propres capacités à se multiplier dans la terre de Taliouine, en  conservant ses caractères génétiques spécifiques, constituant l’ espèce unique  marocaine.
Mais l’appât du gain pousse les hommes de la science  à détruire tous les trésors que la nature a pu constituer depuis des millénaires, en mettant la main sur les ressources naturelles d’un pays déjà appauvri par le capital comprador. Ces deux systèmes, comprador et capitaliste, sont aujourd’hui bien liés pour assurer l’ exploitation sauvage des paysans.
 Dar le Safran
Dar le Safran (la maison du Safran) a été  construite à Taliouine en 2011. C’est une bourse commerciale de cette matière végétale. L’inauguration de cet établissement a eu lieu le 10 novembre 2011, veille de la victoire de la révolte tunisienne, début d’une ère modifiée de la vie du Safran marocain. La mafia constituée dans la région depuis 1956 à l’aube de l’indépendance , nouvelle forme d’occupation pour servir les intérêts du régime comprador, a maintenant atteint ses hauts niveaux.
Après avoir mis sa main sur les biens publics de Taliouine, la finance de la municipalité et des 13 communes rurales, le  vol systématique appliqué par cette mafia est installé au sein des conseils communaux. Des coopératives et des associations paysannes sont dirigées par les acteurs de ce groupe qui a de l’influence sur toute la vie des paysan(ne)s pauvres de Taliouine. Les chefs de la mafia, après avoir volé l’argent de la coopération Souktana à chaque restructuration de son bureau depuis les années 1970, ont une vaste marge sur les biens des paysans qui sont maintenant obligés de vendre leurs produits à Dar le Safran et attendre des mois et des mois le revenu de leur vente.
 De 30 dirhams (2,7 euros) un gramme de Safran en 2011 à 12 dirhams les années suivantes. C’est vraiment une catastrophe pour l’économie des pauvres paysan(ne)s qui ne peuvent pas arriver à comprendre le complot monté contre leurs intérêts par cette mafia !
Les bulbes génétiquement modifiés
Cette  entreprise de destruction du Safran est aussi catastrophique pour la commercialisation des bulbes du Safran de Taliouine. Le lobby sioniste organise l’achat des bulbes du Safran de Taliouine pour mettre sa main sur cette espèce naturelle Bio, et depuis deux années, il arrive à faire circuler des  bulbes génétiquement modifiés, qui ne contiennent pas le caractère génétique de multiplication : ils restent stériles pour obliger les paysan(ne)s à acheter la marchandise. Quel crime, celui commis par ces hommes de la science envers la nature et l’Homme ! Les pauvres malheureux paysan(ne)s sont choqués par cette catastrophe qui condamne leur  richesse d’excellente qualité bio.
Après avoir exporté l’agriculture du Safran dans d’autres régions, Errachidia, Oujda, Midelt, El Houz … le Safran a perdu  sa caractéristique végétale naturelle de Taliouine. Les  bulbes génétiquement modifiés sont la porte ouverte à  l’exploitation sauvage de l’eau, de la terre et des ressources naturelles de Taliouine.
Lutter contre cette scandaleuse exploitation !
Le seul moyen de lutter contre cette scandaleuse exploitation est de provoquer un soulèvement les femmes paysannes pour réclamer le respect du code du travail à travers  un mouvement ouvrier organisé. Sinon dans l’avenir l’exploitation des ouvrières agricoles risque de devenir catastrophique.
Le “Festival du Safran”
Depuis 2008 la mafia du Safran organise le “festival du Safran”. C’est l’occasion de réunir tous les acteurs du système d’exploitation sauvage des ressources végétales naturelles, des sociétés, coopératives et des associations qui y participent  pour applaudir ce programme. Des recettes, des plats et des cadeaux (paquets de Safran) leur sont remis pour les remercier de participer à cette guerre menée contre le Bio.
La colère des jeunes de Taliouine
A l’occasion de chaque festival des jeunes de Taliouine tentent d’exprimer leur colère sur ce qui se passe dans cette région isolée, avec le chômage au sein de la jeunesse, l’analphabétisme surtout parmi les femmes, le manque de services publics,  de centre de santé, l’insuffisance d’ enseignants et de classes d’enseignement, l’isolement des douars (groupements d’habitants isolés dans les montagnes), le manque d’assainissement…
La peur règne dans les montagnes à cause de la brutalité des forces de répression (gendarmes, agents des autorités), le tribunal de première instance de Taroudant est un appareil de répression systématique qui soutient cette terreur.
Le 09 novembre 2013, lors de la deuxième journée du festival de cette année des jeunes ont pu exprimer leur colère en organisant un sit-in devant le Dar le Safran. Au moment où les acteurs du vol des biens publics de Taliouine sont à table dans les salles de cette établissement, les jeunes manifestent leurs revendications en accusant ces voleurs des biens des pauvres paysan(ne)s. Un comité de suivi a été constitué  pour défendre les droits des paysan(ne)s à l’eau, à la terre, aux ressources naturelles et à la culture amazigh. 





 

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